Gérard Majella secouru par les anges
En 1753, tout ce qui peut sembler trop merveilleux à des intelligences qui se veulent rationnelles est mis en doute. Ainsi le grand sanctuaire de saint Michel au mont Gargan est-il presque déserté car personne ne veut plus avouer croire aux anges. Personne, excepté le jeune Gérard Majella, novice de la récente congrégation fondée par Alphonse de Liguori. Enthousiaste, il convainc une douzaine de ses camarades de le suivre en pèlerinage à la sainte montagne de l’Archange. Mais le voyage est plus long et difficile que prévu ; dès le premier soir, vivres et argent font défaut aux pèlerins. Un détail qui n’embarrasse pas Gérard, certain que saint Michel leur viendra en aide.
Les raisons d'y croire
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La vie de saint Gérard Majella, ses vertus et les événements extraordinaires qui l'entourent, sont connus à travers des témoignages de personnes l’ayant connu directement. D’ailleurs, un des premiers biographes de Gérard, le Père Francesco Tannoia, est aussi son contemporain. Les archives de la Congrégation du Très Saint Rédempteur contiennent de nombreux documents concernant ses membres, dont des lettres (certaines écrites par Gérard ou destinées à lui), des rapports et des notes de ses supérieurs.
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Gérard a de bonnes raisons de croire au secours angélique : il fait partie de ces saints pour qui, depuis l’enfance, le voile séparant l’univers visible de l’invisible est transparent. Il voit souvent les anges, en particulier son ange gardien avec lequel, petit garçon, il a l’habitude de jouer, comme le fera plus tard Padre Pio . Comme lui, il s'étonne que les autres n’aient pas ce don.
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Lorsqu’à dix ans, ce petit garçon très pieux a souhaité communier, il s’est heurté au refus de son curé. Dix jours plus tard, saint Michel lui est apparu et lui a donné la sainte hostie. Depuis, il voue à l’Archange une dévotion sans faille. Il ne faut donc pas s’étonner de son désir d’aller au Gargan, ni de sa capacité à convaincre ses camarades d’études de l’accompagner.
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Le supérieur du noviciat lui a confié une petite somme, insuffisante pour les frais du voyage. Dès le premier jour, il est évident qu’il faudra se serrer la ceinture, dormir à la belle étoile et renoncer à louer une voiture à laquelle atteler les ânes. Ses amis gémissent mais Gérard leur affirme qu’ils ne manqueront de rien. En effet, chaque soir, ils vont providentiellement rencontrer des prêtres qui les hébergeront et les sustenteront, de sorte qu’ils ont finalement assez d’argent pour louer une carriole. Cette suite de coïncidences est déjà étonnante sans intervention d’En-Haut.
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Quand ils arrivent au Gargan, ils n’ont plus du tout d’argent et il n’existe plus qu’une seule auberge qui pratique des prix prohibitifs. Le temps se gâtant en cette fin septembre, tout le monde est découragé, excepté Gérard. Il reste longtemps dans le sanctuaire, plongé dans une de ces extases dont il est coutumier. Frère Ange, l’un de ses compagnons, dira avoir vu soudain un très beau jeune homme s’approcher de Gérard dans l’église et lui remettre une bourse bien remplie. Si bien remplie, même, qu’il est possible de loger les douze voyageurs à l’hôtel et de les nourrir.
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À la stupeur générale, les pèlerins qui n’ont évidemment rien commandé, ont la surprise de trouver à l’auberge la table déjà garnis. Ils sont bien obligés d’admettre que saint Michel se comporte en hôte d’exception.
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Les interventions providentielles pour résoudre des difficultés matérielles criantes abondent dans la vie des saints, et même dans celle des simples fidèles. Le facteur commun est qu’ils fassent une confiance absolue à la bonté divine et la condition nécessaire, la suivante : « Cherchez d’abord le Royaume des Cieux et sa justice et tout le reste vous sera donné par surcroît. » Ce que qu’applique Gérard jusqu’à sa mort, le 16 octobre 1756.
En savoir plus
Gérard Majella est né à Muro Lucano, au sud de Naples, le 6 avril 1726. Son père est tailleur et lui enseigne son métier mais, dès l’enfance, Gérard est attiré par la vie religieuse. Les jours fériés, sa joie est d’aller avec ses parents visiter les sanctuaires mariaux.
Il a dix ans quand son père meurt ; il devient apprenti chez un tailleur, mais son patron le frappe et le vole sans que Gérard proteste ; il ne proteste pas davantage quand, à l’adolescence, il est accusé par une fille du pays d’être le père de l’enfant qu’elle attend. La coupable finira par avouer son mensonge. Cette accusation subie sans se plaindre est l’une des raisons pour lesquelles Gérard protège les femmes enceintes et les enfants à naître.
Bientôt, il postule chez les capucins, qui le refusent à cause de sa santé fragile. Gérard, sûr de l’appel divin, à 23 ans, postule chez les Rédemptoristes, congrégation récente dont la rigueur le séduit. Malgré sa mauvaise santé, on l’accepte. Il y passera à peine six ans, donnant l’exemple d’une sainteté précoce qui fera de lui le patron de la jeunesse italienne. Il se donne pour devise : « Ici, la volonté de Dieu est faite comme Dieu le veut et aussi longtemps qu’Il le veut. » Il meurt à Caposele à 29 ans, le 16 octobre 1756. Il a été canonisé en 1904.
Spécialiste de l’histoire de l’Église, postulateur d’une cause de béatification, journaliste pour de nombreux médias catholiques, Anne Bernet est l’auteur de plus d’une quarantaine d’ouvrages, pour la plupart consacrés à la sainteté.
Aller plus loin
R.P. Alphonse, Un puissant thaumaturge ; saint Gérard Majella, 1905. Disponible en ligne .
En complément
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Peter Heinegg, Saint Gérard Majella ; writings and spirituality, 2002.
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Les quatre notices biographiques du site Internet Santi e beati, en italien : « San Gerardo Maiella »
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Site officiel du sanctuaire de San Gerardo Maiella .