
Première lecture
Ainsi parle le Seigneur à son messie, à Cyrus, qu’il a pris par la main pour lui soumettre les nations et désarmer les rois, pour lui ouvrir les portes à deux battants, car aucune porte ne restera fermée :
« À cause de mon serviteur Jacob, d’Israël mon élu, je t’ai appelé par ton nom, je t’ai donné un titre, alors que tu ne me connaissais pas. Je suis le Seigneur, il n’en est pas d’autre : hors moi, pas de Dieu. Je t’ai rendu puissant, alors que tu ne me connaissais pas, pour que l’on sache, de l’orient à l’occident, qu’il n’y a rien en dehors de moi. Je suis le Seigneur, il n’en est pas d’autre. »
Psaume
Rendez au Seigneur la gloire et la puissance.
Chantez au Seigneur un chant nouveau, chantez au Seigneur, terre entière, racontez à tous les peuples sa gloire, à toutes les nations ses merveilles !
Il est grand, le Seigneur, hautement loué, redoutable au-dessus de tous les dieux : néant, tous les dieux des nations ! Lui, le Seigneur, a fait les cieux.
Rendez au Seigneur, familles des peuples, rendez au Seigneur la gloire et la puissance, rendez au Seigneur la gloire de son nom. Apportez votre offrande, entrez dans ses parvis.
Adorez le Seigneur, éblouissant de sainteté : tremblez devant lui, terre entière. Allez dire aux nations : « Le Seigneur est roi ! » Il gouverne les peuples avec droiture.
Deuxième lecture
Paul, Silvain et Timothée, à l’Église de Thessalonique qui est en Dieu le Père et dans le Seigneur Jésus Christ. À vous, la grâce et la paix.
À tout moment, nous rendons grâce à Dieu au sujet de vous tous, en faisant mémoire de vous dans nos prières. Sans cesse, nous nous souvenons que votre foi est active, que votre charité se donne de la peine, que votre espérance tient bon en notre Seigneur Jésus Christ, en présence de Dieu notre Père. Nous le savons, frères bien-aimés de Dieu, vous avez été choisis par lui. En effet, notre annonce de l’Évangile n’a pas été, chez vous, simple parole, mais puissance, action de l’Esprit Saint, pleine certitude.
Évangile
Alléluia. Alléluia. Vous brillez comme des astres dans l’univers en tenant ferme la parole de vie. Alléluia.
En ce temps-là, les pharisiens allèrent tenir conseil pour prendre Jésus au piège en le faisant parler. Ils lui envoient leurs disciples, accompagnés des partisans d’Hérode : « Maître, lui disent-ils, nous le savons : tu es toujours vrai et tu enseignes le chemin de Dieu en vérité ; tu ne te laisses influencer par personne, car ce n’est pas selon l’apparence que tu considères les gens. Alors, donne-nous ton avis : Est-il permis, oui ou non, de payer l’impôt à César, l’empereur ? » Connaissant leur perversité, Jésus dit : « Hypocrites ! pourquoi voulez-vous me mettre à l’épreuve ? Montrez-moi la monnaie de l’impôt. » Ils lui présentèrent une pièce d’un denier. Il leur dit : « Cette effigie et cette inscription, de qui sont-elles ? » Ils répondirent : « De César. » Alors il leur dit : « Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. »
Méditer avec les carmes
Le filet se resserre autour de Jésus, et ses conflits avec les chefs du peuple, surtout les Pharisiens, portent sur des questions de plus en plus graves aux yeux de ses contemporains : le tribut à César, la résurrection des morts, le grand commandement, le Messie fils de David : quatre controverses que Matthieu nous rapporte dans le même chapitre 22 de son Évangile.
Cette fois-ci, Jésus affronte une coalition : - d’une part les Hérodiens, partisans inconditionnels du régime en Galilée, et forcément favorables au Rome (Antipas règne en Galilée et Pérée entre 4 av. et 35 ap. J. C), - d’autre part les Pharisiens, maîtres à penser de la classe moyenne, véritables animateurs du complot, qui s’accommodaient tant bien que mal de la domination romaine, du moment qu’on leur laisse leurs privilèges de théologiens.
