
Le crucifix deux fois miraculeux de l’église Saint-Marcel (1519)
Située sur la Piazza di San Marcello, à Rome, à côté de la via del Corso, l’église de San Marcello, administrée par les Servites de Marie depuis 1369, est ravagée par un incendie dans la nuit du 22 au 23 mai 1519. Seuls les murs d’enceinte sont épargnés, ainsi qu’un crucifix en bois du XIVe siècle, qui est miraculeusement sauvé des flammes. Il est retrouvé intact au-dessus de la lampe d’autel, allumée. Trois ans plus tard, une épidémie de peste frappe la ville. Entre le 4 et le 20 août, le crucifix est porté en procession à travers les rues ; le 20, l’épidémie a totalement disparu, après avoir progressivement décliné à mesure que le crucifix visitait chaque paroisse romaine. Outre les deux miracles initiaux au début du XVIe siècle, parfaitement documentés sur le plan historique, il est évident que le crucifix de Saint-Marcel demeure une œuvre particulièrement aimée des croyants romains, et de bien au-delà.
Les raisons d'y croire
La chaleur de l’incendie du 22 mai 1519 est d’une telle puissance qu’il réduit en cendres portes, escalier, meubles, vitraux et objets liturgiques. Sur le plan scientifique, il est inconcevable qu’un crucifix en bois ait pu résister aux flammes. La présence de la petite chandelle à ses côtés est, elle aussi, mystérieuse.
Le crucifix est retrouvé au milieu des décombres fumants, alors que les dernières flammes brûlent encore. Il ne fait aucun doute que le crucifix était bien présent pendant l’incendie.
Quelques mois après le miracle, et en raison de celui-ci, une archiconfrérie du Saint-Crucifix est fondée dans la paroisse. Celle-ci compte des centaines de membres et existe toujours.
Deux papes ont reconnu les statuts de l’archiconfrérie, et la dévotion à ce saint crucifix est encouragée par l’Église catholique.
La disparition de la peste en août 1522 ne peut avoir de cause naturelle. La procession de foi passe à travers tous les quartiers de Rome, et tout le peuple de Rome y participe : on pourrait penser qu’un tel rassemblement favorise la transmission interhumaine de la peste. Pourtant, la décroissance de la maladie épouse le trajet de la procession : pendant dix-huit jours, là où il est acheminé, la peste disparaît. C’est pourquoi chaque quartier essaye de garder le crucifix le plus longtemps possible.
Il est manifeste que cette procession est un succès, puisque ce geste de foi sera répété par la suite dans des périodes de difficultés, principalement d’épidémies, en suivant le parcours initial, à travers la ville de Rome, de l’église Saint-Marcel à la basilique Saint-Pierre.
La magnificence, la beauté et l’extraordinaire qualité esthétique de l’église, qui remplace au XVIe siècle l’ancien édifice, prouvent l’immense attachement des Romains au crucifix doublement miraculeux. De magnifiques fresques y racontent l’histoire du saint crucifix.
En savoir plus
Le 22 mai 1519, un incendie terrible dévaste l’église romaine de Saint-Marcel. Seuls les murs de l’édifice résistent aux flammes et, de manière inexplicable, un crucifix en bois de peuplier, doré et coloré, datant probablement de la seconde moitié du XIVe siècle, dont certains traits évoquent le célèbre crucifix de San Lorenzo in Damaso, auquel sainte Brigitte de Suède était personnellement dévouée. Le crucifix est retrouvé debout, totalement intact, à sa place, au-dessus de l’autel principal, dans l’abside. Il n’y a aucune explication possible : Dieu est intervenu. Les flammes et la chaleur ont dévoré l’ensemble du mobilier liturgique, hormis cet objet fait en bois !
Avec le soutien des autorités ecclésiastiques, un groupe de prière est constitué dans la paroisse, dont le nombre de membres grossit considérablement, jusqu’à fonder une compagnie du Saint-Crucifix, devenu au XVIe siècle une archiconfrérie, qui existe encore aujourd’hui, et dont les statuts ont été reconnus par le pape Clément VII en 1526, puis confirmés par le pape Jules III en 1550. Cette confrérie a obtenu le patronage de la quatrième chapelle, à droite de la nouvelle église de San Marcello al Corso, où est conservé précisément le crucifix miraculeux.
En 1522, une épidémie de peste atteint la Ville éternelle et le Latium. Les morts se comptent par milliers. Les Servites de Marie, qui administrent la paroisse Saint-Marcel depuis 1369, portent le crucifix en procession jusqu’à Saint-Pierre. Craignant la contagion, les autorités municipales tentent d’abord d’empêcher la procession, puis, étrangement, elles changent d’avis. Du 4 au 20 août 1522, le crucifix est porté à travers la ville, sous les acclamations des habitants. Le dernier jour, lorsque le crucifix est remis à sa place dans l’église Saint-Marcel, l’épidémie cesse définitivement. Depuis, chaque Jeudi saint, l’objet est porté en procession par le clergé et les fidèles. On organise aussi des processions lors des épisodes difficiles.
Une collecte de fonds est lancée pour la reconstruction du bâtiment. L’église est décorée par les meilleurs artistes du temps, comme Perino del Vaga, entre 1525 et 1527, qui réalise des fresques restées inachevées. En 1562, la confrérie décide de la construction d’un nouvel oratoire et en confie le chantier à l’architecte Giacomo della Porta. Les travaux sont financés par les cardinaux Ranuccio et Alexandre Farnese ; ils prennent fin en 1568.
En 1650, on décide que le crucifix devra être apporté à Saint-Pierre de Rome chaque année sainte. Sa procession est attestée lors des jubilés de 1675 et de 1933-1934. En l’an 2000, pendant le carême du Grand Jubilé, il est exposé sur l’autel de la Confession, à Saint-Pierre, et embrassé par le pape Jean-Paul II à l’occasion de la Journée du pardon. Le 15 mars 2020, après s’être rendu à pied jusqu’à l’église Saint-Marcel, le pape François a prié devant le crucifix, puis, le 27 mars suivant, celui-ci a été acheminé dans la basilique Saint-Pierre, sans procession, en raison du confinement lié à la pandémie de Covid-19. Le pape François l’a fait placer devant l’entrée de la basilique afin d’implorer la guérison des nombreux malades du Covid-19 et la fin de la pandémie.
Patrick Sbalchiero, membre de l’Observatoire international des apparitions et des phénomènes mystiques.
Au delà
Au-delà de l’aspect miraculeux, il s’agit d’une œuvre d’art qui, dans la pure tradition artistique de la fin du Moyen Âge, exprime de façon superbe les souffrances de Jésus crucifié.
Aller plus loin
Jean Delumeau, « Une confrérie romaine au XVIe siècle : l’Arciconfraternita del SSm0 Crocefisso in S. Marcello », article paru dans Mélanges de l’école française de Rome, 1951, numéro 63, p. 281-306. Peut être consulté en ligne .
En complément
Giuseppe Fiocco, « La cappella del Crocifisso in San Marcello », dans Bollettino d’Arte, numéro 3, 1913.
L’article du site Internet Finestre sull’Arte : « Toute l’histoire dévotionnelle et artistique du crucifix miraculeux de San Marcello al Corso ».
Le court documentaire de EWTN, en anglais : « Rome’s Hidden Church : Saint Marcellus ».
L’article de Wikipédia : « Église San Marcello al Corso ».