
Première lecture
Frères, si nous avons une telle confiance en Dieu par le Christ, ce n’est pas à cause d’une capacité personnelle que nous pourrions nous attribuer : notre capacité vient de Dieu. Lui nous a rendus capables d’être les ministres d’une Alliance nouvelle, fondée non pas sur la lettre mais dans l’Esprit ; car la lettre tue, mais l’Esprit donne la vie. Le ministère de la mort, celui de la Loi gravée en lettres sur des pierres, avait déjà une telle gloire que les fils d’Israël ne pouvaient pas fixer le visage de Moïse à cause de la gloire, pourtant passagère, qui rayonnait de son visage. Combien plus grande alors sera la gloire du ministère de l’Esprit ! Le ministère qui entraînait la condamnation, celui de la Loi, était déjà rayonnant de gloire ; combien plus grande sera la gloire du ministère qui fait de nous des justes ! Non, vraiment, ce qui, dans une certaine mesure, a été glorieux ne l’est plus, parce qu’il y a maintenant une gloire incomparable. Si, en effet, ce qui était passager a connu un moment de gloire, combien plus ce qui demeure restera- t-il dans la gloire !
Psaume
Tu es saint, Seigneur notre Dieu !
Exaltez le Seigneur notre Dieu, prosternez- vous au pied de son trône, car il est saint !
Moïse et le prêtre Aaron, Samuel, le Suppliant, tous, ils suppliaient le Seigneur, et lui leur répondait.
Dans la colonne de nuée, il parlait avec eux ; ils ont gardé ses volontés, les lois qu’il leur donna.
Seigneur notre Dieu, tu leur as répondu : avec eux, tu restais un Dieu patient, mais tu les punissais pour leurs fautes.
Exaltez le Seigneur notre Dieu, prosternez- vous devant sa sainte montagne, car il est saint, le Seigneur notre Dieu.
Évangile
Alléluia. Alléluia. Fais-moi connaître ta route, mon Dieu ; dirige-moi par ta vérité. Alléluia.
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Ne pensez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir. Amen, je vous le dis : Avant que le ciel et la terre disparaissent, pas un seul iota, pas un seul trait ne disparaîtra de la Loi jusqu’à ce que tout se réalise. Donc, celui qui rejettera un seul de ces plus petits commandements, et qui enseignera aux hommes à faire ainsi, sera déclaré le plus petit dans le royaume des Cieux. Mais celui qui les observera et les enseignera, celui-là sera déclaré grand dans le royaume des Cieux. »
Méditer avec les carmes
Dieu travaille dans la continuité. Et pourtant il amène dans nos vies certaines ruptures.
La continuité est celle de son projet d’amour sur le monde ; projet annoncé dans la Loi et les prophètes, et réalisé en son Fils Jésus.
Parfois les auditeurs de Jésus ont eu l’impression que sa parole était en rupture avec ce qu’ils avaient l’habitude d’entendre. En fait, s’il y avait rupture, c’était avec les traditions orales accumulées par les rabbins ; car de la Loi écrite, révélée, et de la geste de Dieu commentée par les Prophètes, pas un yod, pas le moindre trait ne devait être périmé par l’enseignement de Jésus. Tout allait être repris, réaffirmé, prolongé et mené à son terme par la bonne nouvelle du Royaume. « Je ne suis pas venu abolir, disait Jésus, mais accomplir« .
Et cela demeure vrai de l’œuvre que Jésus réalise dans nos existences.
Une première parole nous a mis en route, voici bien longtemps déjà, une parole porteuse à la fois d’un appel de Dieu et d’une espérance un peu folle pour nous. Puis, parfois après bien des années, à un tournant de la vie personnelle ou communautaire, le Seigneur nous fait entendre un deuxième appel, une seconde parole, apparemment sans lien avec la première, ou même sans cohérence avec elle ; une parole si étrange qu’il faut, pour la comprendre vraiment, se tourner vers la Croix.
Et de fait, il arrive qu’elle annonce la Croix, qu’elle propose la Croix, comme la deuxième parole de Dieu à Abraham, celle qui lui redemandait l’enfant de la promesse. Dieu semble alors abolir les assurances qu’il nous avait données, ou effacer des tranches entières de notre cheminement vers Lui et avec Lui. Il nous mène « au sentier des ténèbres », et nous vivons ces passages imprévus, personnellement ou communautairement, comme des moments d’échec, comme des impasses où même l’espérance semble vaine, comme le deuil de tout ce que nous avons cherché, alors que, sur ce chemin même de la Croix, Jésus est en train d’accomplir sa promesse envers nous.
Notre communauté serait-elle moins aimée de Dieu parce qu’elle connaît l’épreuve ? Et Dieu cesserait-il d’être le Tout-puissant parce que nous n’avons plus la force de faire fond sur lui ?
Non, mes sœurs, mais simplement nous passons à côté de la véritable espérance. Nous voudrions pouvoir compter sur nous-mêmes, or Dieu accomplit son dessein en nous conduisant à n’espérer qu’en Lui.
C’est Lui qui sait, c’est Lui qui aime, c’est Lui qui fera. Avec nous, bien sûr, et en nous donnant la force, car, selon le vieux proverbe biblique : « Le cheval est préparé pour la bataille, mais de Yahweh vient la victoire ».
À nous de tendre nos mains, en gardant au cœur la parole de la promesse ; à nous de guetter patiemment la gloire de Dieu sur le visage du Christ qui s’est montré à nous au jour de l’appel.
« Garde-toi, disait Moïse, de jamais oublier ce que tes yeux ont vu : ne le laisse pas sortir un seul jour de ton cœur » (Dt 4, 9).