
Première lecture
En ces jours-là, les chefs du peuple, les Anciens et les scribes constataient l’assurance de Pierre et de Jean et, se rendant compte que c’était des hommes sans culture et de simples particuliers, ils étaient surpris ; d’autre part, ils reconnaissaient en eux ceux qui étaient avec Jésus. Mais comme ils voyaient, debout avec eux, l’homme qui avait été guéri, ils ne trouvaient rien à redire. Après leur avoir ordonné de quitter la salle du Conseil suprême, ils se mirent à discuter entre eux. Ils disaient : « Qu’allons-nous faire de ces gens-là ? Il est notoire, en effet, qu’ils ont opéré un miracle ; cela fut manifeste pour tous les habitants de Jérusalem, et nous ne pouvons pas le nier. Mais pour en limiter la diffusion dans le peuple, nous allons les menacer afin qu’ils ne parlent plus à personne en ce nom-là. » Ayant rappelé Pierre et Jean, ils leur interdirent formellement de parler ou d’enseigner au nom de Jésus. Ceux-ci leur répliquèrent : « Est-il juste devant Dieu de vous écouter, plutôt que d’écouter Dieu ? À vous de juger. Quant à nous, il nous est impossible de nous taire sur ce que nous avons vu et entendu. » Après de nouvelles menaces, ils les relâchèrent, faute d’avoir trouvé le moyen de les punir : c’était à cause du peuple, car tout le monde rendait gloire à Dieu pour ce qui était arrivé.
Psaume
Alléluia !
Rendez grâce au Seigneur : Il est bon ! Éternel est son amour ! Ma force et mon chant, c’est le Seigneur ; il est pour moi le salut. Clameurs de joie et de victoire sous les tentes des justes :
« Le bras du Seigneur se lève, le bras du Seigneur est fort ! » Non, je ne mourrai pas, je vivrai pour annoncer les actions du Seigneur : il m’a frappé, le Seigneur, il m’a frappé, mais sans me livrer à la mort.
Ouvrez-moi les portes de justice : j’entrerai, je rendrai grâce au Seigneur. « C’est ici la porte du Seigneur : qu’ils entrent, les justes ! » Je te rends grâce car tu m’as exaucé : tu es pour moi le salut.
Évangile
Alléluia. Alléluia. Voici le jour que fit le Seigneur, qu’il soit pour nous jour de fête et de joie ! Alléluia.
Ressuscité le matin, le premier jour de la semaine, Jésus apparut d’abord à Marie Madeleine, de laquelle il avait expulsé sept démons. Celle-ci partit annoncer la nouvelle à ceux qui, ayant vécu avec lui, s’affligeaient et pleuraient. Quand ils entendirent que Jésus était vivant et qu’elle l’avait vu, ils refusèrent de croire. Après cela, il se manifesta sous un autre aspect à deux d’entre eux qui étaient en chemin pour aller à la campagne. Ceux-ci revinrent l’annoncer aux autres, qui ne les crurent pas non plus. Enfin, il se manifesta aux Onze eux-mêmes pendant qu’ils étaient à table : il leur reprocha leur manque de foi et la dureté de leurs cœurs parce qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient contemplé ressuscité. Puis il leur dit : « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création. »
Méditer avec les carmes
L’Évangile que nous lisons aujourd’hui tranche un peu sur tous les autres de cette semaine. Il ne s’agit plus d’un récit vivant et coloré, mais d’une sorte de résumé des apparitions de Jésus Ressuscité.
Nous le trouvons tout à la fin de l’Évangile de Marc (« finale longue de Marc »), qui fait partie des Écritures inspirées, bien que probablement Marc ne soit pas l’auteur de ces quelques versets. Les matériaux ont été pris, semble-t-il, dans les traditions de Luc et de Jean ; et, de toute façon, nous avons là une relique authentique de la première génération chrétienne. C’est à ce titre que l’Église l’accueille dans sa liturgie pascale.
Tout au long de cette semaine, nous avons pu relever trois constantes dans les récits d’apparitions du Sauveur : - l’initiative venait de Jésus, - la reconnaissance de Jésus se faisait toujours progressivement, - chaque rencontre du Ressuscité débouchait sur une mission pour les disciples.
Aujourd’hui encore :
l’initiative de Jésus est soulignée … Jésus apparut (se fit voir), … Jésus se manifesta sous une autre forme, … Jésus se manifesta aux Onze eux-mêmes.
le thème de la reconnaissance de Jésus est présent, lui aussi, mais renversé, en quelque sorte : l’Évangile souligne par trois fois l’incrédulité des compagnons de Jésus : - ils refusent de croire Marie-Madeleine, - ils refusent de croire les deux disciples qui revenaient de la campagne (=Emmaüs), - Jésus lui-même reproche aux Onze leur entêtement à ne pas croire ceux qui l’avaient vu ressuscité.
mais l’accent principal de l’Évangile porte aujourd’hui sur la mission universelle.
Il ne s’agit plus seulement de porter la nouvelle à Pierre et aux autres disciples rassemblés à Jérusalem, mais de partir dans le monde entier et de proclamer la victoire de Jésus à toute la création.
Si nous laissons l’Esprit Saint nous interroger à partir de ces paroles de l’Évangile d’aujourd’hui, nous nous rendons très vite compte que ces quelques versets, d’apparence anodine, reflètent exactement notre situation actuelle de témoins du Christ et les principales tensions que nous connaissons dans notre itinéraire spirituel.
Tensions dans notre vie face aux initiatives de Jésus. Nous l’avons découvert, reconnu, accueilli, au moment du premier don, mais, les années passant, il nous arrive de constater que, par moments, nous avons transféré notre trésor ailleurs et que notre cœur est ailleurs aussi, là où se trouve l’autre trésor.
Dès lors Jésus vivant, Jésus ressuscité, quand de nouveau il prend l’initiative de nous rencontrer, de croiser notre route, nous apparaît comme un étranger, difficilement reconnaissable.
Tensions au cœur même de notre foi et de notre espérance, lorsqu’il s’agit justement de rejoindre le Vivant, le Ressuscité, non pas dans l’euphorie d’une présence sentie, claire pour les yeux et chaude pour le cœur, mais humblement, quotidiennement, à partir du témoignage des Écritures et sous les traits de sa communauté souffrante. C’est la difficulté de croire sans avoir vu, de tout miser sur la parole du Maître.
Tensions, enfin, au niveau de la mission.
À qui, en effet, Jésus confie-t-il le message universel ? – à ceux et à celles qu’il vient de trouver incrédules, entêtés, lents à croire. Pourtant « il nous est impossible de ne pas dire ce que nous avons vu et entendu ». Porteurs d’une nouvelle bouleversante pour le monde, nous portons en même temps le poids de nos lenteurs, de nos velléités, de nos réticences et de nos reprises. Jésus nous confie la flamme qui peut allumer dans le monde l’incendie de la charité, mais nous la portons « dans des vases d’argile ».
L’amour du Christ, toutefois, est si fort, si personnel, si rédempteur, qu’il nous interdit de nous laisser paralyser par notre misère. La mission est là, belle, urgente, décisive, et « il est fidèle, le Dieu qui nous a appelés à la communion de son Fils ».
C’est encore lui qui fera cela.