
Première lecture
Moïse disait au peuple : « Maintenant, sais-tu, Israël, ce que le Seigneur ton Dieu te demande ? Craindre le Seigneur ton Dieu, suivre tous ses chemins, aimer le Seigneur ton Dieu, le servir de tout ton cœur et de toute ton âme, garder les commandements et les décrets du Seigneur que je te donne aujourd’hui pour ton bien.
C’est au Seigneur ton Dieu qu’appartiennent les cieux et les hauteurs des cieux, la terre et tout ce qu’elle renferme. Et pourtant, c’est uniquement à tes pères que le Seigneur ton Dieu s’est attaché par amour. Après eux, entre tous les peuples, c’est leur descendance qu’il a choisie, ce qu’il fait encore aujourd’hui avec vous. Pratiquez la circoncision du cœur, n’ayez plus la nuque raide, car le Seigneur votre Dieu est le Dieu des dieux et le Seigneur des seigneurs, le Dieu grand, vaillant et redoutable, qui est impartial et ne se laisse pas acheter. C’est lui qui rend justice à l’orphelin et à la veuve, qui aime l’immigré, et qui lui donne nourriture et vêtement. Aimez donc l’immigré, car au pays d’Égypte vous étiez des immigrés. Tu craindras le Seigneur ton Dieu, tu le serviras, c’est à lui que tu resteras attaché, c’est par son nom que tu prêteras serment. Il est ton Dieu, c’est lui que tu dois louer : il a fait pour toi ces choses grandes et redoutables que tu as vues de tes yeux. Quand tes pères sont arrivés en Égypte, ils n’étaient que 70 ; mais à présent le Seigneur votre Dieu vous a rendus aussi nombreux que les étoiles du ciel. »
Psaume
Glorifie le Seigneur, Jérusalem !
Glorifie le Seigneur, Jérusalem ! Célèbre ton Dieu, ô Sion ! Il a consolidé les barres de tes portes, dans tes murs il a béni tes enfants.
Il fait régner la paix à tes frontières, et d’un pain de froment te rassasie. Il envoie sa parole sur la terre : rapide, son verbe la parcourt.
Il révèle sa parole à Jacob, ses volontés et ses lois à Israël. Pas un peuple qu’il ait ainsi traité ; nul autre n’a connu ses volontés.
Évangile
Alléluia. Alléluia. Par l’annonce de l’Évangile, Dieu vous appelle à partager la gloire de notre Seigneur Jésus Christ. Alléluia.
En ce temps-là, comme Jésus et les disciples étaient réunis en Galilée, il leur dit : « Le Fils de l’homme va être livré aux mains des hommes ; ils le tueront et, le troisième jour, il ressuscitera. » Et ils furent profondément attristés. Comme ils arrivaient à Capharnaüm, ceux qui perçoivent la redevance des deux drachmes pour le Temple vinrent trouver Pierre et lui dirent : « Votre maître paye bien les deux drachmes, n’est-ce pas ? » Il répondit : « Oui. » Quand Pierre entra dans la maison, Jésus prit la parole le premier : « Simon, quel est ton avis ? Les rois de la terre, de qui perçoivent-ils les taxes ou l’impôt ? De leurs fils, ou des autres personnes ? » Pierre lui répondit : « Des autres. » Et Jésus reprit : « Donc, les fils sont libres. Mais, pour ne pas scandaliser les gens, va donc jusqu’à la mer, jette l’hameçon, et saisis le premier poisson qui mordra ; ouvre-lui la bouche, et tu y trouveras une pièce de quatre drachmes. Prends-la, tu la donneras pour moi et pour toi. »
Méditer avec les carmes
Une fois par an, chaque homme du peuple d’Israël devait acquitter un impôt de deux drachmes pour le culte du Temple de Jérusalem. Même ceux qui venaient de l’étranger étaient tenus de payer cet impôt en monnaie juive, et c’est pourquoi les tables des changeurs avaient été installées dans les parvis du Temple. Au fond, ce paiement de l’impôt était l’un des signes auxquels on reconnaissait un juif pratiquant fidèle aux traditions de son peuple. Et Jésus y avait toujours correspondu, comme Pierre l’a répondu sans hésitation aux préposés des impôts.
