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La profondeur de la spiritualité chrétienne
Nº 778

Le christianisme s’impose un devoir grave de vérité

Dans un monde où la vérité est considérée comme relative ou inaccessible, il est frappant de constater que le christianisme, dès ses origines, affirme au contraire que la vérité existe, qu’elle doit être recherchée et qu’elle est connaissable. Mieux encore : il en fait une exigence morale pour chaque être humain. Cette haute vision de la vérité – et du genre humain, appelé à y accéder – donne à la proposition chrétienne une force singulière. C’est pourquoi elle mérite d’être écoutée avec attention.


Les raisons d'y croire

  • Un des motifs de crédibilité les plus centraux du christianisme – et en particulier de l’Église catholique –, c’est son insistance à propos de la vérité, et plus précisément la recherche de la vérité. Ce point va exactement à l’encontre de la préconception erronée selon laquelle l’Église voudrait que ses fidèles croient ce qu’elle enseigne sans chercher à comprendre.

  • L’un des enseignements les plus constants et fondamentaux de l’Église, et que l’on retrouve par exemple dans la déclaration Dignitatis humanae du concile Vatican II, est que « tout homme a un devoir grave de chercher la vérité », c’est-à-dire que l’homme, sous peine de faute grave, a la nécessité d’être en quête active de vérité.

  • De son côté, le Catéchisme de l’Église catholique, au numéro 2104, enseigne aussi que « tous les hommes sont tenus de chercher la vérité ».

  • Cette injonction n’est pas secondaire : elle est au cœur de l’enseignement catholique et profondément liée à sa vision positive de l’homme et de sa raison. Saint Jean-Paul II, dans son encyclique Veritatis splendor (ce qui signifie littéralement « splendeur de la vérité ») l’explique en ces termes : « L’homme est capable de vérité, il est fait pour la vérité, et il a le devoir moral de la chercher. »

  • Si l’Église est si confiante dans la capacité de l’homme à atteindre le vrai, c’est d’abord parce que Jésus lui-même a dit : « Cherchez, et vous trouverez » ( Mt 7,7 ). La confiance que l’Église accorde à la raison humaine ne repose pas sur un optimisme naïf, mais sur la nature même de l’homme. Elle repose sur une vérité fondamentale de l’anthropologie chrétienne : l’homme a été créé par Dieu et pour Dieu, pour que nous puissions l’aimer et le connaître. C’est pourquoi l’intelligence de l’homme trouve dans la vérité son repos et son terme.

  • Or, Dieu est vérité – Jésus a dit : « Je suis le chemin, la Vérité et la Vie » ( Jn 14,6 ) ; ainsi, toute quête authentique de vérité ne peut qu’aboutir à la personne du Christ et à son enseignement. Voilà pourquoi l’Église accueille favorablement toutes les questions, même les plus critiques : elle ne les redoute pas, car elle sait que toute recherche sincère, menée sans orgueil ni duplicité, peut devenir un chemin vers le Christ.

  • Ainsi, foi et raison ne s’opposent pas. Bien au contraire, elles sont complémentaires, car toutes deux viennent de Dieu. Faire grandir l’une, c’est aussi préparer le terrain pour l’autre. Saint Augustin l’exprimait déjà en disant : « Intellige ut credas et crede ut intelligas » – c’est-à-dire . « Comprends pour croire et crois pour comprendre. » Plus je comprendrai et approfondirai ma connaissance des mystères de la foi, plus ma foi grandira. Et plus ma foi grandira, plus mon intelligence s’ouvrira et s’épanouira.

  • Voilà donc un motif de crédibilité que l’on ne retrouve nulle part ailleurs, dans aucune autre religion. La foi chrétienne ne s’impose ni par la ruse ni par la force, mais elle appelle chacun à une quête honnête et humble du vrai.


En savoir plus

L’accès à la vérité ne dépend pas uniquement de nos capacités intellectuelles. Il suppose une disposition intérieure, une attitude du cœur. La vérité ne s’impose pas toujours comme une évidence brute, elle se laisse entrevoir à celui qui s’en approche avec humilité. Si Dieu ne se manifeste pas de manière évidente ou immédiate à tous, ce n’est pas tant qu’il « se cache », mais plutôt que l’orgueil humain rend aveugle. Celui qui cherche pour se justifier, pour avoir raison ou pour enfermer la vérité dans ses propres catégories ne trouvera rien. Celui, en revanche, qui cherche avec droiture, sans préjugés, en acceptant d’être enseigné, recevra la lumière.

L’Église insiste sur ce lien essentiel entre vérité et humilité. Il ne s’agit pas de nier l’intelligence, mais de reconnaître que la vérité n’est pas notre propriété. Elle nous précède, elle nous dépasse, elle nous appelle. L’humilité intellectuelle, c’est précisément cela : la conscience que l’intelligence humaine, si belle et si noble soit-elle, ne peut porter du fruit que si elle accepte de recevoir, ce qui peut s’avérer difficile. Chercher la vérité, c’est se mettre dans une disposition d’accueil, d’ouverture.

Voilà pourquoi la foi chrétienne n’est pas une croyance aveugle. La foi, dit saint Thomas d’Aquin, est un acte de l’intelligence, mû par une volonté droite, sous l’action de la grâce. Cela signifie que croire, c’est à la fois comprendre et consentir. C’est un acte libre et rationnel, mais orienté par une disposition intérieure qui reconnaît ses propres limites, et qui accueille ce que Dieu veut révéler. La foi n’est pas la défaite de la raison : elle en est l’accomplissement.

Loin d’opposer foi et intelligence, le christianisme affirme leur profonde complémentarité. Dieu, qui est la source de toute vérité, a créé l’homme capable de le connaître. Voilà pourquoi l’Église accueille favorablement toutes les questions, même les plus critiques : elle ne les redoute pas, car elle sait que toute recherche sincère, menée sans orgueil ni duplicité, peut devenir un chemin vers le Christ. La tradition chrétienne regorge d’exemples de chercheurs honnêtes qui, partis de loin, ont trouvé la foi en cherchant simplement à comprendre le monde et leur propre existence.

Mais cette démarche ne peut être purement technique. Elle exige une honnêteté fondamentale, une liberté intérieure, une bonne volonté. La vérité ne se découvre ni par hasard ni par simple curiosité : elle se révèle à ceux qui la cherchent avec le désir de s’y conformer. C’est pourquoi la foi ne s’impose jamais, mais appelle chacun à une réponse libre et personnelle.

Au fond, la parole du Christ « cherchez, et vous trouverez » n’est pas seulement une promesse, elle est un enseignement. Elle nous révèle que la quête de la vérité est au cœur de la vie spirituelle, car l’homme est non seulement capax veritatiscapable de vérité –, mais aussi profondément orienté vers elle. Voilà ce qui fonde la confiance paisible que l’Église place dans la capacité de tout homme à rencontrer Dieu, qui est Vérité. Et cette quête, lorsqu’elle est authentique, finit toujours par rencontrer un visage, un nom, une voix : celle de Jésus-Christ, la Vérité faite chair.

Antoine de Montalivet a étudié la philosophie et la théologie au séminaire diocésain de Fréjus-Toulon.


Aller plus loin

Catéchisme de l’Église catholique : chapitres 2104, 2105, 2106, 2108, 2467.


En complément

  • La déclaration Dignitatis humanae du concile Vatican II.

  • L’encyclique Veritatis splendor de saint Jean-Paul II.

  • Les nombreux récits et témoignages de conversion collationnés par 1 000 raisons de croire illustrent le propos de cet article.

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