Berceuse de la Mère Dieu

Dans ce poème empreint de tendresse et de foi, Marie se révèle comme la mère humble et aimante qui offre au monde le don précieux de son Fils, Dieu fait homme, incarnant ainsi le mystère profond de l’Incarnation et de la rédemption. À travers cette berceuse, la Vierge Marie nous invite à contempler la merveille de l’amour divin qui se fait chair et s’abandonne entre ses bras.


Mon Dieu qui dormez, faible entre mes bras, Mon enfant tout chaud sur mon cœur qui bat, J'adore en mes mains et berce, étonnée, La merveille, ô Dieu, que m'avez donnée.

De fils, ô mon Dieu, je n'en avais pas. Vierge que je suis, en cet humble état Quelle joie en fleur de moi serait née ? Mais vous, Tout-Puissant, me l'avez donnée.

Que rendrai-je à Vous, moi sur qui tomba Votre grâce ? O Dieu, je souris tout bas, Car j'avais aussi, petite et bornée, J'avais une grâce et Vous l'ai donnée.

De bouche, ô mon Dieu, vous n'en aviez pas Pour parler aux gens perdus d’ici-bas… Ta bouche de lait vers mon sein tournée, Ô mon Fils, c’est moi qui te l’ai donnée.

De main, ô mon Dieu, Vous n'en aviez pas Pour guérir du doigt leurs pauvres corps las… Ta main, bouton clos, rose encor gênée, Ô mon Fils, c'est moi qui te l'ai donnée.

De chair, ô mon Dieu, Vous n'en aviez pas Pour rompre avec eux le pain du repas… Ta chair au printemps de moi façonnée, O mon Fils, c’est moi qui te l’ai donnée.

De mort, ô mon Dieu, Vous n’en aviez pas Pour sauver le monde… ô douleur, là-bas, Ta mort d’homme, un soir, noire, abandonnée, Mon petit, c’est moi qui te l'ai donnée.


Marie Noël , « Berceuse de Noël », dans « Le rosaire des joies ». Crès, 1930. Editions Gallimard, Paris 1983.

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