
Première lecture
Frères, si vous vous laissez conduire par l’Esprit, vous n’êtes pas soumis à la Loi. On sait bien à quelles actions mène la chair : inconduite, impureté, débauche, idolâtrie, sorcellerie, haines, rivalité, jalousie, emportements, intrigues, divisions, sectarisme, envie, beuveries, orgies et autres choses du même genre. Je vous préviens, comme je l’ai déjà fait : ceux qui commettent de telles actions ne recevront pas en héritage le royaume de Dieu. Mais voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi. En ces domaines, la Loi n’intervient pas. Ceux qui sont au Christ Jésus ont crucifié en eux la chair, avec ses passions et ses convoitises. Puisque l’Esprit nous fait vivre, marchons sous la conduite de l’Esprit.
Psaume
Qui marche à ta suite, Seigneur, aura la lumière de la vie
Heureux est l’homme qui n’entre pas au conseil des méchants, qui ne suit pas le chemin des pécheurs, ne siège pas avec ceux qui ricanent, mais se plaît dans la loi du Seigneur et murmure sa loi jour et nuit !
Il est comme un arbre planté près d’un ruisseau, qui donne du fruit en son temps, et jamais son feuillage ne meurt ; tout ce qu’il entreprend réussira. Tel n’est pas le sort des méchants.
Mais ils sont comme la paille balayée par le vent, Le Seigneur connaît le chemin des justes, mais le chemin des méchants se perdra.
Évangile
Alléluia. Alléluia. Mes brebis écoutent ma voix, dit le Seigneur ; moi, je les connais, et elles me suivent.
Alléluia.
En ce temps-là, Jésus disait : « Quel malheur pour vous, pharisiens, parce que vous payez la dîme sur toutes les plantes du jardin, comme la menthe et la rue et vous passez à côté du jugement et de l’amour de Dieu. Ceci, il fallait l’observer, sans abandonner cela. Quel malheur pour vous, pharisiens, parce que vous aimez le premier siège dans les synagogues, et les salutations sur les places publiques. Quel malheur pour vous, parce que vous êtes comme ces tombeaux qu’on ne voit pas et sur lesquels on marche sans le savoir. »
Alors un docteur de la Loi prit la parole et lui dit : « Maître, en parlant ainsi, c’est nous aussi que tu insultes. » Jésus reprit : « Vous aussi, les docteurs de la Loi, malheureux êtes-vous, parce que vous chargez les gens de fardeaux impossibles à porter, et vous-mêmes, vous ne touchez même pas ces fardeaux d’un seul doigt. »
Méditer avec les carmes
Même dans la vie des croyants peuvent se glisser des comportements inauthentiques, et si Jésus, dans cet épisode de l’Évangile, les dénonce avec sévérité, c’est parce qu’il s’adresse à des hommes qui se posaient en champions de la fidélité : les pharisiens, fiers de leur observance, et les docteurs de la Loi, qui précisaient pour tous les règles de la morale.
Le premier reproche que Jésus leur adresse est qu’ils font erreur sur ce que Dieu attend des hommes. Ils mettent leur fidélité dans des détails extérieurs et secondaires, ils s’imaginent que Dieu réclame la dîme sur les fines herbes, et ils passent à côté de l’essentiel : s’ajuster au vouloir de Dieu (c’est cela, la « justice », au sens de l’Ancien Testament) et aborder le prochain avec miséricorde.
Deuxième reproche aux pharisiens : ils se servent de la religion à leur profit. Ils tirent bénéfice de leur observance religieuse pour valoriser l’image d’eux-mêmes et pour apparaître aux autres comme des êtres d’exception, aussi bien dans l’assemblée des croyants que sur les places publiques ; et ils oublient que seuls sont grands devant Dieu ceux qui se font petits et reconnaissent leur pauvreté.
Troisième reproche : « Vous, les pharisiens, qui vous donnez en exemple, vous êtes comme des tombes que rien ne signale ». Si l’on savait, on les éviterait, on les contournerait. Si l’on savait ce que vous êtes à l’intérieur, ce que cache votre apparence, on se détournerait de vous !
Le quatrième reproche s’adresse aux légistes, aux intellectuels, aux maîtres de l’opinion religieuse : « Vous ne savez pas quoi inventer pour surcharger les autres », pour les enfermer dans une foule d’interdictions, et vous-mêmes, vous vous dispensez de tout effort. Vous ne connaissez qu’un langage : l’exigence ; mais on ne vit pas la fidélité sur le compte des autres.
Reste à entendre pour nous-mêmes les griefs que Jésus formulait à l’adresse de certains croyants de son époque ; car ce qu’il visait, au-delà des deux groupes des pharisiens et des légistes, c’étaient des distorsions de l’attitude religieuse qui nous guettent encore si nous n’y prenons garde.
Même le chrétien, en effet, peut rapetisser sa foi au niveau de pratiques ou de prestations mesurables dans lesquelles il recherche sa sécurité ou une image gratifiante de lui-même. Même un ami du Christ peut être tenté de se complaire dans sa fidélité ou cesser de cheminer avec modestie. Même des hommes et des femmes de prière peuvent donner le change sur la profondeur réelle de leur vie intérieure.
Frères et sœurs, aujourd’hui encore le Seigneur attend de nous une vraie cohérence entre la prière et la vie, entre les paroles et l’engagement concret, entre notre générosité personnelle et ce que nous réclamons des autres. Aujourd’hui encore son regard nous rejoint personnellement, dénonçant nos petitesses, nos désirs de paraître, nos mensonges intérieurs et nos sévérités.
Mais pour ceux qui acceptent d’être pauvres, ce regard de Jésus est toujours miséricorde.