Ils ont choisi, pour la poser à Jésus, l’une des questions les plus dangereuses, les plus explosives qui soient. Dans l’atmosphère survoltée de la Judée d’alors, une parole maladroite au sujet de l’impôt pourrait suffire à soulever la foule, ou à provoquer des répressions brutales de l’occupant. En plus des charges indirectes qui pesaient sur tous les citoyens romains (taxes d’octroi, droits de douane, impôts sur les successions et les ventes), les provinces lointaines devaient payer le tribut à l’Empereur. Ce tribut, symbole de la sujétion, tous les Juifs le haïssaient, et les zélotes ultra- nationalistes se faisaient un devoir religieux de le refuser. D’autant qu’il ne pouvait être acquitté qu’en monnaie romaine, frappée à l’effigie des empereurs divinisés.
« Dis-nous ton avis » … »Est-il permis ou non de payer l’impôt à l’empereur ? " Toi qui enseignes la voie de Dieu dans la vérité, c’est-à-dire, ici, dans la vérité de la loi, donne-nous ton avis autorisé de rabbi : « Est-ce permis ou non, à la lumière de la loi juive ?
Jésus, fidèle à sa méthode pédagogique, décentre la question … « Montrez-moi la monnaie de l’impôt… De qui est cette image ? … et cette inscription ?... Il ne suffit pas ici d’admirer l’intelligence de Jésus, son tact, son sens de la psychologie des foules ; il faut essayer de rejoindre son intuition profonde :
Jésus, sans ambages, prend parti contre le refus de l’impôt, et par là il récuse l’activisme des zélotes ;
en même temps il précise son attitude - et celle de tous ses disciples - à l’égard des autorités politiques : liberté souveraine, mais non révolte ouverte a priori. Certes le règne de Dieu est inauguré en sa personne, mais les règnes de ce monde exercent encore une autorité qui peut être légitime : « Rendez à César ce qui est à César » ;
enfin Jésus reproche implicitement aux Pharisiens de faire passer, une fois de plus, au premier plan, une question secondaire, au détriment de la seule question décisive : la repentance et l’obéissance à Dieu.
« De qui est cette image ? », demande Jésus aux Juifs sujets de César. Mais à chacun de nous, et chaque jour, le Christ pose une question semblable : « De qui es-tu l’image ?... Quelle image portes-tu ?... Quel visage a été imprimé en toi le jour de ton baptême par l’Esprit de la promesse... Quel sceau as-tu reçu le jour de ta confirmation ? »
Nous savons par la foi que l’homme a été créé à l’image de son Dieu, et que le Christ est venu restaurer en l’homme cette images perdue. Saint Paul explique qu’après avoir porté l’image du premier Adam, l’Adam pécheur, il nous faut porter l’image du second Adam, le Christ Jésus ressuscité, qui est lui-même l’image parfaite du Dieu invisible, le resplendissement de sa gloire, l’effigie de son être intime.
Si pauvres, si fragiles, si lâches que nous soyons, dans la mesure ou nous laissons agir l’Esprit du Seigneur, l’Esprit de la liberté, nous réfléchissons, comme un miroir, la gloire du Seigneur ressuscité, si bien que dès maintenant, dès aujourd’hui, nous sommes transformés en cette image qui est le Christ glorieux, nous sommes par lui « renouvelés à l’image de notre Créateur », et l’image que nous portons en nous devient peu à peu notre visage.
Mystère de l’amour du père qui, de toute éternité, nous a d’avance destinés à reproduire l’image de son fils bien-aimé, image souffrante, image glorieuse.
Admirable et forte pédagogie de Jésus :
chaque fois que nous nous présentons à lui, tels les pharisiens, avec nos questions plus ou moins loyales, avec nos pauvres pièges, avec nos contestations de son Évangile, il nous demande, non plus de fouiller dans nos poches pour les trouver la monnaie de la cité des hommes, mais de faire silence un instant et de tourner nos yeux vers l’intérieur, pour retrouver le visage qui est gravé en nous.
Rends à Dieu ce qui est à Dieu, don pour don, rends à Dieu son image.