Sainte Édith Stein (1891-1942)
Édith Stein, philosophe juive convertie au catholicisme et devenue carmélite sous le nom de Thérèse-Bénédicte de la Croix, incarne par sa vie et son œuvre un témoignage profond de foi, d’intelligence et de courage face aux épreuves du nazisme. Sa quête spirituelle, nourrie par l’enseignement de sainte Thérèse d’Avila et la mystique de saint Jean de la Croix, révèle la puissance transformatrice de la Croix dans l’histoire d’une femme engagée pour la vérité et la dignité humaine.
Édith Stein est née le 12 octobre 1891 à Breslau, ville allemande rattachée à la Pologne en 1945 sous le nom de Wrocław, d’une famille juive pratiquante. Benjamine d’une famille de onze enfants, dont beaucoup sont morts en bas âge, Édith Stein perdit toute jeune son père. Édith Stein fit de brillantes études et choisit la philosophie, tout en soutenant, avec sa sœur Erna et ses amies, le mouvement féministe, qui réclamait une égalité totale entre hommes et femmes.
À l’Université de Breslau, puis à Göttingen, Édith Stein intégra la Société de philosophie, qui rassemblait alors les principaux membres de la phénoménologie. Pendant la première guerre mondiale, Édith Stein s’engagea à la Croix Rouge en Autriche pour soigner les malades de toutes nationalités et assister les mourants. Cette expérience fut si essentielle pour Édith Stein, qui s’interrogeait en philosophe sur l’empathie et la communication, qu’elle devint le sujet de sa thèse, qu’elle obtint brillamment, en 1917. Première femme devenue docteur en philosophie en Allemagne, Édith Stein milita pour que les femmes puissent être admises à enseigner en Université.
Les publications
Édith Stein devint l'assistante d'Edmund Husserl et s’employa à diffuser sa pensée, tout en continuant sa recherche personnelle sur la personne humaine, les valeurs essentielles de liberté et le refus du totalitarisme. L’ouvrage qu’Édith Stein publia en 1991, intitulé Introduction à la philosophie, en est une synthèse.
Il est donc impossible de séparer la recherche philosophique d’Édith Stein de son engagement dans la société : elle concevait tout son travail de philosophe comme une contribution à l’avenir de l’Europe, luttant notamment contre l’antisémitisme et militant pour la reconnaissance des femmes, à destination desquelles elle écrivit un second ouvrage, intitulé Formation de femme et profession de femme.
La conversion d’Édith Stein au catholicisme et son entrée au Carmel
C’est à partir de 1919 qu’Édith Stein, poursuivant sa quête de la vérité, découvrit les Exercices spirituels d'Ignace de Loyola, puis se passionna pour saint Augustin et surtout, en août 1921, sainte Thérèse d’Avila . Édith Stein se passionne pour la vie intérieure telle que sainte Thérèse l’a consignée dans des ouvrages Le Château intérieur (ou livre des demeures) et dans Le Livre de la Vie. Bouleversée par ces ouvrages, qui lui permettent une rencontre fulgurante avec le Christ, Édith Stein choisit l’ordre du Carmel . Baptisée le 1er janvier 1922, et, en attendant d’être admise à entrer au Carmel, tout en enseignant, Édith Stein traduisit les œuvres du saint cardinal John Henry Newman et une partie de l’œuvre du Docteur de l’Église saint Thomas d'Aquin , du latin en langue allemande (notamment les Quæstiones disputatæ de veritate), poursuivant ses écrits par une comparaison entre la philosophie thomiste et la phénoménologie, pleinement consciente de l’importance de mettre la connaissance au service de Dieu.
Édith Stein commença ensuite à donner des conférences, en Allemagne et dans d'autres pays, sur la place de la femme dans la société et dans l’Église, sur la formation des jeunes et sur l’anthropologie, au cours desquelles elle rencontra de nombreuses personnalités, telles que la poétesse Gertrud von Le Fort. Cette dernière deviendra son amie et écrira l’œuvre La Dernière à l'Échafaud, dont Georges Bernanos s’inspira pour écrire les Dialogues des Carmélites.
La lutte contre le nazisme
Les courageuses prises de parti d’Édith Stein contre le nazisme lui permirent d’affirmer la dignité de tout être humain. L’encyclique de Pie XI Mit brennender Sorge, publiée le 10 mars 1937, qui forme l’un des trésors de la Doctrine sociale de l’Église, fait écho à cette condamnation radicale du nazisme par Édith Stein, qui avait d’ailleurs écrit au pape pour lui demander que l’Église prît une position claire contre ce qu’elle nommait « l’idolâtrie de la race ». Interdite d’enseignement en 1933 (les lois allemandes nazies interdisant aux femmes l’enseignement dans les universités ainsi qu’aux Juifs), Édith Stein décida, pour tenter de détruire les préjugés antisémites, d’écrire son autobiographie. Celle-ci s’intitule Vie d'une famille juive.
L’entrée au Carmel
Édith Stein reçut l’autorisation d’entrer au Carmel de Cologne, le 15 octobre 1933, à 41 ans, en la fête de sainte Thérèse d'Avila, et le nom de « Thérèse-Bénédicte de la Croix » lors de sa prise d’habit, le 14 avril 1934. Encouragée par ses supérieures, Édith Stein reprit ses écrits philosophiques et écrivit L’Être fini et l’Être éternel, son œuvre majeure, qui établit le chemin de la recherche de Dieu, dans une connaissance de soi. Pour fuir les nazis, Sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix reçut l’autorisation de partir au carmel d’Echt (Pays-Bas), le 31 décembre 1938, où sa sœur Rosa, également convertie, la rejoignit plus tard.
Elle y continua son œuvre et, à l'occasion du 400ᵉ anniversaire de la naissance du Docteur de l’Église saint Jean de la Croix, sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix (Édith Stein) entreprit l’étude de sa théologie mystique, et rédigea Scientia Crucis (La Science de la Croix), ouvrage dans lequel elle synthétisa la pensée du Docteur de l’Église avec la sienne. Cette synthèse lui permit de parcourir son propre cheminement intellectuel et spirituel, et d’en montrer les étapes. Privée du droit d’émigrer, elle ne put s’enfuir dans un Carmel en Suisse, comme elle le souhaitait, pour échapper à la déportation.
L’arrestation et la mort d’Édith Stein
Arrêtée le 2 août 1942 par la Gestapo[1] avec sa sœur Rosa avec tous les Juifs qui avaient reçu le baptême catholique, Édith Stein fut d’abord détenue avec sa sœur dans le camp de Westerbork, dans lequel elle retrouva deux de ses amies, deux jeunes filles juives devenues catholiques : Ruth Kantorowicz et Alice Reis, ainsi qu’Etty Hillesum, qui en parle dans son Journal. Édith Stein y donna le témoignage d’un amour immense. Le 7 août 1942, Édith Stein et sa sœur Rosa furent envoyées à Auschwitz, en Pologne, où, le 9 août, elles furent assassinées dans la chambre à gaz.
Sources et bibliographie :
W. Herbstrith, Édith Stein, la puissance de la Croix. Paris : ed. Nouvelle Cité, 1982.
C. Rastoin, Édith Stein et le mystère d'Israël, Ad Solem, 1998.
F. Gaboriau, Lorsque Édith Stein se convertit, éditions Ad Solem, 1997.
Y. Moix, Mort et vie d'Édith Stein. Paris : éditions Grasset et Fasquelle, 2008.
[1] Jean-Paul II, homélie à l'occasion de la béatification d'Édith Stein à Cologne, le 1 mai 1987.
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