
Première lecture
Maintenant – oracle du Seigneur – revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ! Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment. Qui sait ? Il pourrait revenir, il pourrait renoncer au châtiment, et laisser derrière lui sa bénédiction : alors, vous pourrez présenter offrandes et libations au Seigneur votre Dieu. Sonnez du cor dans Sion : prescrivez un jeûne sacré, annoncez une fête solennelle, réunissez le peuple, tenez une assemblée sainte, rassemblez les anciens, réunissez petits enfants et nourrissons ! Que le jeune époux sorte de sa maison, que la jeune mariée quitte sa chambre ! Entre le portail et l’autel, les prêtres, serviteurs du Seigneur, iront pleurer et diront : « Pitié, Seigneur, pour ton peuple, n’expose pas ceux qui t’appartiennent à l’insulte et aux moqueries des païens ! Faudra-t-il qu’on dise : “Où donc est leur Dieu ? ” »
Et le Seigneur s’est ému en faveur de son pays, il a eu pitié de son peuple.
Psaume
Pitié, Seigneur, car nous avons péché.
Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour, selon ta grande miséricorde, efface mon péché. Lave-moi tout entier de ma faute, purifie-moi de mon offense.
Oui, je connais mon péché, ma faute est toujours devant moi. Contre toi, et toi seul, j’ai péché, ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait.
Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu, renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. Ne me chasse pas loin de ta face, ne me reprends pas ton esprit saint.
Rends-moi la joie d’être sauvé ; que l’esprit généreux me soutienne. Seigneur, ouvre mes lèvres, et ma bouche annoncera ta louange.
Deuxième lecture
Frères, nous sommes les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui-même qui lance un appel : nous le demandons au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu. Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché, afin qu’en lui nous devenions justes de la justice même de Dieu. En tant que coopérateurs de Dieu, nous vous exhortons encore à ne pas laisser sans effet la grâce reçue de lui. Car il dit dans l’Écriture : Au moment favorable je t’ai exaucé, au jour du salut je t’ai secouru. Le voici maintenant le moment favorable, le voici maintenant le jour du salut.
Évangile
Ta Parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance. Aujourd’hui, ne fermez pas votre cœur, mais écoutez la voix du Seigneur. Ta Parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance.
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Ce que vous faites pour devenir des justes, évitez de l’accomplir devant les hommes pour vous faire remarquer. Sinon, il n’y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux. Ainsi, quand tu fais l’aumône, ne fais pas sonner la trompette devant toi, comme les hypocrites qui se donnent en spectacle dans les synagogues et dans les rues, pour obtenir la gloire qui vient des hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont reçu leur récompense. Mais toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père qui voit dans le secret te le rendra.
Et quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites : ils aiment à se tenir debout dans les synagogues et aux carrefours pour bien se montrer aux hommes quand ils prient. Amen, je vous le déclare : ceux- là ont reçu leur récompense. Mais toi, quand tu pries, retire- toi dans ta pièce la plus retirée, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père qui voit dans le secret te le rendra.
Et quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu, comme les hypocrites : ils prennent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu’ils jeûnent. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont reçu leur récompense. Mais toi, quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ; ainsi, ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement de ton Père qui est présent au plus secret ; ton Père qui voit au plus secret te le rendra. »
Méditer avec les carmes
Beaucoup de gens, note Jésus, agissent bien en vue, pour se faire remarquer, parce qu’ils cherchent la fausse gloire, celle qui vient des hommes. Ils disposent de trois moyens, qui, en général, leur réussissent : la trompette, le carrefour, la comédie. Ils obtiennent vite auprès des hommes le seul salaire, la seule récompense que les hommes puissent donner : l’estime et l’admiration. Mais cela sonne creux et ne dure pas longtemps.
Tout autres sont les réflexes des croyants qui veulent vivre comme des justes. Vivre en juste, dans le langage biblique, c’est ne pas accumuler des mérites pour se justifier ensuite à tout coup, c’est s’ajuster humblement à Dieu, à son dessein, à son plaisir, selon les paroles mêmes de Jésus, qui disait, de sa relation au Père : « C’est ce qui lui plaît que je fais toujours ».
Les justes, eux aussi, ont trois petites méthodes dont ils sont contents, sans jamais aller jusqu’à en être fiers :
d’abord un réflexe : l’incognito ;
puis un endroit favori : le fond de la maison ;
puis un style, une mode : un visage toujours avenant.
Résultat : les autres ne se doutent de rien, ne voient rien, n’ont rien à admirer, à raconter, à divulguer.
Lui-même, le juste, ne se raconte pas d’histoire ; il ne dénonce pas à sa main gauche le cadeau qu’a fait sa main droite ; autrement dit : il ne prend pas la moindre complaisance en lui-même et ne sait même pas se souvenir du bien qu’il a fait.
Pour prier, il ne se met pas non plus devant une glace, mais derrière la porte ; et quand il jeûne, à le voir, on croirait qu’il part à la fête.
Sa fête à lui, c’est la joie de son Dieu, le « plaisir » de son Dieu, et c’est une fête qui se célèbre avec Lui dans le secret, à deux, en vis à vis, en dialogue d’amour. C’est déjà, pour le juste, pour l’humble ajusté à Dieu, toute sa récompense ici-bas, car un seul regard de Dieu a plus de prix que toutes les renommées et tous les prestiges de ce monde.
Le secret, c’est justement le lieu où nous cherchons le seul regard du Père, et ce que nous faisons dans le secret pour être vus de lui seul, connus de lui seul, valorisés par lui seul, le Père nous le revaudra, promet Jésus.
Comment nous le revaudra-t-il ? Lui seul le sait, et c’est fort bien ainsi. Mais on peut lui exprimer un désir, imaginer un bonheur, et lui demander dans la prière : « Père qui m’as vu dans mon secret, accueille-moi, dès aujourd’hui, dans ton secret ; donne-moi de rencontrer ton regard ! »