
Première lecture
Bien-aimés, tel est le message que vous avez entendu depuis le commencement : aimons-nous les uns les autres. Ne soyons pas comme Caïn : il appartenait au Mauvais et il égorgea son frère. Et pourquoi l’a-t-il égorgé ? Parce que ses œuvres étaient mauvaises : au contraire, celles de son frère étaient justes. Ne soyez pas étonnés, frères, si le monde a de la haine contre vous. Nous, nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie, parce que nous aimons nos frères. Celui qui n’aime pas demeure dans la mort. Quiconque a de la haine contre son frère est un meurtrier, et vous savez que pas un meurtrier n’a la vie éternelle demeurant en lui. Voici comment nous avons reconnu l’amour : lui, Jésus, a donné sa vie pour nous. Nous aussi, nous devons donner notre vie pour nos frères. Celui qui a de quoi vivre en ce monde, s’il voit son frère dans le besoin sans faire preuve de compassion, comment l’amour de Dieu pourrait-il demeurer en lui ? Petits enfants, n’aimons pas en paroles ni par des discours, mais par des actes et en vérité. Voilà comment nous reconnaîtrons que nous appartenons à la vérité, et devant Dieu nous apaiserons notre cœur ; car si notre cœur nous accuse, Dieu est plus grand que notre cœur, et il connaît toutes choses.
Bien-aimés, si notre cœur ne nous accuse pas, nous avons de l’assurance devant Dieu.
Psaume
Acclamez le Seigneur, terre entière !
Acclamez le Seigneur, terre entière, servez le Seigneur dans l’allégresse, venez à lui avec des chants de joie !
Reconnaissez que le Seigneur est Dieu : il nous a faits, et nous sommes à lui, nous, son peuple, son troupeau.
Venez dans sa maison lui rendre grâce, dans sa demeure chanter ses louanges ; rendez-lui grâce et bénissez son nom !
Oui, le Seigneur est bon, éternel est son amour, sa fidélité demeure d’âge en âge.
Évangile
Alléluia, Alléluia.
Aujourd’hui la lumière a brillé sur la terre. Peuples de l’univers, entrez dans la clarté de Dieu. Venez tous adorer le Seigneur !
Alléluia.
En ce temps-là, Jésus décida de partir pour la Galilée. Il trouve Philippe, et lui dit : « Suis-moi. » Philippe était de Bethsaïde, le village d’André et de Pierre. Philippe trouve Nathanaël et lui dit : « Celui dont il est écrit dans la loi de Moïse et chez les Prophètes, nous l’avons trouvé : c’est Jésus fils de Joseph, de Nazareth. » Nathanaël répliqua : « De Nazareth peut-il sortir quelque chose de bon ? » Philippe répond : « Viens, et vois. » Lorsque Jésus voit Nathanaël venir à lui, il déclare à son sujet : « Voici vraiment un Israélite : il n’y a pas de ruse en lui. » Nathanaël lui demande : « D’où me connais-tu ? » Jésus lui répond : « Avant que Philippe t’appelle, quand tu étais sous le figuier, je t’ai vu. » Nathanaël lui dit : « Rabbi, c’est toi le Fils de Dieu ! C’est toi le roi d’Israël ! » Jésus reprend : « Je te dis que je t’ai vu sous le figuier, et c’est pour cela que tu crois ! Tu verras des choses plus grandes encore. » Et il ajoute : « Amen, amen, je vous le dis : vous verrez le ciel ouvert, et les anges de Dieu monter et descendre au-dessus du Fils de l’homme. »
Méditer avec les carmes
Deux courts dialogues, l’un avec Philippe, l’autre avec Jésus, suffisent pour entrevoir l’essentiel de la personnalité de Nathanaël.
