
La bienheureuse Marguerite Bays sauve une enfant (1998)
Le 6 mars 1998, Virginie, âgée de vingt-deux mois, tombe du tracteur conduit par son grand-père, Norbert Baudois, et passe sous l’énorme roue de l’engin. Elle gît dans la boue, inerte, sans un souffle de vie, la marque du pneu visible sur ses vêtements. Quelques secondes plus tard, tandis que son grand-père la porte dans ses bras, la fillette se met à pleurer, comme si de rien n’était. L’homme parle immédiatement d’un miracle dû à l’intercession de la bienheureuse Marguerite Bays, laïque suisse qui a vécu à proximité de la famille de la miraculée. Transportée à l’hôpital, Virginie est jugée indemne.
Les raisons d'y croire
La dévotion de la famille de Virginie pour Marguerite Bays ne date pas d’hier. L’agriculteur suisse et sa femme, Yvonne, ont l’habitude de prier Marguerite Bays chaque soir. Ils connaissent bien la mystique suisse car ils vivent à un kilomètre et demi du lieu où Marguerite Bays a vécu toute sa vie, de 1815 à 1879. C’est donc vers elle, et seulement elle, que se tourne Norbert au moment de l’accident. Lorsque sa petite fille, qui était inerte quelques instants plus tôt, recommence à bouger et à pleurer, Norbert Baudois remercie immédiatement Marguerite Bays à haute voix.
Si l’on prend pour hypothèse le fait que le tracteur de Norbert n’était qu’un engin de catégorie moyenne, on convient que celui-ci pesait environ deux tonnes et demie ; Virginie, quant à elle, ne dépassait guère dix ou onze kilos. Il est impossible qu’elle ait pu survivre, car la grosse roue arrière a roulé sur toute la longueur de son corps, y compris la tête.
La violence de l’accident ne pouvait laisser aucune chance à l’enfant : elle est écrasée entièrement, tête comprise. Or, Virginie n’a ni blessure ni fracture. Les organes internes et le squelette sont indemnes. La fillette est restée trois jours en observation à l’hôpital. Aucun médecin n’a relevé la moindre séquelle de l’accident.
Le jour même de l’accident, en retournant sur les lieux, « on voyait les traces de la roue sur le sol, puis plus rien sur quatre-vingts centimètres, et les traces qui continuaient après. »
Le grand-père n’est pas le seul à avoir témoigné de cette affaire. La sœur de Virginie a aussi raconté sa version malgré son jeune âge (huit ans), ainsi que son beau-frère, qui l’a conduite à l’hôpital, et sa maman qui est rentrée dès que possible en catastrophe.
Le tracteur a fait l’objet d’une analyse : « Tout est passé au peigne fin : la plate-forme, la hauteur et la largeur des roues. Même la largeur entre les crampons des pneus pour s’assurer qu’elle n’était pas passée entre les crampons. »
Un premier miracle par l’intercession de Marguerite Bays avait eu lieu en 1940 : un jeune alpiniste avait survécu de manière inexplicable à un accident de montagne à la Dent de Lys (Suisse) tandis que tous ses compagnons étaient portés disparus. L’intercession a été reconnue cinquante-trois ans plus tard. Le miracle dont a bénéficié la famille Baudois est donc le second ; il a ouvert la voie à la canonisation de Marguerite Bays.
Marguerite Bays a été béatifiée le 29 octobre 1995 par saint Jean-Paul II, puis élevée sur les autels par le pape François le dimanche 13 octobre 2019, soit cent quarante ans plus tard, laps de temps nécessaire à l’analyse extrêmement rigoureuse des deux miracles accomplis par l’intercession de Marguerite Bays.
Un premier procès en béatification avait été ouvert en 1927, mais, faute d’une documentation suffisante – on pointa alors du doigt le manque de preuves concernant les miracles de Marguerite –, l’Église l’abandonna. Cela souligne l’exigence du processus mis en place par l’Église catholique . Le procès en béatification de Marguerite Bays fut repris en 1953 avec, cette fois, toutes les conditions nécessaires exigées par les autorités ecclésiastiques.
Marguerite Bays a elle-même bénéficié d’une guérison inexpliquée : son cancer a disparu le jour même de la proclamation par le pape Pie IX du dogme de l’Immaculée Conception.
En savoir plus
Née dans une modeste famille d’agriculteurs à La Pierra, dans la campagne de Siviriez, à Fribourg (Suisse), Marguerite Bays se sanctifie d’abord dans sa propre famille, affrontant avec patience et bonté les contradictions et les tensions des siens.
