
Première lecture
L’année de la mort du roi Ozias, je vis le Seigneur qui siégeait sur un trône très élevé ; les pans de son manteau remplissaient le Temple. Des séraphins se tenaient au-dessus de lui. Ils se criaient l’un à l’autre : « Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur de l’univers ! Toute la terre est remplie de sa gloire. » Les pivots des portes se mirent à trembler à la voix de celui qui criait, et le Temple se remplissait de fumée. Je dis alors : « Malheur à moi ! je suis perdu, car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures : et mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers ! » L’un des séraphins vola vers moi, tenant un charbon brûlant qu’il avait pris avec des pinces sur l’autel. Il l’approcha de ma bouche et dit : « Ceci a touché tes lèvres, et maintenant ta faute est enlevée, ton péché est pardonné. » J’entendis alors la voix du Seigneur qui disait : « Qui enverrai-je ? qui sera notre messager ? » Et j’ai répondu : « Me voici : envoie-moi ! »
Psaume
Je te chante, Seigneur, en présence des anges.
De tout mon cœur, Seigneur, je te rends grâce : tu as entendu les paroles de ma bouche. Je te chante en présence des anges, vers ton temple sacré, je me prosterne.
Je rends grâce à ton nom pour ton amour et ta vérité, car tu élèves, au-dessus de tout, ton nom et ta parole. Le jour où tu répondis à mon appel, tu fis grandir en mon âme la force.
Tous les rois de la terre te rendent grâce quand ils entendent les paroles de ta bouche. Ils chantent les chemins du Seigneur : « Qu’elle est grande, la gloire du Seigneur ! »
Ta droite me rend vainqueur. Le Seigneur fait tout pour moi ! Seigneur, éternel est ton amour : n’arrête pas l’œuvre de tes mains.
Deuxième lecture
Frères, je vous rappelle la Bonne Nouvelle que je vous ai annoncée ; cet Évangile, vous l’avez reçu ; c’est en lui que vous tenez bon, c’est par lui que vous serez sauvés si vous le gardez tel que je vous l’ai annoncé ; autrement, c’est pour rien que vous êtes devenus croyants.
Avant tout, je vous ai transmis ceci, que j’ai moi-même reçu : le Christ est mort pour nos péchés conformément aux Écritures, et il fut mis au tombeau ; il est ressuscité le troisième jour conformément aux Écritures, il est apparu à Pierre, puis aux Douze ; ensuite il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois – la plupart sont encore vivants, et quelques-uns sont endormis dans la mort –, ensuite il est apparu à Jacques, puis à tous les Apôtres. Et en tout dernier lieu, il est même apparu à l’avorton que je suis.
Car moi, je suis le plus petit des Apôtres, je ne suis pas digne d’être appelé Apôtre, puisque j’ai persécuté l’Église de Dieu. Mais ce que je suis, je le suis par la grâce de Dieu, et sa grâce, venant en moi, n’a pas été stérile. Je me suis donné de la peine plus que tous les autres ; à vrai dire, ce n’est pas moi, c’est la grâce de Dieu avec moi.
Bref, qu’il s’agisse de moi ou des autres, voilà ce que nous proclamons, voilà ce que vous croyez.
Évangile
Alléluia. Alléluia. « Venez à ma suite, dit le Seigneur, et je vous ferai pêcheurs d’hommes. » Alléluia.
