II° siècle, les pères apostoliques et Marie
Cent ans après l’Assomption de la Vierge Marie au Ciel, on a dû encore avoir la sensation de pouvoir la toucher, d’entendre sa voix, la sentir - ou presque. Ce serait comme entendre des histoires de nos arrière-grands-parents – bien que le Christ et la Sainte Vierge restent présents d’une manière bien différente.
Les Pères de l’Église au IIè siècle et la ‘Nouvelle Ève’
Cent ans après l’Assomption de la Vierge Marie au Ciel, on a dû encore avoir la sensation de pouvoir la toucher, d’entendre sa voix, la sentir - ou presque. Ce serait comme entendre des histoires de nos arrière-grands-parents – bien que le Christ et la Sainte Vierge restent présents d’une manière bien différente.
Un temps dédié à la réflexion
Mais les réflexions des Pères apostoliques au IIe siècle étaient plus qu’un simple souvenir : elles recherchaient une compréhension plus profonde. Après l’évangélisation dynamique des apôtres mus par l’Esprit Saint, vint un temps de réflexion théologique et philosophique plus approfondi au sujet du Christ et de sa mère. Les Évangiles ainsi que les lettres et le Livre de l’Apocalypse avaient été écrits, bien que le canon (ce qui allait faire partie du Nouveau Testament) dût encore être fixé. Il fallait articuler plus profondément ce que tout cela signifiait. La tradition apostolique - qui est toujours la même aujourd’hui - leur donna la clé. De leurs réflexions surgiraient les moyens pour fixer des dogmes face à la confusion, à l’incompréhension et à l’hérésie.
Trois Pères de l’Église
Saint Justin Martyr, saint Irénée (un disciple de saint Polycarpe, lui-même ancien disciple de saint Jean l’Évangéliste) et Tertullien ont parlé de Marie comme de la ‘deuxième Ève’ sans donner plus de détails, comme si cela avait été déjà une idée familière. Si saint Justin (vers 100-165) n’avait pas écrit à ce sujet environ vingt ans avant Irénée, on aurait pu penser que cette idée lui était venue de Saint Jean, par le biais de Polycarpe. Car qui mieux que saint Jean, cet homme si contemplatif, qui avait accueilli la Mère de Dieu chez lui après la mort du Christ et qui est connu pour ses intuitions profondes, aurait pu mieux comprendre le rôle de la Vierge Marie dans l’histoire du salut ?
La ‘Nouvelle Ève’ peut vaincre les hérésies
En tout cas, à une époque où l’hérésie du marcionisme niait l’importance de l’Ancien Testament pour le Christianisme, la figure de Marie ‘Nouvelle Ève’ manifesta la continuité entre l’Ancien et le Nouveau Testament, comme l’a montré st Irénée. Parce qu’elle avait accepté de devenir la mère du Christ, il a même appelé Marie « la cause du salut » et parlé de son « sein régénérant les hommes en Dieu », anticipant peut-être, comme certains le soutiennent, Marie comme co-rédemptrice et co-médiatrice (Adversus Haereses 3, 22, 4 et 4, 33, 11).
Alors qu’Ève avait provoqué un désastre cataclysmique sans pareil sur l’humanité, à côté de laquelle les tragédies grecques font penser à de plaisantes comédies, Marie en tant que ‘Nouvelle Ève’ a aidé à sauver la race humaine à travers son Fils. Ainsi saint Irénée écrit :
« Comme Ève fut séduite par le discours d’un Ange, de sorte qu’elle se cacha de Dieu, transgressant Sa parole, de même Marie reçut la bonne nouvelle par le moyen de l’annonce de l’Ange, de sorte qu’elle porta Dieu en elle, étant obéissante à Sa parole. Et, de même que la première fut séduite jusqu’à désobéir à Dieu, la deuxième fut persuadée d’obéir à Dieu ; ainsi, la Vierge Marie devint l’avocate de la vierge Ève » (ibid. III, 22, 19).
Le manque de foi d’Ève, le fait qu’elle ait fait plus confiance au serpent trompeur - qui lui présenta Dieu comme un menteur et un tyran - qu’en Dieu Lui-même qui lui avait tout donné, est remplacé par l’acte de foi de Marie, permettant à Dieu de faire d’elle ce qu’Il veut. L’humilité de Marie, qui ne veut être qu’une simple servante, s’oppose à l’orgueil d’Ève, qui désirait devenir comme un dieu. La différence est frappante : l’une défait par la foi ce que l’autre avait fait de mal par l’incrédulité. C’est pourquoi Irénée écrit si justement :
« Ainsi le nœud de la désobéissance d’Ève fut dénoué par l’obéissance de Marie ; car ce qu’Ève, une vierge, avait noué par son incrédulité, Marie, une vierge, l’a dénoué par la foi » (ibid. III, 22, 4).
Tertullien (vers 155-240) écrira plus tard dans le même sens : « Ève avait cru au serpent ; Marie crut à l’ange. Ce péché que l’une commit en croyant, l’autre le détruisit en croyant » (De la chair, 17).
Les réflexions de Justin, d’Irénée et Tertullien constituent le début de la mariologie qui fleurira de plus en plus au fil des siècles, conduisant à la proclamation de quatre dogmes différents sur Marie. Pendant le Concile Vatican II, Marie recevra le titre de « Mère de l’Église » et Lumen gentium parlera à nouveau de à son rôle comme nouvelle Ève :
« par sa foi et son obéissance, elle a engendré sur la terre le Fils lui-même du Père, sans connaître d’homme, enveloppée par l’Esprit Saint, comme une nouvelle Ève qui donne, non à l’antique serpent, mais au messager de Dieu, une foi que nul doute n’altère » (Lumen gentium 63).
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