
L'engagement social de Giuseppe Toniolo s’inspire de l’Évangile
Né à Trévise (Vénétie, Italie) en 1845, Giuseppe Toniolo est laïc, marié, père de sept enfants et professeur d’université. L’œuvre de ce sociologue et économiste, vaste et profonde, magistrale et prophétique, fut un des fondements de la doctrine sociale de l’Église (encyclique de Léon XIII, Rerum novarum, 1891). D’une foi inébranlable, il mit sa vaste érudition au service de la charité chrétienne. Il meurt le 7 octobre 1918, jour de la fête du Rosaire, pratique spirituelle qui l’avait accompagné toute son existence. Il est proclamé bienheureux en 2012.
Les raisons d'y croire
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Giuseppe Toniolo est un intellectuel de haut niveau. Titulaire d’une chaire d’économie politique, son parcours universitaire et la qualité de son enseignement sont admirables. Sa vie montre que la foi chrétienne n’est pas en contradiction avec la raison ou la science, mais peut au contraire l’éclairer. Toniolo a su intégrer foi catholique et rigueur scientifique, démontrant que l’Évangile peut guider la réflexion économique et sociale. Le christianisme n’est donc pas une croyance irrationnelle, mais une foi capable de dialoguer avec les sciences humaines et économiques.
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Toniolo est l’un des pionniers de la doctrine sociale de l’Église. Il défend la justice sociale, la dignité du travailleur et la solidarité entre les classes. Cet engagement social est directement inspiré par l’Évangile, qui, selon lui, peut transformer la société.
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Pour autant, sa vie ne se limite pas à des recherches intellectuelles : Giuseppe veut appliquer concrètement la doctrine sociale de l’Église. En décembre 1889, il fonde à Padoue l’Union catholique d’études sociales, qui, peu après, constitue le premier programme social-chrétien, chargé d’appliquer dans la vie économique et sociale de l’Italie les principes de l’encyclique Rerum novarum. Le futur bienheureux y insiste sur le devoir des dirigeants de venir en aide, dans un esprit de charité, aux ouvriers et aux exclus de la société. Dans cet esprit, il sera l’un des fondateurs de la Fédération universitaire catholique italienne.
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· Sa vie spirituelle est d’une grande profondeur. La prière est toujours à l’origine de ses engagements et de sa charité. Ce qu’il a accompli est le fruit direct de sa foi.
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· Plus d’un siècle après sa mort, la pensée économique et sociale de Toniolo reste actuelle. Il avait anticipé certains thèmes centraux du concile Vatican II et de l’enseignement des papes à venir (notamment Jean XXIII, Jean-Paul II, François). Le prophétisme et la fécondité durable de ses convictions montrent qu’elles étaient enracinées dans une vérité plus profonde que l’opinion humaine passagère : le christianisme.
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· Le miracle de guérison dû à son intercession et qui permit sa béatification témoigne de la sollicitude de Dieu en sa faveur. Dans la nuit du samedi 3 au dimanche 4 juin 2006, à Barbisano (Vénétie, Italie), Francesco Bortolini chute d’une hauteur de quatre mètres. Sa tête heurte le sol avec une violence inouïe. Il est transporté dans un état dramatique à l’hôpital, où les médecins le plongent dans un coma artificiel. Le dimanche 11 juin, tandis que des proches du malade supplient Giuseppe Toniolo, une infirmière glisse une petite image de ce dernier sous l’oreiller du malheureux. Peu après, Francesco se réveille. Sorti de l’hôpital sans aucune séquelle, il est déclaré guéri de manière scientifiquement inexplicable par une commission de cinq médecins.
En savoir plus
Giuseppe Toniolo vient au monde à Trévise le 7 mars 1845, dans une famille de la bourgeoisie vénitienne. Son père est un ingénieur reconnu. Il est scolarisé au pensionnat Sainte-Catherine, à Venise, et poursuit ses études à la faculté de droit de Padoue, où il obtient brillamment son diplôme le 21 juin 1867. L’année suivante, il est nommé assistant à la chaire juridico-politique de l’université de Padoue. En 1873, il soutient sa thèse de doctorat en économie politique.
Nommé en 1874 professeur à l’institut technique de Venise, il commence à publier au fil de ses recherches. En 1878, il obtient la chaire de professeur extraordinaire d’économie politique à l’université de Modène. L’année suivante, il est nommé professeur d’économie politique à l’université de Pise, où il restera jusqu’à sa mort, en 1918.
En 1893, il décide de fonder une revue scientifique, à comité de lecture, pour rendre compte périodiquement des travaux de pointe dans sa spécialité : ce sera la Revue internationale des sciences sociales et des disciplines auxiliaires, qui existe encore aujourd’hui.
Parallèlement, Giuseppe se marie le 4 septembre 1878 avec Maria Schiratti, originaire de Pieve di Soligo. Sept enfants vont naître de cette union.
