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Les anges et leurs manifestations
La Courneuve (Île-de-France, France)
Nº 760
1853 – 1931

L’œuvre discrète d’un ange gardien pour le salut d’une âme

Le père Lamy , curé de La Courneuve en banlieue parisienne entre 1900 et 1923, est un familier du monde angélique depuis son enfance. Pour lui, le voile qui nous sépare de l’univers invisible est transparent. Cette familiarité extraordinaire, qu’il n’aime pas trop avouer, a de nombreux avantages dont, en maintes occasions, bénéficie son ministère pastoral. Si certaines de ces interventions sont spectaculaires, il en est aussi de plus discrètes, mais néanmoins très efficaces, comme le jour où un ange gardien désireux de procurer les derniers sacrements à un pécheur repentant trouva le moyen, mine de rien, de lui envoyer le père Lamy.


Les raisons d'y croire

  • Jean-Édouard Lamy a raconté lui-même cette anecdote au comte Paul Biver, son ami et biographe ; elle nous vient donc directement de la source.

  • Un matin, le père Lamy est appelé pour l’un de ses paroissiens. Alité, ce dernier fait part au prêtre de son désir de recevoir le sacrement des malades. Le prêtre, qui n’a pas pris le nécessaire, dit qu’il va retourner chercher les saintes huiles à l’église et qu’il reviendra d’ici à une heure, mais la femme du malade doit se rendre au marché. Elle annonce alors que, son mari ne pouvant se lever et elle devant s’absenter, elle se contentera de tirer la porte d’entrée sans la fermer tout de bon ; le père Lamy n’aura qu’à la pousser pour entrer, quand il reviendra. Il s’agit là de banals détails et arrangements du quotidien. Ce récit détaillé et prosaïque, dénué de tout aspect étonnant, plaide en faveur de sa crédibilité.

  • Une heure plus tard, de retour, le père Lamy ne se souvient plus de l’étage où habite son paroissien ; il décide donc de se fier au détail de la porte entrouverte afin de s’y retrouver. Il est en effet improbable que deux ménagères soient sorties sans fermer leur porte d’entrée, l’insécurité étant déjà présente. Ce n’est qu’en arrivant dans la chambre qu’il comprend son erreur : il ne connaît pas du tout l’homme alité, et manifestement bien plus malade que son pieux voisin du dessus. Il va repartir en s’excusant quand le malheureux le supplie de rester, disant que c’est le Ciel qui l’envoie. S’agissant du père Lamy, c’est vraisemblable.

  • L’homme est un libre penseur qui a toujours professé des idées avancées, un violent anticléricalisme et crié sa haine des « bondieuseries », mais, comprenant que son heure est venue, cet athée supposé a changé d’attitude et décidé de mettre ses affaires en ordre en se réconciliant avec Dieu avant qu’il ne soit trop tard. Il a alors demandé à son épouse d’appeler un prêtre ; malheureusement pour lui, sa femme, qui partage ses convictions, a refusé, lui disant, péremptoire, que, s’il a vécu sans la religion, il peut mourir sans elle. C’est un point de vue que son mari, persuadé de finir en enfer s’il ne se confesse pas, ne partage plus… Il la supplie, en vain.

  • Comprenant que sa femme le laissera mourir sans secours spirituel, l’homme, qui garde des souvenirs de son éducation chrétienne, se souvient de son ange gardien et l’appelle au secours du fond de son désespoir. Il est a priori matériellement improbable que son désir devienne réalité et qu’il réussisse à voir un prêtre dans le peu de temps qui lui reste à vivre, cloué au lit comme il est.

  • Pourtant, à peine a-t-il lancé ce cri de panique vers Dieu que son ange gardien, qui n’attendait que cela, intervient : il envoie chercher le curé pour le voisin et s’arrange pour que sa revêche épouse parte faire des courses en oubliant de fermer la porte, puis pour que le prêtre se trompe d’étage, permettant ainsi à l’homme de se réconcilier avec Dieu. La probabilité que cela se passe ainsi sans une intervention céleste est infinitésimale : ce serait une coïncidence énorme !

  • Cette anecdote n’a rien de spectaculaire. C’est sans doute d’ailleurs la raison pour laquelle le père Lamy, qui n’aimait pas le sensationnel, a choisi de rapporter cette histoire. Cependant, lui qui sait voir l’important ne se trompe pas sur l’origine de sa confusion, qu’il ne faut pas imputer au hasard, à sa mauvaise vue ou à son âge…


En savoir plus

C’est une idée fausse de penser que notre ange gardien est là pour nous épargner toutes les peines et tous les dangers de l’existence. Si Dieu nous le donne, en effet, pour nous protéger aussi des dangers matériels, il est là d’abord pour nous éviter de pécher et de perdre l’amitié avec Dieu. La première mission de l’ange gardien est de nous ramener sains et saufs à la Maison du Père pour assurer notre salut et notre éternité bienheureuse. C’est là son rôle essentiel et il fera l’impossible pour y parvenir, même s’il essaie, le plus souvent, de le faire incognito. Il faut des saints comme le père Lamy pour savoir discerner sa discrète et efficace intervention dans notre vie quotidienne.

L’histoire véridique rapportée ici est la démonstration que même le pire des pécheurs n’est jamais abandonné par son ange gardien, et qu’il lui suffit de l’appeler à l’aide pour le voir intervenir s’il en va de son salut éternel. Et cette certitude est valable pour chacun d’entre nous : nous ne sommes jamais seuls ni abandonnés. À nous de nous en souvenir !

Spécialiste de l’histoire de l’Église, postulateur d’une cause de béatification, journaliste pour de nombreux médias catholiques, Anne Bernet est l’auteur de plus d’une quarantaine d’ouvrages, pour la plupart consacrés à la sainteté.


Aller plus loin

Anne Bernet, Enquête sur les anges, réédition Artège, 2022.


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