La vie à Nazareth (Lc 2, 51-52)
Dans la simplicité quotidienne de Nazareth, Marie veille avec un cœur fidèle et méditatif, révélant par sa vie humble et silencieuse la profondeur spirituelle d’une existence consacrée à l’amour et à la croissance en sagesse de Jésus. Ce passage invite à contempler le mystère de la vie cachée, où les petites actions ordinaires deviennent autant de chemins vers l’union divine et la fidélité au Royaume de Dieu.
« Il redescendit alors avec eux et revint à Nazareth ; et il leur était soumis. Et sa mère gardait fidèlement toutes ces choses en son cœur. Quant à Jésus, il croissait en sagesse, en taille et en grâce devant Dieu et devant les hommes. »
(Luc 2, 51-52)
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Ces versets suggèrent le véritable rôle éducatif des parents de Jésus qui leur était soumis et grandissait en sagesse, en taille et en grâce. Cependant, fait exceptionnel pour des parents, les parents de Jésus sont aussi ses disciples, car Jésus est Dieu et il a manifesté sa sagesse au temple (Lc 2, 41-52). Tout ceci a été formulé par Jean-Paul II[1].
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Ces versets nous disent que Marie médite et prie, nous en parlons ailleurs.
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Ces versets suggèrent aussi toute la vie quotidienne à Nazareth, faite de travaux ordinaires et de toutes petites actions, cachées. Et n’y a-t-il pas un infini dans le petit autant qu’un infini dans le grand ?
Il est bon d’interpréter l’Écriture par l’Écriture, en rapprochant ces versets de quelques autres versets du même Évangile, et d’apporter aussi l’interprétation offerte par la vie des saints. Nous obtenons alors des pistes sérieuses pour pénétrer le mystère de la vie cachée à Nazareth.
Quelques pistes pour pénétrer le mystère de la vie quotidienne à Nazareth :
« Car où est votre trésor, là aussi sera votre cœur. »
(Luc 12, 34)
La famille avait pour trésor le Verbe de Dieu. Leur vie à Nazareth était une vie de pur amour. Aucune imperfection n’empêchait l’union divine. Saint Jean de la Croix nous aide à imaginer les choses car il ne craint pas de citer de très petites choses qui peuvent devenir obstacles à l’amour lorsque l’on n’a pas la force de rompre avec elles :
« Quant à nos tendances volontaires, il suffit, je le répète, qu’il y en ait envers des choses très minimes pour empêcher l’union divine. Ces imperfections habituelles sont, par exemple, la coutume de parler beaucoup, une petite attache dont on ne veut jamais se défaire, à un objet quelconque, une personne, un vêtement, un livre, une cellule, tel genre de nourriture, petites conversations, petits goûts, petits désirs de savoir, d’entendre, et autres semblables. »[2]
« Quel est donc l’intendant fidèle, avisé, que le maître établira sur ses gens pour leur donner en temps voulu leur ration de blé ? »
(Luc 12, 42)
« Qui est fidèle en très peu de chose est fidèle aussi en beaucoup »
(Luc 16, 10)
Dans l’Évangile, Jésus parle souvent des petits riens : il condamne le formalisme stérile des pharisiens qui, parce qu’ils sont attachés à leurs menues observances de façon trop humaine, les ont vidées de leur sève et en ont fait des obstacles à l’amour (Lc 11, 42) ; il nous montre l’erreur du prodigue qui, déçu sans doute par l’apparente monotonie d’une existence banale, cherche l’aventure et ne récolte que déboires (Lc 15, 11-16). Mais en même temps, le serviteur fidèle, minutieux, sera récompensé de son labeur quotidien et ingrat (Lc 12, 42 ; 16, 10). Il nous faut imaginer très concrètement la vie de la famille à Nazareth... Les témoins récents nous y aident. Par exemple, Charles de Foucauld mena à Nazareth une vie très simple et laborieuse, mais riche d’adoration. Et de la grande réformatrice du carmel (Thérèse d’Avila), il est dit :
« Elle était la première à prendre en mains le panier et le balai. [...] Lorsque le soir, faisant son examen dans son oratoire, la Mère constatait qu’elle n’avait accompli aucune œuvre de charité, elle se rendait au chœur et recousait tous les manteaux qu’elle trouvait décousus dans les armoires, et sans doute qu’il y en avait beaucoup, puisque la communauté se composait de deux cents religieuses. D’autre fois, elle allait, munie d’une petite lanterne, se placer dans les escaliers, pour empêcher de tomber les Sœurs qui n’avaient pas de lumière, comme aussi pour en donner à celles qui en cherchaient. »[3]
La vie des saints nous montre que des personnes généreuses, aux aspirations immenses, ont su passer toute leur existence dans des travaux ennuyeux et faciles ; et cela sans déception aucune parce qu’elles savaient tirer parti des moindres petits riens.[4]
« Il leur dit : "En vérité, je vous le dis : nul n’aura laissé maison, femme, frères, parents ou enfants, à cause du Royaume de Dieu, qui ne reçoive bien davantage en ce temps-ci, et dans le monde à venir la vie éternelle." »
(Luc 18, 29-30)
Et voici que nous recevrons dès ici-bas un centuple, même du côté de ces riens qu’il nous eut été facile de dédaigner. C’est ainsi que saint François d’Assise chanta son cantique des créatures... Thérèse d’Avila dit la joie qu’elle éprouve en son ermitage parce que « de son lit elle peut contempler la rivière et les levers de soleil ». Saint Jean de la Croix assiste, de l’escalier de son couvent, au spectacle féerique de l’aurore sur l’Alhambra.[5] Telle était aussi la vie Jésus, Marie et Joseph, qui avec un regard d’enfant, tout extasié et pur, jouissaient de tout le créé :
« Considérez les lis, comme ils ne filent ni ne tissent. Or, je vous le dis, Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n’a pas été vêtu comme l’un d’eux. »
(Luc 12, 27)
[1] Jean-Paul II, audience du 4 décembre 1996 [2] Jean de la Croix, La montée du Carmel, Livre I, 11 [3] Extrait de : https://www.carmel.asso.fr , le 25 octobre 2010. [4] Extrait de : https://www.carmel.asso.fr , le 25 octobre 2010. [5] Extrait de : https://www.carmel.asso.fr , le 25 octobre 2010.
Françoise Breynaert
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