
Première lecture
Pour ce qui est des temps et des moments de la venue du Seigneur, vous n’avez pas besoin, frères, que je vous en parle dans ma lettre. Vous savez très bien que le jour du Seigneur vient comme un voleur dans la nuit. Quand les gens diront : « Quelle paix ! quelle tranquillité ! », c’est alors que, tout à coup, la catastrophe s’abattra sur eux, comme les douleurs sur la femme enceinte : ils ne pourront pas y échapper. Mais vous, frères, comme vous n’êtes pas dans les ténèbres, ce jour ne vous surprendra pas comme un voleur. En effet, vous êtes tous des fils de la lumière, des fils du jour ; nous n’appartenons pas à la nuit et aux ténèbres. Alors, ne restons pas endormis comme les autres, mais soyons vigilants et restons sobres. Car Dieu ne nous a pas destinés à subir la colère, mais à entrer en possession du salut par notre Seigneur Jésus Christ, mort pour nous afin de nous faire vivre avec lui, que nous soyons en train de veiller ou de dormir. Ainsi, réconfortez-vous mutuellement et édifiez-vous l’un l’autre, comme vous le faites déjà.
Psaume
J’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants.
Le Seigneur est ma lumière et mon salut ; de qui aurais-je crainte ? Le Seigneur est le rempart de ma vie ; devant qui tremblerais-je ?
J’ai demandé une chose au Seigneur, la seule que je cherche : habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie, pour admirer le Seigneur dans sa beauté et m’attacher à son temple.
J’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants. « Espère le Seigneur, sois fort et prends courage : espère le Seigneur. »
Évangile
Alléluia. Alléluia. Un grand prophète s’est levé parmi nous, et Dieu a visité son peuple.Alléluia.
En ce temps-là, Jésus descendit à Capharnaüm, ville de Galilée, et il y enseignait, le jour du sabbat. On était frappé par son enseignement car sa parole était pleine d’autorité. Or, il y avait dans la synagogue un homme possédé par l’esprit d’un démon impur, qui se mit à crier d’une voix forte : « Ah ! que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu. » Jésus le menaça : « Silence ! Sors de cet homme. » Alors le démon projeta l’homme en plein milieu et sortit de lui sans lui faire aucun mal. Tous furent saisis d’effroi et ils se disaient entre eux : « Quelle est cette parole ? Il commande avec autorité et puissance aux esprits impurs, et ils sortent ! » Et la réputation de Jésus se propageait dans toute la région.
Méditer avec les carmes
De nouveau l'Évangile de Luc nous replace devant le mystère de la parole de Jésus qui subjugue l'intelligence des croyants et qui chasse les esprits mauvais
Au temps de Jésus les commentateurs de la Loi aimaient à se retrancher derrière l'autorité des rabbis célèbres du temps passé, quitte à souligner leurs divergences: "Rabbi Untel a dit ceci ... mais Rabbi Tel autre a dit cela". Jésus, lui, ne se réfère qu'à lui-même: "Moi, je vous dis..." Cela rendait un son assez neuf dans les synagogues où Jésus prêchait. Avec lui on se sentait sur un terrain solide, et l'Écriture redevenait vivante et actuelle.
Aujourd'hui encore cette puissance de la parole de Jésus surprend toute communauté qui décide de l'écouter et de se laisser mesurer par elle. Quand Jésus parle dans la liturgie ou dans le secret de l'oraison, sa parole pénètre d'emblée plus profond que toutes nos théories, tous nos systèmes et toutes nos dissensions. On peut contester une théologie, on peut opposer deux penseurs et les renvoyer dos à dos, rabbi contre rabbi; mais les paroles de Jésus sont celles qu'il a entendues auprès du Père, et elles sont solides comme l'éternité.
Beaucoup de problèmes et de situations peuvent être abordés sous des angles différents, et jugés diversement, sans que la loyauté ni l'amitié ne soient en cause. C'est le cas bien souvent en communauté: Rabbi Une telle dit ceci, Rabbi Telle autre dit cela; allez savoir qui a raison! Mais quand Jésus a parlé, quand Jésus surgit au milieu de nous et reprend, d'eucharistie en eucharistie, d'office en office, les mêmes paroles exigeantes et douces, il n'y a plus qu'à répondre, ou à se taire pour écouter.
Cette même parole du Christ garde, aujourd'hui encore, le pouvoir d'écarter les forces du mal. Elles sont parfois, de nos jours, difficiles à discerner, mais l'Evangile, ce matin, peut nous y aider, en nous fournissant au moins un critère assez sûr.
On pourrait le formuler comme un paradoxe: les forces du mal poussent l'homme à la fois à la lucidité et au refus.
Lucidité effrayante du possédé, dans la synagogue de Capharnaüm, quand, avant tout le monde, il nomme le Messie: "Je sais qui tu es: le Saint de Dieu!". Mais cette lumière est mise au service d'un non définitif: "Ah! de quoi te mêles-tu, Jésus de Nazareth ! Tu es venu pour nous perdre!"
Ce sont bien ces forces du mal qui travaillent notre cœur, sournoisement, lorsque, ayant rencontré la lumière de l'Évangile de Jésus et percevant en nous l'appel du Saint de Dieu à un nouvel héroïsme, à une nouvelle force, à une nouvelle douceur, nous détournons les yeux ou nous retardons indéfiniment le moment de la soumission, du sourire, du pardon, ou simplement l'entrée dans un vrai silence contemplatif.
"Ah! de quoi viens-tu te mêler, Jésus de Nazareth? Pourquoi viens-tu décaper mes illusions, pourquoi viens-tu secouer mon inertie, ma vie inauthentique, mon attachement aux choses, ou aux choix que je pose? Je sais que tu as raison; je sais que ta lumière sera toujours victorieuse, mais laisse-moi! Laisse-moi stagner dans ma tristesse, dans ma solitude; laisse-moi dans mon refus!"
Mais Jésus ne nous laisse pas, et c'est sa patience qui nous sauve, en nous donnant le temps de retrouver pour lui le meilleur de nous-mêmes.
Heureuse ténacité du Pasteur, heureuse vigueur du Maître qui commande avec autorité et qui délivre d'un seul mot, d'un seul regard.