
Première lecture
Frères, recherchez avec ardeur les dons les plus grands. Et maintenant, je vais vous indiquer le chemin par excellence.
J’aurais beau parler toutes les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas la charité, s’il me manque l’amour, je ne suis qu’un cuivre qui résonne, une cymbale retentissante. J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, j’aurais beau avoir toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque l’amour, je ne suis rien. J’aurais beau distribuer toute ma fortune aux affamés, j’aurais beau me faire brûler vif, s’il me manque l’amour, cela ne me sert à rien.
L’amour prend patience ; l’amour rend service ; l’amour ne jalouse pas ; il ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne fait rien d’inconvenant ; il ne cherche pas son intérêt ; il ne s’emporte pas ; il n’entretient pas de rancune ; il ne se réjouit pas de ce qui est injuste, mais il trouve sa joie dans ce qui est vrai ; il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout. L’amour ne passera jamais.
Les prophéties seront dépassées, le don des langues cessera, la connaissance actuelle sera dépassée. En effet, notre connaissance est partielle, nos prophéties sont partielles. Quand viendra l’achèvement, ce qui est partiel sera dépassé. Quand j’étais petit enfant, je parlais comme un enfant, je pensais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant. Maintenant que je suis un homme, j’ai dépassé ce qui était propre à l’enfant.
Nous voyons actuellement de manière confuse, comme dans un miroir ; ce jour-là, nous verrons face à face. Actuellement, ma connaissance est partielle ; ce jour-là, je connaîtrai parfaitement, comme j’ai été connu. Ce qui demeure aujourd’hui, c’est la foi, l’espérance et la charité ; mais la plus grande des trois, c’est la charité.
Psaume
Heureux le peuple que le Seigneur s’est choisi pour domaine.
Rendez grâce au Seigneur sur la cithare, jouez pour lui sur la harpe à dix cordes. Chantez-lui le cantique nouveau, de tout votre art soutenez l’ovation.
Oui, elle est droite, la parole du Seigneur ; il est fidèle en tout ce qu’il fait. Il aime le bon droit et la justice ; la terre est remplie de son amour.
Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu, heureuse la nation qu’il s’est choisie pour domaine ! Que ton amour, Seigneur, soit sur nous comme notre espoir est en toi !
Évangile
Alléluia. Alléluia. Tes paroles, Seigneur, sont esprit et elles sont vie ; tu as les paroles de la vie éternelle. Alléluia.
En ce temps-là, Jésus disait à la foule : « À qui donc vais-je comparer les gens de cette génération ? À qui ressemblent-ils ? Ils ressemblent à des gamins assis sur la place, qui s’interpellent en disant : “Nous avons joué de la flûte, et vous n’avez pas dansé. Nous avons chanté des lamentations, et vous n’avez pas pleuré. ” Jean le Baptiste est venu, en effet ; il ne mange pas de pain, il ne boit pas de vin, et vous dites : “C’est un possédé ! ” Le Fils de l’homme est venu ; il mange et il boit, et vous dites : “Voilà un glouton et un ivrogne, un ami des publicains et des pécheurs. ” Mais, par tous ses enfants, la sagesse de Dieu a été reconnue juste. »
Méditer avec les carmes
Des gamins qui s’ennuient sur une place et qui se renvoient la responsabilité de leur ennui commun : voilà le portrait que Jésus trace de sa génération, peut-être aussi de la nôtre.
Et les gamins n’ont pas d’excuse à bouder ainsi : on ne leur demande pas de faire le jeu, ni d’être le jouet des autres, mais simplement d’entrer dans le jeu, de jouer à la noce pendant que les garçons soufflent dans leur flûte, de jouer à l’enterrement pendant que les filles entonnent la lamentation. On ne leur demande que de jouer, or justement ils ne veulent pas faire leur part, et ils aiment mieux rester là, assis, durant des heures, en dénigrant toutes les initiatives. Rien ne les intéresse de ce qui vient des autres, et ils préfèrent manquer le jeu que d’aider les autres à s’amuser.
Ainsi ont réagi les Pharisiens : ils ont refusé le baptême de Jean, et maintenant ils se raidissent devant l’appel de Jésus ; et pour garder leur autonomie, pour se rassurer sur leur bon droit, ils dévalorisent les deux messagers : « On nous donne le choix entre un demi-fou et un buveur ! »
Les braves gens, eux, ont choisi, et bien choisi. Ils ont reconnu dans les paroles de Jésus l’appel de la Sagesse de Dieu : « Venez, mes fils, écoutez-moi... Venez, mangez de mon pain... Venez, même sans argent, et rassasiez-vous ! » (Pr 9, 5).
Quant à nous, comment se fait-il qu’après tant d’années nous nous retrouvions assis sur la place, boudant la joie de Dieu et plus ou moins insensibles aux signes qu’il nous fait, à toute la musique qu’il invente pour nous ? Comment se fait-il que notre réponse journalière à Dieu soit encore donnée du bout des lèvres, comme si nous traînions avec nous une perpétuelle déception de ce que Dieu nous propose ?
Certains diront peut-être : « Je ne sais plus où j’en suis, et les changements de style me désorientent : faut-il choisir entre l’ascèse ou la liberté ? »
Fausse question sans doute ; faux dilemme. Ce qui est à choisir et à préférer, c’est le Christ ; et la lumière du Christ, comme une lanterne qui avance avec nous (Ps 119, 105), éclairera chaque jour les nouveaux pas à faire. Il y a plus de véritable ascèse que partout ailleurs dans la liberté que le Christ nous offre, et nulle part nous ne serons plus libres que dans l’effort auquel il nous convie.
En un sens, c’est Dieu qui a choisi, et nous avons à entrer librement dans son choix. Dieu a choisi en nous donnant son Fils, et le christianisme est avant tout un chant de noces, avant tout un banquet où l’on mange ensemble, où l’on « mange avec », comme Jésus avec ses amis les pécheurs.
Mais ces noces fêtent un étrange époux, présent pour la foi et absent pour les yeux, et le banquet rassemble ceux qui gardent faim et soif, selon la parole de Jésus à propos de ses disciples, une de ces paroles sans fond qui restent pour nous la charte du voyage :
« les gens de la noce ne vont pas jeûner alors que l’Époux est avec eux ; mais un jour viendra où l’Époux leur sera enlevé ; alors ils jeûneront ».