
Première lecture
Bien-aimé, j’encourage, avant tout, à faire des demandes, des prières, des intercessions et des actions de grâce pour tous les hommes, pour les chefs d’État et tous ceux qui exercent l’autorité, afin que nous puissions mener notre vie dans la tranquillité et le calme, en toute piété et dignité. Cette prière est bonne et agréable à Dieu notre Sauveur, car il veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la pleine connaissance de la vérité. En effet, il n’y a qu’un seul Dieu, il n’y a aussi qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes : un homme, le Christ Jésus, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous. Aux temps fixés, il a rendu ce témoignage, pour lequel j’ai reçu la charge de messager et d’apôtre – je dis vrai, je ne mens pas – moi qui enseigne aux nations la foi et la vérité. Je voudrais donc qu’en tout lieu les hommes prient en élevant les mains, saintement, sans colère ni dispute.
Psaume
Béni soit le Seigneur qui entend la voix de ma prière !
Seigneur, mon rocher, c’est toi que j’appelle : ne reste pas sans me répondre, Entends la voix de ma prière quand je crie vers toi, quand j’élève les mains vers le Saint des Saints !
Le Seigneur est ma force et mon rempart ; à lui, mon cœur fait confiance : il m’a guéri, ma chair a refleuri, mes chants lui rendent grâce.
Le Seigneur est la force de son peuple, le refuge et le salut de son messie. Sauve ton peuple, bénis ton héritage, veille sur lui, porte-le toujours.
Évangile
Alléluia. Alléluia. Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que ceux qui croient en lui aient la vie éternelle. Alléluia.
En ce temps-là, lorsque Jésus eut achevé de faire entendre au peuple toutes ses paroles, il entra dans Capharnaüm. Il y avait un centurion dont un esclave était malade et sur le point de mourir ; or le centurion tenait beaucoup à lui. Ayant entendu parler de Jésus, il lui envoya des notables juifs pour lui demander de venir sauver son esclave. Arrivés près de Jésus, ceux-ci le suppliaient instamment : « Il mérite que tu lui accordes cela. Il aime notre nation : c’est lui qui nous a construit la synagogue. » Jésus était en route avec eux, et déjà il n’était plus loin de la maison, quand le centurion envoya des amis lui dire : « Seigneur, ne prends pas cette peine, car je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit. C’est pourquoi je ne me suis pas autorisé, moi-même, à venir te trouver. Mais dis une parole, et que mon serviteur soit guéri ! Moi, je suis quelqu’un de subordonné à une autorité, mais j’ai des soldats sous mes ordres ; à l’un, je dis : “Va”, et il va ; à un autre : “Viens”, et il vient ; et à mon esclave : “Fais ceci”, et il le fait. » Entendant cela, Jésus fut en admiration devant lui. Il se retourna et dit à la foule qui le suivait : « Je vous le déclare, même en Israël, je n’ai pas trouvé une telle foi ! » Revenus à la maison, les envoyés trouvèrent l’esclave en bonne santé.
Méditer avec les carmes
C’était vraiment un Romain pas ordinaire : un occupant qui se souciait de bâtir une synagogue, un officier malheureux de voir souffrir un esclave ! Et comme c’est le cas souvent pour les hommes au cœur droit, c’est sa charité qui l’a mis sur le chemin de la foi.
Sa première idée a été d’amener Jésus jusqu’au malade. L’Évangile le dit clairement : « Il lui envoya quelques notables juifs pour le prier de venir afin de sauver l’esclave ». Puis, dans un deuxième temps, alors que Jésus déjà s’approche de la maison, le centurion s’effraie de l’honneur que Jésus va lui faire, et il envoie des amis, cette fois, pour dire à Jésus : « Ne prends pas cette peine ! ». Ce qui revient à dire : « Sauve-le sans venir ; sauve-le de là-bas où tu es ! »
Quelle lutte magnifique dans le cœur de cet homme : il veut voir Jésus et il a besoin de lui, mais il se sent indigne, et par loyauté il se dérobe. Il fait venir Jésus, et il prend de la distance, comme s’il ne pouvait rencontrer le Sauveur que par notables ou amis interposés.
Mais cette distance que crée son humilité n’arrêtera pas le pouvoir de Jésus ni son amour. Le centurion le sait, il le croit de toutes ses forces, et il le fait dire à Jésus par ses amis : « Tu n’as qu’à parler, et la maladie va t’obéir ! Dis seulement un mot, et ce sera un ordre de guérison : seulement un mot, et ce sera fait ! »
La réponse de Jésus est une merveille de délicatesse.
D’abord il ne fait pas un pas de plus. Il n’ira pas chez ce Romain dont pourtant il admire la foi, justement pour laisser à la foi toute sa grandeur et pour respecter l’humilité du centurion. Et non seulement Jésus n’avance pas vers la maison, mais il ne prononce même pas la parole attendue ; il ne dit même pas : « La foi de cet homme a sauvé le garçon », parce que le centurion n’est pas là pour entendre lui-même la parole qui sauve.
Jésus n’avance plus ; il se retourne même vers la foule, pour lui dire, à elle, ce qu’il aurait aimé dire à cet homme : « Même en Israël je n’ai pas trouvé une telle foi ! »
Même au Carmel Jésus ne trouve pas toujours cette audace dans la foi. Il rencontre souvent en nous des réflexes d’humilité, la certitude que nous ne valons pas son dérangement, mais pas toujours la certitude heureuse, joyeuse, qu’il peut tout faire en nous sans même se déranger, et que pour lui « il n’y a pas de distance » (Élisabeth de la Trinité). De là où il est, de la gloire qu’il habite, il peut nous guérir et veut nous sauver. Il lui suffit d’un mot, mais ce mot, que nous n’entendons pas, nous avons à croire qu’il le dit.
Le centurion était certain que Jésus le dirait. Les envoyés ne l’ont pas entendu, mais Jésus, à l’insu de tous, a bien donné son ordre puisque, « de retour à la maison, les envoyés ont trouvé l’esclave en bonne santé ».
Il suffit au Seigneur d’une parole, d’une parole créatrice, pour sauver chacun de ceux que nous portons dans le cœur. Mais le malade, c’est nous aussi ; et l’Église, toujours réaliste dans sa liturgie, retourne pour une fois la parole de Jésus et nous fait dire pour nous-mêmes, à chaque Eucharistie, comme un acte de foi plein de douceur :
« Dis seulement une parole et je serai guéri ! »