En ce temps-là, la foule se pressait autour de Jésus pour écouter la parole de Dieu, tandis qu’il se tenait au bord du lac de Génésareth. Il vit deux barques qui se trouvaient au bord du lac ; les pêcheurs en étaient descendus et lavaient leurs filets. Jésus monta dans une des barques qui appartenait à Simon, et lui demanda de s’écarter un peu du rivage. Puis il s’assit et, de la barque, il enseignait les foules. Quand il eut fini de parler, il dit à Simon : « Avance au large, et jetez vos filets pour la pêche. » Simon lui répondit : « Maître, nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ; mais, sur ta parole, je vais jeter les filets. » Et l’ayant fait, ils capturèrent une telle quantité de poissons que leurs filets allaient se déchirer. Ils firent signe à leurs compagnons de l’autre barque de venir les aider. Ceux-ci vinrent, et ils remplirent les deux barques, à tel point qu’elles enfonçaient. À cette vue, Simon-Pierre tomba aux genoux de Jésus, en disant : « Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur. » En effet, un grand effroi l’avait saisi, lui et tous ceux qui étaient avec lui, devant la quantité de poissons qu’ils avaient pêchés ; et de même Jacques et Jean, fils de Zébédée, les associés de Simon. Jésus dit à Simon : « Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras. » Alors ils ramenèrent les barques au rivage et, laissant tout, ils le suivirent.
Méditer avec les carmes
La rencontre commence, ce matin-là, d’une manière presque banale. Jésus demande à Simon un tout petit service : l’éloigner un peu du rivage pour que sa voix porte mieux et que tout le monde entende. Cela ne coûte pas grand chose, et Simon accepte de bonne grâce. Mais notons un détail qui sans doute ne lui a pas échappé, pas plus qu’aux autres pêcheurs : Jésus se met au travail au moment où eux viennent de terminer, au moment où ils ont renoncé et rangent leur matériel, pensant qu’il est maintenant trop tard pour prendre quoi que ce soit, et que l’échec est définitif ce jour-là.
Même quand il est trop tard pour les réussites humaines, il n’est jamais trop tard pour Dieu, et Dieu nous demande souvent, aux moments de fatigue ou de découragement, ce petit geste qui n’a l’air de rien, mais qui déjà nous met en marche vers lui.
Cependant Simon n’est encore qu’au début de ses surprises. Quand Jésus a fini de parler, il l’envoie pêcher, loin du rivage, en eau profonde. Simon est persuadé que c’est inutile, après une longue nuit infructueuse, mais il y a la parole de Jésus, plus forte que toutes ses évidences, plus sûre que ses doutes, plus impérieuse que son découragement. Et parce que, par la foi, ou du moins par sa confiance au « rabbi », il a su dépasser les limites de son bon sens trop humain, la pêche va dépasser ses espérances, et la disproportion même de la prise soulignera que c’est l’œuvre de Dieu.
Quand Dieu agit dans une vie, tout devient royal ; mais le plus difficile est de lui laisser les mains libres.
Première réaction de Simon et de ses compagnons : la stupeur et la crainte : « Éloigne-toi de moi, Seigneur ! » Tout à l’heure, après avoir entendu Jésus parler aux foules, Simon lui disait : rabbi ». Maintenant, après avoir vu sa puissance, il l’appelle Seigneur. Il a bien perçu la majesté de Dieu en Jésus, mais c’est encore, pour lui, une majesté qui éloigne ; elle éveille l’adoration, mais pas encore l’amour : « Éloigne-toi de moi car je suis un pécheur ! » Simon imagine qu’il faut mettre une distance entre l’homme indigne et Dieu qui fait merveille. Mais Dieu qui est le tout autre veut être aussi le tout proche. Non seulement il est le tout-puissant, mais il veut être le tout aimé. C’est pourquoi Jésus écarte la peur : « Rassure-toi ! ». Et comment rassure-t-il le disciple ? En lui confiant une mission et en l’appelant à collaborer avec lui : « désormais ce sont des hommes que tu prendras. »
Simon prendra des hommes dans son filet comme il a pris ce jour-là des poissons : à l’heure où il s’y attendra le moins, et uniquement sur la parole de Jésus. Or « l’amour parfait bannit la peur », et c’est à la fois pour nous guérir de la peur et pour réveiller notre amour que le Christ nous fait entendre de nouveau son appel, son ordre, sa promesse : « tu pêcheras des hommes, tu entreras avec moi dans l’œuvre du salut ».
L’essentiel est de laisser le Christ nous conduire en haute mer jusqu’où il veut, nous aimer autant qu’il veut nous aimer. La pêche suivra, à l’heure de Dieu.