Les âmes du Purgatoire demandent de l’aide aux vivants
Il existe à Rome, sur les quais du Tibre, non loin du Vatican, l’un des plus petits musées du monde. Celui des âmes du Purgatoire. S’il n’expose qu’une vingtaine d’objets sans valeur marchande ou artistique, chacun d’entre eux témoigne cependant de façon troublante de l’existence du Purgatoire et des appels au secours que ceux qui y languissent lancent aux vivants.
Les raisons d'y croire
- 
  
En 1893, un prêtre français, Victor Jouët, de la congrégation des missionnaires du Sacré Cœur d’Issoudun, est envoyé à Rome pour y bâtir une église dans un quartier neuf. Elle sera dédiée au Sacré Cœur. Il n’est nullement dans les intentions du Père Jouët de fonder un sanctuaire pour la délivrance des âmes du Purgatoire. Tout ce qui suivra est providentiel.
 - 
  
Une nuit de novembre 1897, alors que le gros des travaux est achevé, le feu prend dans une chapelle latérale, sans cause bien définie. Par chance, les secours arrivent à temps pour maîtriser l’incendie avant qu’il s’étende et fasse des dégâts considérables. Toutefois, les témoins, dont le Père Jouët, affirment, très frappés, avoir vu, distinctement se débattre au milieu des flammes un homme dont ils ont distingué le visage qui reflétait une souffrance et un chagrin indicibles. On ne trouvera pourtant aucune dépouille.
 - 
  
En revanche, à la stupeur générale, quand on déblaiera les décombres, l’on s’apercevra que le tableau situé au-dessus de l’autel, là où le feu se déchaînait, est intact. Il n’y a pas de cause naturelle à cela. Le père Jouët commence à envisager une intervention surnaturelle.
 - 
  
Sur le mur, apparaît, comme dessiné par la suie, un visage humain qui ressemble beaucoup, disent les témoins, à celui du mystérieux personnage de la nuit de l’incendie. Le visage exprime les mêmes terribles tourments que celui de l’homme de l’étrange apparition.
 - 
  
Comme on est au mois de novembre, traditionnellement consacré à la prière pour les morts, le Père Jouët pense qu’il peut s’agir d’une manifestation d’une âme du Purgatoire venue implorer la prière des vivants et qui a laissé une preuve de son passage. De telles manifestations sont assez fréquentes dans l’histoire de l’Église et parfois très impressionnantes. Il n’est donc pas déraisonnable d’y songer.
 - 
  
Dès lors, le prêtre se met en quête de témoignages récents du même genre et surtout de preuves tangibles de telles manifestations. Commence une enquête très longue et sérieuse au terme de laquelle il réunira, sur les cent dernières années, plusieurs centaines de récits plausibles et qui répondent à certains critères de sérieux.
 - 
  
Le père Jouët décide de s’en tenir aux traces tangibles, c’est-à-dire aux marques laissées par les défunts, notamment les traces de doigts ou de mains incandescents qui ont brûlé l’objet qu’il touchait. Le prêtre en réunit une riche collection : vêtements, livres de prières, etc. On voit imprimées dessus des traces très nettes et inexplicables.
 - 
  
Avant d’ouvrir le musée, le prêtre va demander la bénédiction de Pie X, alors régnant, qui la lui accorde volontiers mais soumet à examen les objets destinés à l’exposition afin de s’assurer de leur authenticité et ne pas prêter à rire aux anticléricaux et d’obtenir un résultat contraire à celui espéré. Le pape se montre donc prudent et avisé.
 - 
  
Au terme de cet examen critique, dix-neuf objets seront retenus, l’origine des marques de brûlure qu’ils portent, traces de mains ou de doigts en feu, ne pouvant s’expliquer de façon rationnelle. Le travail d’éradication des cas douteux a donc été fait avec sévérité.
 
En savoir plus
L’église del Sacro Cuore del Suffragio de Rome est célèbre pour deux raisons : elle est une étonnante copie miniature du duomo, la cathédrale de Milan, et elle abrite l’étonnant musée des âmes du Purgatoire qui attire chaque année des milliers de fidèles et de curieux. Ce musée est l’œuvre d’un prêtre français, le Père Jouët. Lui-même témoin d’une apparition d’une âme en peine du Purgatoire, il a voulu en prouver l’existence, en cette fin du XIXe siècle marquée par l’incroyance et par le spiritisme.
Pour bien en saisir le sens, il faut, certes, connaître l’histoire de ces objets qui ressemblent sinon à un bric-à-brac de chiffonnier. Tel livre de piété était entre les mains d’une religieuse quand elle vit lui apparaître l’une de ses anciennes compagnes, décédée depuis peu, et en quête de prières pour abréger son purgatoire ; telle chemise était celle que portait l’abbé Leleux en 1789 quand sa défunte mère, inquiète de voir ce fils dissolu se perdre, obtint de Dieu la grâce de se montrer à lui pour le convaincre de la réalité de l’éternité, ce dont le jeune homme fut si épouvanté qu’il changea de vie et devint prêtre ; etc.
Certains commentateurs modernes ricanent de ces vieux chiffons mais tous ont fait l’objet d’examens sévères et, s’ils ne convaincront pas sans doute ceux qui veulent demeurer incroyants, ils rappellent que le Purgatoire est une réalité. Les deux peines qu’y subissent les âmes le sont aussi : celle du feu qui purifie les âmes de leurs péchés afin de leur permettre de se présenter pures comme au jour de leur baptême devant Dieu, et celle du dam, bien plus douloureuse car elle est privation de la vision de Dieu entrevue par l’âme lors de son jugement particulier après la mort.
Les âmes qui se trouvent au Purgatoire ne peuvent plus rien accomplir pour leur propre salut et pour hâter leur délivrance. Il revient donc aux vivants de prier pour elle, offrir des messes et des sacrifices pour leur permettre d’entrer au plus vite dans la salle du festin des noces de l’Agneau. C’est donc à chaque chrétien de prier à l’intention de ses proches défunts mais aussi des âmes abandonnées qui n’ont personne pour le faire. Une fois dans la gloire, elles ne seront pas ingrates et vous aideront. C’est aussi un moyen d’abréger son propre purgatoire.
Spécialiste de l’histoire de l’Église, postulateur d’une cause de béatification, journaliste pour de nombreux médias catholiques, Anne Bernet est l’auteur de plus d’une quarantaine d’ouvrages, pour la plupart consacrés à la sainteté.
Aller plus loin
Le Catéchisme de l’Église catholique (CEC) traite du purgatoire du chapitre 1030 au chapitre 1032. Voir également :
- 
  
§1472–1473 : sur les peines du péché et la purification nécessaire, liée à la doctrine du purgatoire.
 - 
  
§958 : sur la communion avec les défunts et la prière pour eux.
 - 
  
§1689 : mention du purgatoire dans la liturgie des funérailles.
 
En complément
- 
  
Victor Jouët, Un petit tour par le purgatoire. Édition récente : DFT, 2023.