Malgré des tempéraments différents (Maria est plus intuitive et plus pragmatique que Giuseppe), le couple a une foi incomparable. Les deux époux vont chaque jour à la messe et se confessent régulièrement. Plus que solidaires dans les épreuves, ils forment une famille au sens évangélique, fondée sur la prière, le respect mutuel, la charité et leur vertu commune. À leurs yeux, le sacrement de mariage est une marque d’union à Dieu, et la prière commune garantit stabilité et bonheur pour leur famille.
Cofondateur de la Fédération universitaire catholique italienne, Giuseppe Toniolo s’éteint en 1918. Il laisse une œuvre monumentale et novatrice, qui contribue pour plus d’un siècle à la formulation et au développement de la doctrine sociale de l’Église, en totale conformité avec l’enseignement du Saint-Siège. Ses analyses du concept de démocratie dans une optique chrétienne marquent le point de départ de la démocratie chrétienne en Italie, élément essentiel de la vie publique dans ce pays.
En avril 1918, il tombe malade. Les douleurs physiques deviennent régulières, mais sa foi ne vacille jamais. Les souffrances spirituelles ne le sont pas moins : les horreurs de la Première Guerre mondiale sont pour lui un drame unique dans l’histoire. Sa perception de ce conflit armé est identique à celle du pape Benoît XV. Tous deux s’engagent dans un règlement pacifique des tensions européennes.
Ses derniers jours sont vraiment dignes d’un homme qui a passé sa vie en Dieu. Alité, il obtient du pape qu’on lui prépare un autel pour la célébration de la messe, unissant ainsi quotidiennement son sacrifice à celui du Rédempteur. Il meurt le jour dédié à Notre Dame du Rosaire, à laquelle il était particulièrement dévoué, le 7 octobre 1918.
Il laisse une œuvre universitaire de premier plan qui comporte des dizaines de titres. Son Traité d’économie sociale, en trois volumes, est une œuvre pionnière.
Son procès en béatification débute dès 1933, mais la Seconde Guerre mondiale retarde son cheminement. Il est proclamé vénérable par Paul VI le 7 janvier 1971 et béatifié le 29 avril 2012 par décret du pape Benoît XVI, à l’occasion d’une célébration présidée par le cardinal Salvatore De Giorgi.
Patrick Sbalchiero, membre de l’Observatoire international des apparitions et des phénomènes mystiques.
Au delà
Pionnière sur bien des points, son œuvre impressionne. Dès 1875, il traite de la division du travail (Diverses formes de rémunération du travail) puis, trois ans plus tard, de la distribution des richesses (Le Salaire, 1878-1879). Entre 1881 et 1893, l’histoire domine (La Scolastique et l’humanisme dans les doctrines économiques au temps de la Renaissance en Toscane, 1886-1887 ; L’Histoire comme discipline auxiliaire des sciences sociales, 1890, etc.). Puis il propose des solutions chrétiennes à la crise de 1893, qui frappe les plus modestes : charité entre les classes sociales, obéissance à l’Église, etc. (La Genèse historique de la crise socio-économique actuelle). À partir de 1894, il multiplie réflexions philosophiques et enquêtes historiques (L’Économie capitaliste moderne dans sa fonction et ses effets, 1894 ; Le Concept chrétien de la démocratie, 1897 ; Protection internationale des travailleurs, 1900). Il est aussi un éminent spécialiste du socialisme (Le Socialisme dans l’histoire de la civilisation, 1902, etc.). Les trois premiers volumes de son admirable ouvrage, le Traité d’économie sociale, sont édités entre 1908 et 1921.
Aller plus loin
Domenico Sorrentino, Giuseppe Toniolo : una biografia, Cinisello Balsamo, Edizioni Paoline, 1988.
En complément
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L’article Un saint, un miracle : « Une guérison grâce au bienheureux Giuseppe Toniolo (1845 – 1918) ».
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Aldo Carera, « Toniolo Giuseppe », dans Dizionario biografico degli italiani, vol. 96, Istituto dell’Enciclopedia Italiana, 2019.
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Vera Negri Zamagni, Giuseppe Toniolo, dans Il contributo italiano alla storia del Pensiero : Economia, Roma, Istituto dell’Enciclopedia Italiana, 2012.
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Oreste Bazzichi, Giuseppe Toniolo. Alle origini della dottrina sociale della Chiesa, Turin, Lindau, 2012
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Achille Ardigo, Toniolo : il primato della riforma sociale, Bologne, Cappelli, 1978.
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Cinzio Violante, Il significato dell’opera storiografica di Giuseppe Toniolo nell’età di Leone XIII, dans « Aspetti della cultura cattolica nell’età di Leone XIII », a cura di Giuseppe Rossini, Rome, 1961, p. 707-769.