La mosaïque de l'abside S. Marie en Trastévère, 1140
Au cœur de la basilique Sainte-Marie en Trastevere, la mosaïque du XIIe siècle illustre avec solennité la communion mystique entre le Christ Époux et l’Église-Épouse, une figure féminine couronnée qui, selon certains, incarne aussi la Vierge Marie, symbole de l’Église triomphante et de la présence maternelle au sein du mystère divin. Cette œuvre invite à contempler la profonde union spirituelle entre le Christ et son Épouse, fondement de la foi et de la vie ecclésiale.
Vers la fin du X° siècle, au nord des Alpes, se répand un nouveau type de représentations dans lequel, somptueusement revêtue et couronnée, l’Église-épouse siège sur le même trône que le Christ Époux, comme une impératrice. Dans ces compositions, on reconnaît que l’épouse est une personnification de l’Église par sa position frontale et rigide et par la fixité de son expression.
La mosaïque absidale de S. Marie en Trastevere (Rome) fut exécutée en 1140.
Le Christ Seigneur s’assied dans l’axe de l’abside sur un grand trône qu’il partage avec l’Épouse assise à sa droite.
À la verticale de la tête du Christ, on aperçoit la Main du Père qui soutient sa couronne. L’Église Épouse, revêtue de la dalmatique impériale brodée avec des pierres précieuses, est impassible, le regard droit devant soi, elle partage le trône du Christ (synthronos) ; ayant des proportions plus petites, elle occupe une place plus petite sur le trône, de sorte que le Christ est au centre de l’abside.
Le Christ Époux exprime sa communion avec l’Église par l’étreinte de sa droite ; l’inscription sur son livre est une expression du Cantique (Ct 4,8) composée avec le premier verset du Psaume 110, traditionnellement attribué au Christ :
*« Veni electa mea et ponam in te thronum meum ». *
L’invitation du psaume à s’asseoir à la droite se transforme ainsi en invitation à partager le trône.
La référence au geste du bras se fonde aussi sur le Cantique, texte que porte l’Église Épouse :
"Sa gauche est sous ma tête et sa droite il m’étreint"
(Ct 2,6)
L’intérêt de cette mosaïque est lié à l’identité de la figure féminine : s’agit-il de l’Église Épouse ou aussi de la Vierge Marie épouse ?
Pour les uns, c’est seulement l’Église :
La datation de l’œuvre, la rigidité de la figure de l’Ecclesia comme aussi le fait qu’elle s’assoie déjà couronnée aux côtés du Christ, tout cela fait croire qu’il s’agit simplement de l’Église Épouse. Gertrud Schiller écrit :
« Alors que le couronnement est la conséquence de l’Assomption de Marie au ciel, l’Épouse Église est depuis le début déjà couronnée, c’est pourquoi le geste du couronnement n’est pas représenté. »
D’autre part, dans l’abside, les cinq scènes relatives à la vie de Marie (Naissance de Marie, Annonciation, Nativité du Christ, Épiphanie, Présentation au Temple, Assomption de la Vierge) sont postérieures d’un demi-siècle à la mosaïque du centre de l’abside, elles ne peuvent pas être un argument pour lui donner une signification mariale à l’origine. »
Pour d’autres, c’est aussi Marie :
Le fait que la basilique de S. Marie en Trastevere ait été dédiée très anciennement à la Vierge Marie amène d’autres spécialistes à croire qu’il est au contraire très probable que quand la mosaïque y fut exécutée, l’intention de reconnaître aussi la figure de Marie dans la figure de l’Église-Épouse était déjà présente.
F. Breynaert. Cf. Maria Giovanna MUZJ, La vergine Madre e la Trinità nell’iconografia cristiana, in De Trinitatis Mysterio et Maria. Acta congressus mariologici mariani internationalis in civitate Romae anno 2000 celebrati, Pont. Accademia Mariana Internationalis, città del Vaticano 2004, p. 490-498