Le petit port de Beitsaïda venait de donner coup sur coup trois disciples à Jésus : André et Pierre, les deux frères, et également Philippe, dont le père devait être grec d’origine. Aussitôt appelé par Jésus, Philippe répercute l’appel qui l’a touché. Il s’en va trouver son ami Nathanaël (Dieudonné !), et tout de suite, en lui rappelant des conversations passionnées qu’ils ont eue ensemble, il lui dit : « Celui de qui il est écrit dans la Loi de Moïse et les Prophètes, nous l’avons trouvé ! C’est Jésus, le fils de Joseph, de Nazareth. »
Nazareth ? Malheureux Philippe, c’est le nom qu’il ne fallait pas citer !
Pourquoi ? Parce que Nathanaël est natif de Cana, et que Nazareth et Cana ne sont distants que d’à peine deux lieues. Ce n’est donc pas à lui qu’on va apprendre ce que valent « les gars de Nazareth » : « De Nazareth peut-il sortir quelque chose de bon ? »
Nathanaël s’en tient à ses évidences immédiates, comme souvent nous aussi dans les choses de la foi. Il a son idée sur les gens de Nazareth, et cela l’empêche d’entendre le message de Philippe :
le Messie est venu : tout concorde avec les Écritures ;
nous l’avons trouvé : pour nous, c’est un nom, un visage, une voix.
Philippe, un moment déçu par le scepticisme de Nathanaël, trouve la seule réponse possible. Elle est géniale : « Viens et vois ». « Viens, puisque mon raisonnement biblique n’est pas suffisant pour te convaincre. Viens ; je ne te demande pas de te rendre à mes arguments. Viens et vois. Fais comme nous : mets-toi en route vers lui.
Philippe, en vrai témoin, en vrai serviteur de la parole, s’efface : il ne va pas imposer à Nathanaël sa manière, son expérience, sa découverte de Jésus. Il dit seulement sa joie, sa certitude : « Nous l’avons trouvé ; pour nous maintenant, c’est clair et c’est vital. Quant à toi, maintenant, vois par toi-même ; viens de toi-même ».
Et Nathanaël accepte la démarche. Jésus regarde l’homme qui s’approche, et il dit à son sujet : « Voici un véritable fils d’Israël en qui il n’est point d’artifice. »
Nathanaël a entendu. D’emblée il se sent rejoint dans ce qui a été l’effort intense de sa vie. Ce qu’il a été, ce qu’il a voulu être, Jésus le voit, Jésus l’a vu : « D’où me connais-tu ? » ; « où étais-tu, d’où regardais-tu, pour avoir sur ma vie une telle lucidité ? »
Souvent, dans l’Évangile, la question « d’où ? », posée à Jésus ou à propos de lui, renvoie directement à son origine divine : »D’où la tiens-tu donc, cette eau vive ? », dira la Samaritaine (4, 11). »D’où lui viennent cette sagesse et ces miracles ? », demanderont les gens de Nazareth (Mt 13, 54).
Jésus, dans sa réponse, ne dit pas explicitement à Nathanaël d’où il le connaît ; mais ce que Jésus a vu, Dieu seul pouvait le voir : « Quand tu étais, tout à l’heure, sous le figuier, je t’ai vu »... Demeurer sous le figuier, sous l’arbre de la connaissance, c’était, dans le langage imagé des rabbins, consacrer sa vie à scruter les Écritures ; c’était méditer jour et nuit la Loi du Seigneur et veiller dans la prière...
« Sous le figuier, je t’ai vu, Nathanaël. Ce que tu donnais là à Dieu dans la gratuité de ton cœur, ce moment de fidélité que tu cachais aux hommes, je l’ai vu. Et parce que je t’ai vu, tu verras, toi aussi, Nathanaël. Tu verras des choses bien plus grandes encore que cette lucidité que tu découvres en moi ; et tous, vous verrez, vous qui avez foi en moi. Vous verrez en moi l’Envoyé de Dieu, le salut venu chez vous à travers la déchirure du ciel ; vous verrez le va-et-vient des anges messagers, l’échange incessant des projets de salut, de moi au Père et du Père vers moi, moi sur la terre avec vous et lui dans le ciel de sa gloire. »
Viens et vois, Nathanaël !