
Première lecture
Frères, à chacun d’entre nous, la grâce a été donnée selon la mesure du don fait par le Christ. C’est pourquoi l’Écriture dit : Il est monté sur la hauteur, il a capturé des captifs, il a fait des dons aux hommes. Que veut dire : Il est monté ? – Cela veut dire qu’il était d’abord descendu dans les régions inférieures de la terre. Et celui qui était descendu est le même qui est monté au-dessus de tous les cieux pour remplir l’univers. Et les dons qu’il a faits, ce sont les Apôtres, et aussi les prophètes, les évangélisateurs, les pasteurs et ceux qui enseignent. De cette manière, les fidèles sont organisés pour que les tâches du ministère soient accomplies et que se construise le corps du Christ, jusqu’à ce que nous parvenions tous ensemble à l’unité dans la foi et la pleine connaissance du Fils de Dieu, à l’état de l’Homme parfait, à la stature du Christ dans sa plénitude. Alors, nous ne serons plus comme des petits enfants, nous laissant secouer et mener à la dérive par tous les courants d’idées, au gré des hommes qui emploient la ruse pour nous entraîner dans l’erreur. Au contraire, en vivant dans la vérité de l’amour, nous grandirons pour nous élever en tout jusqu’à celui qui est la Tête, le Christ. Et par lui, dans l’harmonie et la cohésion, tout le corps poursuit sa croissance, grâce aux articulations qui le maintiennent, selon l’énergie qui est à la mesure de chaque membre. Ainsi le corps se construit dans l’amour.
Psaume
Dans la joie, nous irons à la maison du Seigneur.
Quelle joie quand on m’a dit : « Nous irons à la maison du Seigneur ! » Maintenant notre marche prend fin devant tes portes, Jérusalem !
Jérusalem, te voici dans tes murs : ville où tout ensemble ne fait qu’un ! C’est là que montent les tribus, les tribus du Seigneur !
C’est là qu’Israël doit rendre grâce au nom du Seigneur. C’est là le siège du droit, le siège de la maison de David.
Évangile
Alléluia. Alléluia. Je ne prends pas plaisir à la mort du méchant, dit le Seigneur. Qu’il se détourne de sa conduite, et qu’il vive ! Alléluia.
Un jour, des gens rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer, mêlant leur sang à celui des sacrifices qu’ils offraient. Jésus leur répondit : « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort ? Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu’elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ? Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. »
Jésus disait encore cette parabole : « Quelqu’un avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n’en trouva pas. Il dit alors à son vigneron : “Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le. À quoi bon le laisser épuiser le sol ? ” Mais le vigneron lui répondit : “Maître, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas. ” »
Méditer avec les carmes
Dans cette page d’évangile, Luc regroupe trois paroles de Jésus, plus exactement deux paroles et une parabole, qui pointent toutes dans la même direction : toutes trois soulignent la nécessité de se convertir quand il est temps, quand il est encore temps.
Au point de départ : trois situations assez différentes :
les Galiléens sont morts à cause de la cruauté de Pilate ;
les dix-huit personnes ensevelies dans les décombres de la tour de Siloé, à Jérusalem, sont mortes par malchance : elles se sont trouvées au mauvais endroit au mauvais moment ;
mais le figuier, lui, va mourir, coupé, de guerre lasse, par le propriétaire, parce qu’il est resté improductif durant quatre années, parce qu’il « occupait le terrain pour rien ».
L’enseignement de Jésus est tout en nuances.
Pour le premier épisode, Jésus réagit à une mauvaise nouvelle qu’on lui annonce, et il pose lui-même la question : « Croyez-vous que ces Galiléens fussent de plus grands pécheurs que les autres Galiléens, pour avoir subi pareil sort ? » La réponse suit immédiatement, en deux temps : d’une part personne ne peut dire : telle souffrance, telle mort a été pour tel homme un châtiment ; d’autre part personne ne peut ôter à Dieu le pouvoir de rendre à chacun selon ses œuvres.
Pour le second épisode, Jésus renchérit lui-même en rappelant la catastrophe de Siloé ; et l’enseignement est le même : leur dette n’était pas plus grande ; ne voyez pas dans leur mort un châtiment, mais vous, acceptez la conversion.
Quant à la parabole du figuier, elle ne fait état ni d’une cruauté ni d’une catastrophe ; elle décrit nos len-teurs, et la stérilité de l’Évangile à certains moments de notre vie.
Nous occupons le sol, nous épuisons la terre, pour quelle fécondité ? Le maître, de temps à autre, vient chercher des fruits pour son Église, les fruits de la charité active ou les fruits du vrai silence, et qu’avons-nous à lui donner ?
Nous profitons du terreau de l’Église, des sacrements de la foi, des richesses de la vie fraternelle et du dévouement des frères et des sœurs ; pour quelles fleurs de paix, pour quels fruits de joie ?
La question du Seigneur, comme dans toutes ses paraboles, est à la fois douce et radicale.
Si radicale que nous ne cesserons jamais de l’entendre jusqu’au moment de la grande rencontre et quelles que soient la vigueur et l’authenticité de notre réponse quotidienne. Mais dans cette exigence même le Seigneur nous révèle toutes les ressources de sa douceur. Et c’est là que la parabole complète les deux paroles précédentes en apportant un élément essentiel pour notre espérance : le sursis.
Nous sommes en sursis, nous restons en sursis tout au long de notre vie, en vue d’un sursaut de vigueur, d’un renouveau de fécondité, parce que Dieu ne se résigne jamais à la mort.
Jésus vigneron s’attelle lui-même au travail de notre conversion : il bêche sa vigne, souvent, et il ajoute à chaque fois quelque poignées d’un engrais dont il a le secret, un engrais spirituel à base d’humilité, de simplicité et de courage, avec une bonne dose de confiance.
Demandons à la Vierge toute sainte, les uns pour les autres, en vue de ce travail de vérité et de conversion, l’aide de sa prière. En elle « la grâce de Dieu n’a pas été stérile ». Nous la chantons, au Carmel, comme la Vigne fleurie, la Vigne généreuse. Qu’elle nous aide à dire oui, le oui qui rend nos vies porteuses de Dieu, fécondes pour Dieu.