Elle devient couturière. Désirant offrir sa vie pour le Christ, elle entre dans le tiers ordre franciscain. Jour après jour, elle réalise un apostolat de la charité sans pareil dans son milieu social. En effet, chaque jour, Marguerite puise dans la prière et l’eucharistie la force de l’attention et de l’amour portés en faveur des plus pauvres, des orphelins, des enfants illégitimes, etc. On la rencontre à l’église de son village ou à l’abbaye cistercienne de la Fille-Dieu, où elle passe de longs moments en oraison. Jésus, Marie et saint François d’Assise sont ses modèles absolus.
Peu à peu, elle étend son champ d’intervention en donnant des cours de catéchisme et en conseillant celles et ceux qui frappent à sa porte. Sa sainteté est celle de la « porte d’à côté », comme l’a souligné le pape François. L’humble couturière de Siviriez est un modèle de sainteté contemporaine, celle d’une femme du peuple semblable à toutes mais dont la foi est capable de déplacer les montagnes : une sainte populaire.
Marguerite a une vie mystique d’une rare intensité. On vient à elle de partout, parfois depuis l’étranger, afin de bénéficier de ses charismes extraordinaires : connaissance, discernement, prophétie. À partir de 1854, elle revit la Passion chaque vendredi et porte désormais les stigmates du Christ. Ces marques traduisent une union avec Jésus extrêmement forte.
L’événement tragique qui débouche sur le miracle remonte au 6 mars 1998. Avec l’aide de ses petits-enfants, Norbert Baudois, citoyen helvétique de la région de Fribourg, retire les barrières pare-neige autour du domaine familial. Virginie, vingt-deux mois, et sa sœur âgée de huit ans, sont assises sur le tracteur. Subitement, la petite perd l’équilibre et chute. Le grand-père ne peut stopper l’engin. La grosse roue écrase l’enfant sur toute sa longueur, « tête comprise ». Lorsque Norbert prend sa petite-fille dans les bras, celle-ci est inerte et ne montre plus aucun signe de vie. Mais, quelques secondes plus tard, Virginie commence à pleurer bruyamment ! Sainte et sauve, elle a été préservée miraculeusement. Aussitôt, Norbert remercie Marguerite Bays à haute voix.
« Elle devait être écrabouillée, morte. Cela ne pouvait pas être autre chose qu’un miracle », affirme-t-il. En effet, cela en est un. Depuis bien des années, l’agriculteur et son épouse Yvonne prient chaque soir Marguerite Bays. On transporte immédiatement Virginie à l’hôpital de Billens et on prévient ses parents qui, ce jour-là, sont au Salon de l’agriculture à Paris. Norbert est convoqué à l’hôpital car les médecins refusent de croire à cette histoire. Éliane Baudois, la mère de Virginie, rentre le lendemain en TGV. Celle-ci s’effondre en larmes lorsqu’on lui montre l’habit de sa fille, sur lequel on voit clairement les traces de roue du tracteur.
L’hôpital de Billens est en ébullition : les analyses ont révélé que Virginie ne souffre d’aucun traumatisme ; ni les organes internes ni le squelette ne sont touchés. Seuls quelques bleus sans importance causés par la chute sont visibles. Virginie est gardée trois jours en observation, au terme desquels les médecins hospitaliers sont forcés d’admettre que l’horrible accident n’a laissé ni séquelle ni handicap.
Patrick Sbalchiero, membre de l’Observatoire international des apparitions et des phénomènes mystiques.
Au delà
Sainte des familles et des gens de condition modeste, Marguerite Bays, gratifiée d’expériences mystiques qu’elle cachait au plus grand nombre, intercède auprès de Dieu depuis le Ciel comme elle secourait ici-bas les gens autour d’elle : discrètement, sans faire de bruit, mais toujours avec la plus grande efficacité.
La sainteté de cette petite couturière fribourgeoise du XIXe siècle, dont la vie a été plus que discrète, a été reconnue officiellement le 13 octobre 2019. La bienheureuse de Siviriez deviendra la première sainte du canton de Fribourg et la première femme laïque suisse de l’histoire à être canonisée.
Aller plus loin
Un site Internet est dédié à Marguerite Bays . On y trouve entre autres les informations relatives au miracle qui concerne Virginie Baudois.
En complément
Claude Morel, Mieux connaître la bienheureuse Marguerite Bays, Fribourg, Éditions Saint-Paul, 2005.
Martial Python, La Vie mystique de Marguerite Bays, stigmatisée suisse, Les-Plans-sur-Bex, Parole et Silence, 2011.
Un documentaire sur Marguerite Bays, produit par la RTS en 2019, a été réalisé par Pierre-Olivier Volet et Bertrand Theubet.