Pleine de grâce - Origène et Lc 1,28
L’éclat unique de la salutation angélique « pleine de grâce » révèle, selon Origène, l’exceptionnalité de Marie, à qui seul ce titre divin est réservé, soulignant ainsi sa vocation singulière dans le mystère de l’Incarnation. Cette parole nouvelle, jamais adressée à aucun autre, invite à contempler la profondeur spirituelle et théologique de la Vierge, mère du Fils du Très-Haut.
Origène (†253) commente le mot Kékharitoménè avec lequel l’ange salut la Vierge Marie.
« Je dois ajouter quelques mots sur la formule employée par l’ange pour saluer Marie, formule nouvelle que je n’ai pas pu trouver ailleurs dans toute l’Écriture. Voici ces paroles : Salut, pleine de grâce ! - ce qui se dit en grec Kékharitoménè.
Où aurais-je pu lire cela ailleurs dans l’Écriture ? Je ne m’en souviens pas. Jamais cette formule ne fut adressée à un homme : Salut, plein de grâce.
À Marie seule, cette salutation était réservée. Si, en effet, Marie avait su qu’une formule de ce genre avait été adressée également à un autre - elle avait, en effet, la connaissance de la Loi, elle était et connaissait par ses méditations de chaque jour les oracles des prophètes ! - jamais elle n’eût été effrayée de cette salutation qui lui semblait étrange.
C’est pourquoi l’ange lui dit : Ne crains pas. Voici que tu concevras et enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut. »[1]
Origène remarque avec perspicacité que la salutation est absolument nouvelle, insolite : on ne la relève en aucun autre endroit de l’Écriture et elle n’a jamais été adressée à personne. Cela veut dire que ce salut - conclut-il - était réservé à Marie exclusivement.
Ce grand érudit de l’antiquité n’explique malheureusement pas le sens des paroles de l’ange. Maintenant on peut mieux comprendre pourquoi : le verbe kharitôo, verbe rare, n’était pas encore entré dans la langue théologique des chrétiens.[2]
[1] Origène , Hom sur Luc VI,7, traduit dans H. CROUZEL, Origène, Homélies sur l’Évangile de saint Luc : sources chrétiennes 87, Paris Cerf 1961, p. 149
[2] I. DE LA POTTERIE, L’annuncio a Maria Lc 1, 28 e 1, 35b nel Kerigma di Luca e nella catechesi dei Padri, in La Mariologia nella catechesi dei Padri (età prenicena), LAS, Roma 1989, 22.
A. Gila