Je m'abonne
© Shutterstock/Barbara babala
Des miracles étonnants
Santa Fe (Nouveau-Mexique)
Nº 748
1878

L’escalier de saint Joseph à Santa Fe

Au XIXe siècle, aux États-Unis, les Sœurs de Loretto font construire à Santa Fe, au Nouveau-Mexique, une chapelle inspirée de la Sainte-Chapelle de Paris. Achevé en 1878, l’édifice est une véritable œuvre d’art gothique. Cependant, à la fin des travaux, un problème majeur surgit : aucun accès n’a été prévu pour atteindre la tribune du chœur. L’espace restreint de la chapelle rend impossible l’installation d’un escalier traditionnel, et l’usage d’une simple échelle serait trop dangereux pour les religieuses, dont beaucoup sont âgées. Les sœurs entament alors une neuvaine à saint Joseph, patron des charpentiers, pour qu’une solution leur soit donnée.


Les raisons d'y croire

  • Les sœurs consultent plusieurs menuisiers dans la région sans qu’aucun ne propose de solution : l’escalier semble impossible à construire à cause de l’exiguïté de l’espace.

  • Mais, à l’issue du neuvième jour de prière, quelqu’un se présente et propose de construire l’escalier. Personne ne sait qui il est, ni d’où il vient. Le résultat de son travail est un joyau d’ébénisterie : comme un ressort, l’escalier ne possède pas de support central, ce qui est extrêmement rare aujourd’hui et quasiment inexistant au XIXe siècle.

  • Non seulement l’escalier construit par cet homme mystérieux répond parfaitement aux besoins des sœurs – ce qui est déjà remarquable compte tenu des contraintes –, mais il se distingue également par son étonnante harmonie. Composé de 33 marches – écho aux 33 années de la vie du Christ –, il décrit deux révolutions complètes à 360 degrés, avec des marches parfaitement régulières, toutes de hauteur identique.

  • Selon Urban C. Weinder, architecte de la région et expert en boiseries, l’une des choses les plus surprenantes est la parfaite courbure des limons qui raccordent le bois par neuf entures sur l’extérieur et sept sur l’intérieur : la courbure de chaque pièce est parfaite.

  • Créer un tel escalier avec des outils modernes relève déjà de l’exploit, mais sa construction par un seul homme, dans les années 1870, avec des outils manuels rudimentaires, sans électricité et avec des ressources minimales, est plus qu’impressionnante.

  • Il a été confirmé que le bois utilisé pour l’escalier provenait d’un épicéa, bois qui n’est pas originaire du Nouveau-Mexique. La présence de ce bois à Santa Fe, dans une région où du chêne ou du pin aurait été plus naturellement utilisé, n’est pas expliquée.

  • L’escalier continue de susciter l’admiration. Il ne fait aucun doute que l’homme qui l’a construit était un artisan d’exception, maîtrisant parfaitement le travail du bois et les principes de l’architecture. Un tel chef-d’œuvre lui aurait apporté reconnaissance et renommée. Et pourtant, le charpentier choisit de garder l’anonymat et quitte les lieux sans empocher la rémunération prévue. Ce comportement est inexplicable.


En savoir plus

Dans les années 1870, à Santa Fe, au Nouveau-Mexique, les Sœurs de Loretto font bâtir une chapelle dédiée à la Vierge Marie. Inspiré de la Sainte-Chapelle de Paris, l’édifice gothique se dresse fièrement dans le paysage aride du Sud-Ouest américain. Mais, à peine les travaux achevés, un problème de taille apparaît : aucun accès n’a été prévu pour monter à la tribune du chœur, située en hauteur.

Or, l’espace à l’intérieur de la chapelle est trop exigu pour accueillir un escalier traditionnel. Quant à l’idée d’installer une échelle, elle semble non seulement peu digne du lieu, mais aussi trop dangereuse pour les sœurs, dont plusieurs sont âgées. Des charpentiers et des architectes locaux sont consultés, mais aucune solution permettant de construire un escalier sans nuire à l’esthétique ou à la stabilité du bâtiment n’est envisagée.

Face à cette impasse, les sœurs font naturellement appel à leur foi. Elles entreprennent une neuvaine de prière à saint Joseph, le saint patron des charpentiers et des bâtisseurs. Saint Joseph n’est pas seulement le père nourricier du Christ ; il est aussi le modèle du travailleur humble et juste, celui qui façonne le bois avec sagesse et patience. Pour les sœurs, le recours à son intercession est une évidence : s’il existe une solution, celle-ci viendra par son intercession.

Le neuvième jour, alors que les prières touchent à leur fin, un homme apparaît à la porte de la chapelle. Il est vêtu simplement, porte quelques outils et propose de construire l’escalier. Les sœurs, bien que surprises, acceptent qu’il essaie. Nul ne connaît cet homme, aucun artisan local ne l’a recommandé, et il ne donne ni nom ni adresse.

Il travaille seul, à l’abri des regards, dans le silence de la chapelle. Aucun grand chantier, aucun charroi de bois ne semble accompagner sa tâche. Pourtant, au fil des semaines, un escalier en colimaçon spectaculaire prend forme. Il s’élève en deux spirales complètes de 360 degrés, sans pilier central, sans clous visibles, et s’intègre avec une grâce parfaite dans l’espace limité.

L’ouvrage terminé, le charpentier disparaît sans demander le moindre paiement. Les sœurs cherchent à le retrouver, en vain. Personne ne sait qui il est, ni d’où il vient.

L’escalier émerveille les religieuses et les habitants de Santa Fe. Sa conception relève du chef-d’œuvre d’ébénisterie. Le bois semble travailler comme un ressort, répartissant les forces avec une telle ingéniosité que l’ensemble tient debout sans le moindre support central. Les marches, toutes de hauteur parfaitement égale, s’enroulent avec élégance jusqu’à la tribune, dans un équilibre parfait.

Plus tard, une rampe métallique est ajoutée pour améliorer la sécurité. Ironiquement, cette modification, bien que pratique, altère la stabilité de l’ensemble : l’escalier, conçu pour fonctionner de manière homogène entièrement en bois, souffre maintenant d’un déséquilibre introduit par ce nouvel élément… Cependant, près de 150 ans plus tard, l’escalier de Loretto est toujours là. Il tient bon, défiant les lois de l’architecture conventionnelle et l’épreuve du temps. C’est un mystère non résolu, une œuvre d’art et d’artisanat autant qu’un témoignage de foi. Il n’est pas seulement un exploit technique : il est un signe laissé par celui qu’on appelle encore « le charpentier venu de Dieu ».

Maximilien Parent, ingénieur structure.


Aller plus loin

Joseph, modèle de vie pour notre temps, MDN Productions, 2020.


En complément

Précédent
Voir tout
Suivant