Jésus a profité de l’incident pour instruire Pierre, (encore Pierre !) car en tant que chef de l’Église il aurait à faire face à des situations semblables.
Le principe, bien clair, énoncé par Jésus, c’est qu’il est exempt de cet impôt pour le Temple, ainsi que ceux qui travaillent avec lui. De même, en effet, que les rois de la terre ne prélèvent pas d’impôts sur leur famille directe, de même Dieu ne va pas demander à son propre Fils de payer une redevance pour le Temple ; Aussi bien, désormais, le Temple est-il la personne de Jésus lui-même, puisque c’est en lui que Dieu se manifeste, que c’est en lui qu’on peut le rencontrer et qu’on peut le prier.
En droit, donc, Jésus n’est obligé à rien. Mais comme il ne veut pas que son attitude soit mal comprise, qu’elle étonne les gens et les empêche d’entendre son message, Jésus comme tout bon juif, acquitte l’impôt.
Et ce geste de Jésus est riche d’enseignement pour notre vie fraternelle. Ne pas choquer les autres peut être parfois une authentique charité. Et autant il n’est pas évangélique de se trouver toujours des excuses, autant il peut être bon parfois d’expliquer son attitude afin de prévenir un étonnement qui ferait du mal, non à nous, mais aux autres. La charité et l’humilité commandent parfois de ne pas se défendre, mais à d’autres moments, la charité consistera à ne pas encourir de critiques, et à épargner à nos frères ou à nos sœurs des questions, des soupçons, qui les troubleraient.
C’est en ce sens que saint Paul recommandait : « Recherchez ce qui est bien non seulement devant Dieu mais devant les hommes », non pas, bien sûr, pour se faire valoir aux yeux des hommes, mais pour ne rien laisser sur la route qui puisse blesser ou faire tomber un frère.
Il y a donc des cas où la charité doit passer avant l’humilité, ou plutôt des cas où la vraie humilité consiste à être vraie jusqu’au bout, et à mettre d’avance nos frères ou nos sœurs dans ce climat apaisant de la vérité, de la clarté fraternelle. Cette humilité équilibrée par la charité est un signe de liberté intérieure. C’est une manière de vivre la parole de Jésus : « Dites oui, si c’est oui ; non, si c’est non. Tout le reste vient du Mauvais ».
Et Jésus lui même aujourd’hui nous montre l’exemple : « Pour ne pas causer la chute de ces gens-là, va à la mer, jette l’hameçon. » Autrement dit : Pierre, fais les gestes qui sont normaux en pareil cas : c’est normal d’avoir quelques sous pour payer ce que les autres paient ; redeviens pêcheur pendant quelques minutes, gagne ta vie un moment comme tout le monde la gagne, pour que les autres te sentent vraiment l’un des leurs.
Et par une délicatesse supplémentaire, Jésus se solidarise avec Pierre : c’est avec la même pièce que Pierre paiera pour lui-même et pour Jésus : « Prends le statère, et donne-le leur, pour moi et pour toi ! » C’est comme si Jésus disait à Pierre, avec beaucoup d’humour et d’amitié : « Toi et moi sommes affrontés aux mêmes difficultés. Il faut savoir de temps à autre renoncer à un morceau de liberté, il faut savoir faire les gestes qui apaisent ; n’hésite pas à les faire, je t’y aiderai toujours. »
Et la pêche miraculeuse du poisson symbolise justement cette aide de Jésus qui ne fera pas défaut. Jésus travaillera toujours avec nous quand nous travaillerons pour la paix, et il nous fera toujours réussir au-delà de nos forces. Quand nous nous remettons à la pêche par amour du Seigneur, tous les poissons de nos journées ont une belle pièce à la bouche, et chacune de ces pièces nous achète la paix et l’harmonie fraternelle.
Le grand honneur qui nous est fait, c’est de payer pour la paix le même prix que Jésus.