
Première lecture
Je suis un grand roi – dit le Seigneur de l’univers –, et mon nom inspire la crainte parmi les nations.
Maintenant, prêtres, à vous cet avertissement : Si vous n’écoutez pas, si vous ne prenez pas à cœur de glorifier mon nom – dit le Seigneur de l’univers –, j’enverrai sur vous la malédiction, je maudirai les bénédictions que vous prononcerez. Vous vous êtes écartés de la route, vous avez fait de la Loi une occasion de chute pour la multitude, vous avez détruit mon alliance avec mon serviteur Lévi, – dit le Seigneur de l’univers. À mon tour je vous ai méprisés, abaissés devant tout le peuple, puisque vous n’avez pas gardé mes chemins, mais agi avec partialité dans l’application de la Loi. Et nous, n’avons-nous pas tous un seul Père ? N’est-ce pas un seul Dieu qui nous a créés ? Pourquoi nous trahir les uns les autres, profanant ainsi l’Alliance de nos pères ?
Psaume
Garde mon âme dans la paix près de toi, Seigneur.
Seigneur, je n’ai pas le cœur fier ni le regard ambitieux ; je ne poursuis ni grands desseins, ni merveilles qui me dépassent.
Non, mais je tiens mon âme égale et silencieuse ; mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère.
Attends le Seigneur, Israël, maintenant et à jamais.
Deuxième lecture
Frères, nous avons été pleins de douceur avec vous, comme une mère qui entoure de soins ses nourrissons. Ayant pour vous une telle affection, nous aurions voulu vous donner non seulement l’Évangile de Dieu, mais jusqu’à nos propres vies, car vous nous étiez devenus très chers. Vous vous rappelez, frères, nos peines et nos fatigues : c’est en travaillant nuit et jour, pour n’être à la charge d’aucun d’entre vous, que nous vous avons annoncé l’Évangile de Dieu. Et voici pourquoi nous ne cessons de rendre grâce à Dieu : quand vous avez reçu la parole de Dieu que nous vous faisions entendre, vous l’avez accueillie pour ce qu’elle est réellement, non pas une parole d’hommes, mais la parole de Dieu qui est à l’œuvre en vous, les croyants.
Évangile
Alléluia. Alléluia. Vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux ; vous n'avez qu'un seul maître, le Christ. Alléluia.
En ce temps-là, Jésus s’adressa aux foules et à ses disciples, et il déclara : « Les scribes et les pharisiens enseignent dans la chaire de Moïse. Donc, tout ce qu’ils peuvent vous dire, faites-le et observez-le. Mais n’agissez pas d’après leurs actes, car ils disent et ne font pas. Ils attachent de pesants fardeaux, difficiles à porter, et ils en chargent les épaules des gens ; mais eux-mêmes ne veulent pas les remuer du doigt. Toutes leurs actions, ils les font pour être remarqués des gens : ils élargissent leurs phylactères et rallongent leurs franges ; ils aiment les places d’honneur dans les dîners, les sièges d’honneur dans les synagogues et les salutations sur les places publiques ; ils aiment recevoir des gens le titre de Rabbi. Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, car vous n’avez qu’un seul maître pour vous enseigner, et vous êtes tous frères. Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux. Ne vous faites pas non plus donner le titre de maîtres, car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ. Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. Qui s’élèvera sera abaissé, qui s’abaissera sera élevé. »
Méditer avec les carmes
Tout le chapitre 23 de saint Matthieu rapporte une série de paroles de Jésus contre les scribes et les Pharisiens. Être scribe, c’était être un maître dans l’interprétation de la Loi. , c’était donc une vraie spécialisation et une vraie fonction. Quant aux Pharisiens, ils constituaient, depuis deux siècles environ, une sorte de parti politico-religieux, souvent dans l’opposition aux grands prêtres politiciens, et très puissant dans les classes moyennes. On pouvait donc être scribe sans être pharisien. En fait, à l’époque du Christ, un grand nombre de spécialistes de la Loi appartenait au parti des Pharisiens.
Qu’est-ce qui a mérité la sévérité de Jésus ? - Trois attitudes, qui nous guettent nous aussi, dès que, dans la communauté chrétienne, nous pensons être détenteurs d’une responsabilité ou témoins d’une fidélité particulière.
Tout d’abord, ils disent et ne font pas. Tout se passe au niveau du langage : en disant les choses, il les vivent par procuration. Devenus, par héritage, propriétaires d’une tradition, il la gèrent au niveau des formules, des schémas, des itinéraires proposés. Ils calibrent les fardeaux, mais s’exemptent eux-mêmes de les porter.
Ces conseillers-là, pense Jésus, se disqualifient par le mensonge de leur vie réelle. Ils peuvent faire illusion, ils peuvent se faire illusion, mais on ne peut les prendre comme référence puisqu’ils ne sont que théorie sans pratique.
Ils disent, et ne font pas ce qu’ils disent ; et même ce qu’ils font est faussé d’avance : c’est le deuxième reproche de Jésus.
Ainsi, non seulement ils se contentent de la théorie, mais ils en restent aux apparences, au spectacle, au théâtre. Il leur faut être vu, donc ils font du voyant, et ils allongent les franges de leur châle de prière. L’important pour eux est d’être classés parmi les vrais fidèles, d’être reconnus et salués comme des croyants de premier plan. Au fond, ces scribes et ses Pharisiens ont besoin du miroir des autres pour se sentir à l’aise. Et pourquoi sont-ils toujours en quête de l’approbation et de l’estime des autres ? - Parce qu’ils se situent mal devant Dieu et devant le Messie Jésus.
Là, Jésus quitte le ton des reproches et donne quelques consignes très nettes à sa communauté : « Ne vous faites pas appeler « Rabbi »’, ou « maître », « guide », et n’appelez personne « père » sur la terre ». « Père », c’est le titre que l’on donnait à certains rabbis particulièrement réputés ou vénérés.
Tout cela n’a plus cours, nous dit Jésus : ces titres-là, il ne faut ni les rechercher pour soi, ni les donner à d’autres, car l’Envoyé est désormais pour tous le maître unique, l’interprète unique de la volonté de Dieu ; et tout ce qui est vécu dans l’Eglise sous le signe de la paternité doit être référé à l’unique paternité de Dieu. Dans l’Église de Jésus, il serait tout aussi vain de devenir un personnage que de s’abriter derrière le prestige d’un autre. Car la seule grandeur consiste à servir, et la qualité du service chrétien, personne, sinon Dieu, ne peut la mesurer.
Ce qui revient au disciple de Jésus, c’est de s’abaisser, non pas de se défiler devant les responsabilités, ni de se déprécier artificiellement, mais de s’abaisser, c’est-à-dire d’assumer sa vie devant Dieu comme un service, en rendant belles les choses simples, et en vivant simplement les choses grandes.