Méconnu en France, le père Patrick Peyton a pourtant touché de son vivant un auditoire qu’on estime à plus de vingt-huit millions de personnes, grâce à une stratégie de communication de masse complètement novatrice. Immigré irlandais d’origine très humble devenu prêtre aux États-Unis dans les années 1930, celui qu’on a appelé le « prêtre du rosaire » a fait de la prière en famille la mission de sa vie, en créant la Croisade du rosaire en famille. Pionnier de l’évangélisation par les médias, il a côtoyé les plus grandes stars d’Hollywood tout en restant toujours le prêtre humble et dévoué qu’il était. Mort le 3 juin 1992, il a été déclaré vénérable par le pape François en 2017, et son procès en béatification est ouvert.

• Patrick Peyton est atteint d’une forme grave de tuberculose. En 1938 aux États-Unis, les médecins le pensent condamné. C’est alors qu’il prie intensément et avec foi la Vierge Marie, à qui il attribue ce qui suit : sa guérison inexplicable, soudaine et complète. Ce moment est un tournant spirituel majeur dans sa vie : il se sent appelé par Dieu à faire connaître la puissance de la prière, en particulier celle du rosaire. Cette guérison a priori totalement impossible est le socle de sa foi inébranlable, qui a marqué tous ceux qui ont croisé sa route.

• Le père Peyton est un témoignage vivant de ce que Dieu peut accomplir dans une vie qui lui est consacrée, à partir de presque rien au départ : un simple prêtre a rassemblé plus de monde que bien des puissants, non pas par lui-même, mais parce qu’il s’est laissé conduire par Dieu. Issu d’un milieu modeste, sans réseau d’influence particulier ni grands moyens financiers, sans aucune formation à la communication, il a agi comme un génie du marketing, mobilisant des milliers de personnes à travers le monde, utilisant la radio, la télévision et le cinéma pour l’évangélisation (en particulier à Hollywood), organisant des rassemblements de prière de masse (jusqu’à deux millions de personnes)… On peut clairement y voir un signe de la puissance de Dieu qui agit grâce à la foi et à travers la petitesse.

• L’un des épisodes les plus marquants liés à l’influence spirituelle du père Peyton se déroule aux Philippines en 1986, lors de la célèbre « révolution du rosaire ». Un an plus tôt, en 1985, le père Peyton avait rassemblé près de deux millions de personnes à Manille pour prier le chapelet en public. Cet événement marial, d’une ampleur exceptionnelle, avait profondément marqué le pays. En février 1986, face au régime dictatorial de Ferdinand Marcos, des millions de Philippins descendent pacifiquement dans les rues, chapelet en main. Les soldats reçoivent l’ordre de tirer, mais refusent. Le soulèvement, qui a toutes les chances de finir en bain de sang, se déroule miraculeusement sans violence. Les manifestants attribuent cette paix à l’intervention de la Vierge Marie, invoquée à travers la prière du rosaire. L’Église philippine a reconnu l’importance décisive de la foi et de la prière dans le renversement pacifique du régime. Cet événement donne un écho mondial au message central du père Peyton : la prière du rosaire, unie, humble et confiante, peut changer les cœurs et la destinée d’un pays.

• Le plus impressionnant dans la vie du père Peyton est sans doute la foi profonde, paisible, joyeuse et tournée vers les autres dont il rayonnait. Malgré un rythme de vie harassant et la fréquentation des grands noms du cinéma, il a consacré toute sa vie à servir, sans rechercher la gloire personnelle. Comme en a témoigné un de ses proches au sujet de sa fréquentation des stars : « Il ne changeait pas, eux si. » Il se surnommait humblement « l’âne de Marie », pauvre bête transportant un trésor.

Patrick Peyton naît en 1909 en Irlande, dans une famille paysanne pauvre. Il est le sixième de sa fratrie. Sa famille, profondément catholique, se rassemble chaque soir pour prier le rosaire : cette pratique marquera durablement Patrick. À dix-neuf ans, il émigre avec son frère Thomas aux États-Unis, espérant y trouver un travail. Grâce à un modeste emploi de sacristain dans une cathédrale, il décide de suivre l’appel au sacerdoce, reçu dès l’adolescence. Il entre alors dans la communauté de la Sainte-Croix.

En 1939, alors qu’il est encore séminariste, Patrick est atteint d’une tuberculose pulmonaire avancée qui ne laisse aucun espoir. Allongé sur son lit d’hôpital, il se tourne alors avec ferveur vers la Vierge Marie. Il lui confie sa guérison, priant le rosaire avec une foi ardente. Contre toute attente médicale, il guérit entièrement. Pour lui, c’est un miracle, un signe clair que Marie l’a sauvé. Ce moment est le tournant de sa vie : il comprend que sa mission sera de faire connaître au monde entier la puissance de la prière du rosaire, en particulier dans la cellule fondamentale de la société : la famille.

Ordonné prêtre en 1941, il se consacre totalement à cette mission. En 1942, convaincu que « la famille qui prie ensemble reste unie », il lance la Croisade du rosaire en famille, qui invite les familles à prier ensemble. Son message, simple mais puissant, trouve un écho considérable. Avec l’aide d’amis et de bienfaiteurs, il commence à utiliser les médias modernes : radio, télévision, puis cinéma. Il collabore avec de nombreuses stars hollywoodiennes (comme Bing Crosby, Jimmy Stewart ou Grace Kelly), qui acceptent de prêter leur voix ou leur image pour promouvoir la prière familiale.

Dans les années 1950 à 1980, le père Peyton organise des rassemblements de prière monumentaux dans le monde entier : en Irlande, en Amérique latine, en Afrique, en Asie. Jusqu’à deux millions de personnes se réunissent pour prier le chapelet. Toujours souriant, humble et habité par une foi simple, il parcourt le monde sans relâche, rappelant que Dieu agit puissamment à travers la Vierge Marie et la prière du rosaire.

Le père Peyton meurt en 1992 aux États-Unis, à l’âge de quatre-vingt-trois ans. Son œuvre a touché des dizaines de millions de familles et perdure aujourd’hui à travers la Fondation du rosaire en famille. En 2017, le pape François le déclare vénérable, reconnaissant l’héroïcité de ses vertus.

La foi du père Peyton est d’abord l’héritage de ses parents, car c’est d’eux qu’il l’a reçue enfant. Les Peyton priaient en famille, et il en a souvent témoigné. Quand son père l’a autorisé à partir aux États-Unis, il lui a demandé de s’agenouiller devant l’image du Sacré Cœur, vénérée dans leur maison, et lui a fait promettre de « rester fidèle à Notre Seigneur en Amérique ». C’est dans cette bonne terre que la semence divine a pu germer.

Sophie Stevenson, normalienne diplômée en histoire.

Le père Peyton a fondé la Croisade du rosaire en familleet a parcouru le monde entier pour prêcher ce message simple mais profond : « La famille qui prie ensemble reste unie. » Ce slogan, devenu célèbre, n’était pas une simple phrase : c’était une foi vécue, enracinée dans la conviction que Dieu agit dans la simplicité des foyers. Son ministère a touché des millions de foyers et a profondément renouvelé la vie spirituelle de nombreuses familles, dans des contextes culturels très divers. C’est uniquement dans sa foi qu’il a pu puiser l’énergie inébranlable qui a soutenu toutes les années de son ministère.