
L’apparition du Christ ressuscité à la Vierge Marie : un thème iconographique enraciné dans la tradition
Afin de célébrer la fête du Christ ressuscité à Pâques en compagnie de la Vierge Marie, nous avons choisi de traiter d’un événement que la tradition de l’Église rapporte, même si les évangiles n'en parlent pas : l’apparition du Christ ressuscité à sa mère.
La tradition chrétienne, en Orient comme en Occident, identifie clairement une apparition du Christ à sa Mère, même si rien ne se trouve dans les évangiles canoniques. La mystique Anne-Catherine Emmerich mentionne cet événement dans le chapitre LXV intitulé « Résurrection du Seigneur » de La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ. Sainte Thérèse d’Avila (1515-1582) confirme également cette tradition dans ses Relations spirituelles :
« Jésus me dit qu’étant ressuscité, il était allé voir Notre Dame, parce qu’elle en avait grand besoin : la peine qu’elle avait la tenait toute absorbée et transpercée, qu’elle ne rentrait pas encore en elle-même pour jouir de cette joie [de la foi] ; et qu’il était resté longtemps avec elle, parce que c’était nécessaire pour la consoler. »
Cette apparition du Christ à sa mère expliquerait la raison pour laquelle les femmes ne voient pas d’abord le Christ ressuscité. Les anges leur disent que Jésus est vivant, et leur posent la question de foi : pourquoi chercher parmi les morts Celui qui est vivant ? (Lc 24, 1-5) Il est doux de penser que le Christ a pris le temps d’aller lui-même consoler sa propre mère de la douleur qu’elle avait éprouvée lors de sa Passion.
L’apparition de Jésus ressuscité à sa mère du Guerchin
Le thème iconographique de l’apparition de Jésus ressuscité à sa mère apparaît dès l’art paléochrétien, et va se développer au fil du temps. Le tableau du Guerchin du XVIIe s., que nous présentons ci-dessus, nous offre une vision baroque, hautement expressive, de l’événement : dans la lignée de Caravage, le peintre italien Guercino (Le Guerchin) utilise en effet le procédé du clair-obscur, d’une grande puissance expressive. Ainsi, le Christ apparaît à sa mère dans la pleine lumière d’une chair brillante, transfigurée, et la Vierge Marie, prosternée à ses pieds, tend les bras vers lui jusqu’à le toucher, et nous montrer le côté droit ouvert du Christ, stigmates de sa Passion. Le Christ pose également son bras gauche sur l’épaule de sa mère, en un geste de tendresse filiale qui associe pleinement sa mère à la Résurrection. De sa main droite, il tient l’étendard de la victoire sur la mort, symbole utilisé traditionnellement pour représenter le Christ ressuscité. Tout le travail du mouvement des plis et des drapés, caractéristique du style baroque, confère à la scène une vie particulière, jouant sur les effets d’ombre et de lumière, de creux et de pleins dans les plis des vêtements, ainsi que sur l’opposition entre l’envol et ce qui pèse : ainsi, l’étendard déployé, flottant dans l’air, signifie cette victoire sur la mort, sur la pesanteur et sur l’immobilité.