
Première lecture
Frères, pourriez-vous supporter de ma part un peu de folie ? Oui, de ma part, vous allez le supporter, à cause de mon amour jaloux qui est l’amour même de Dieu pour vous. Car je vous ai unis au seul Époux : vous êtes la vierge pure que j’ai présentée au Christ. Mais j’ai bien peur qu’à l’exemple d’Ève séduite par la ruse du serpent, votre intelligence des choses ne se corrompe en perdant la simplicité et la pureté qu’il faut avoir à l’égard du Christ. En effet, si le premier venu vous annonce un autre Jésus, un Jésus que nous n’avons pas annoncé, si vous recevez un esprit différent de celui que vous avez reçu, ou un Évangile différent de celui que vous avez accueilli, vous le supportez fort bien ! J’estime, moi, que je ne suis inférieur en rien à tous ces super-apôtres. Je ne vaux peut-être pas grand-chose pour les discours, mais pour la connaissance de Dieu, c’est différent : nous vous l’avons montré en toute occasion et de toutes les façons. Aurais-je commis une faute lorsque, m’abaissant pour vous élever, je vous ai annoncé l’Évangile de Dieu gratuitement ? J’ai appauvri d’autres Églises en recevant d’elles l’argent nécessaire pour me mettre à votre service. Quand j’étais chez vous, et que je me suis trouvé dans le besoin, je n’ai été à charge de personne ; en effet, pour m’apporter ce dont j’avais besoin, des frères sont venus de Macédoine. En toute occasion, je me suis gardé d’être un poids pour vous, et je m’en garderai toujours. Aussi sûrement que la vérité du Christ est en moi, ce motif de fierté ne me sera enlevé dans aucune des régions de la Grèce. Pourquoi donc me comporter ainsi ? Serait- ce parce que je ne vous aime pas ? Mais si ! Et Dieu le sait.
Psaume
Justesse et sûreté, les œuvres de ses mains.
De tout cœur je rendrai grâce au Seigneur dans l’assemblée, parmi les justes. Grandes sont les œuvres du Seigneur ; tous ceux qui les aiment s’en instruisent.
Noblesse et beauté dans ses actions : à jamais se maintiendra sa justice. De ses merveilles il a laissé un mémorial ; le Seigneur est tendresse et pitié.
Justesse et sûreté, les œuvres de ses mains, sécurité, toutes ses lois, établies pour toujours et à jamais, accomplies avec droiture et sûreté !
Évangile
Alléluia. Alléluia. Vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ; c’est en lui que nous crions « Abba », Père. Alléluia.
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Lorsque vous priez, ne rabâchez pas comme les païens : ils s’imaginent qu’à force de paroles ils seront exaucés. Ne les imitez donc pas, car votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant même que vous l’ayez demandé. Vous donc, priez ainsi : Notre Père, qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour. Remets-nous nos dettes, comme nous-mêmes nous remettons leurs dettes à nos débiteurs. Et ne nous laisse pas entrer en tentation, mais délivre-nous du Mal.
Car, si vous pardonnez aux hommes leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi. Mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père non plus ne pardonnera pas vos fautes. »
Méditer avec les carmes
Le Pater, dans l’Evangile de St Matthieu, vient en conclusion d’un long enseignement de Jésus sur la prière.
Quand tu pries, dit Jésus, ne va pas te camper aux carrefours pour te faire voir : prie ton Père sans être vu, ferme sur toi la porte ; accepte ces moments où tu n’auras pas d’autre motivation pour la prière que la présence de ton Père. Quand tu pries, ne rabâche pas, ne répète pas, ne t’énerve pas comme si, à force de tension, tu allais contraindre Dieu à te rendre la prière facile.
Derrière toute ostentation comme derrière toute impatience dans la prière se cache, en effet, une erreur sur Dieu ; et c’est surtout cela que Jésus veut nous faire comprendre.
Dès que l’on prie dans le secret, dès lors qu’on fait à Dieu cette politesse affectueuse de fermer la porte, il n’y a pas à « rejoindre » Dieu, car Dieu est là, déjà, dans le secret, dans son secret où il nous a admis.
« Dieu te le rendra », promet Jésus. Et que nous rendra-t-il ? - le secret ! Dieu te revaudra le secret que tu voulais pour lui. L’important n’est pas que nous voyions Dieu (du moins sur cette terre), mais que Dieu, qui voit dans le secret, nous regarde dans le secret où pour lui nous sommes entrés.
Et à partir du moment où Dieu nous voit, nous n’avons pas à nous appesantir sur nos manques, sur nos impréparations, sur nos porte-à-faux, sur nos misères : « Votre Père, dit Jésus, sait bien de quoi vous avez besoin, avant même que vous demandiez ».
Il sait déjà, tout comme il est déjà. Nous sommes devancés, et c’est bien comme cela ; notre démarche déjà lui a tout dit, tout apporté ; notre fardeau est déjà déchargé, puisque Dieu sait déjà.
Quel va être, dans ces conditions, le premier mot de la prière pour celui qui est déjà accueilli, déjà entendu, déjà compris ? « Vous donc, dit Jésus, priez ainsi : Notre Père », Père de nous, Père de nous tous.
Au moment même où le Moi s’efface devant le Toi de Dieu, voilà que le Nous envahit tout le champ de la prière ; et le secret voulu pour Dieu nous fait communier, devant Dieu, à la prière des hommes de l’univers : « Notre Père, qui es aux cieux ».
Dans le Pater, c’est toujours un Nous qui s’adresse à Dieu, c’est toujours un nous qui dit Toi ; c’est toujours l’Eglise de Jésus qui, tournée vers le Père, avant toute autre demande lui parle de trois choses : son Nom, son Règne, sa Volonté.