
Ni hystérique ni folle, Marguerite Ebner est un témoin crédible du Ciel (+1351)
Mystique allemande, Marguerite Ebner naît vers 1291 à Donauwörth (Bavière, Allemagne actuelle), dans une famille noble. Elle devient dominicaine en 1306 au couvent de Medlingen, au diocèse d’Augsbourg. Entre 1312 et 1325, elle souffre d’une maladie qui l’affaiblit physiquement, mais ne l’empêche pas d’approfondir sa vie de prière. Elle est gratifiée de visions du Christ, de l’Enfant Jésus, de la Vierge, messages célestes… En 1332, le père Henri de Nördlingen devient son confesseur ; elle lui confiera toutes les révélations reçues du Ciel. Elle retourne à Dieu le 20 juin 1351 et est béatifiée par Jean-Paul II en 1979.
Les raisons d'y croire
La Vierge Marie apparaît à Marguerite Ebner à plusieurs reprises et la console de ses souffrances physiques et morales. Ces phénomènes sont décrits avec une précision exceptionnelle dans le livre Révélations. Ses propos n’ont rien d’artificiel, d’éthéré ou de désincarné.
Des propos positivistes ou anticléricaux ont pu chercher à qualifier les mystiques catholiques des XIVe et XVe siècles de femmes « illuminées », « hystériques » ou « folles ». Mais tout prouve que la bienheureuse Marguerite Ebner n’appartenait à aucune de ces catégories. Elle est une femme équilibrée, aux facultés cognitives et aux dispositions artistiques évidentes, parfaitement à l’aise dans ses tâches quotidiennes et dans ses relations aux autres et, par-dessus tout, d’une charité inaltérable.
De plus, ses visions n’ont aucun caractère de morbidité et ne ressemblent en rien à des hallucinations psychopathologiques. Au cours de sa vie ou dans ses écrits, personne n’a jamais identifié le moindre signe d’altération de sa perception ou de dissociation mentale. Rien en elle – bien au contraire – ne laisse transparaître un quelconque déséquilibre psychique.
Le livre Révélations de Marguerite Ebner figure comme une des œuvres parmi les plus importantes de la fin du Moyen Âge. La bienheureuse y décrit non seulement son union au Christ et les messages qu’elle reçoit du Ciel, mais également l’histoire et les mœurs de son époque. Ces derniers éléments sont véridiques et corroborés par des témoignages historiques, ce qui participe à crédibiliser l’ensemble de son écrit.
Sa foi est tout entière christologique, c’est-à-dire fondée sur la Bible, les Évangiles et l’enseignement doctrinal de l’Église catholique. Sa dévotion mariale et les messages qu’elle reçoit n’invitent à aucune invention cultuelle, pastorale ou liturgique.
En 1339, elle reçoit les stigmates visibles de la Passion, après avoir enduré des semaines durant des douleurs aux mains, aux pieds et à la tête. Ce phénomène a été observé par des centaines de témoins dignes de confiance.
Nombre de théologiens ont admiré (et admirent) les Révélations, à commencer par les deux auteurs les plus célèbres de l’époque : les dominicains Jean Tauler († 1361), disciple de Maître Eckart, avec lequel Marguerite échange une longue correspondance, et le bienheureux Henri Suso († 1366).
En savoir plus
Marguerite Ebner est née vers 1291 à Donauwörth en Bavière, au sein d’une famille noble. Elle reçoit son éducation dans la maison parentale auprès d’excellents maîtres. Vers 1305, elle entre au couvent des dominicaines de Mödingen, au diocèse d’Augsbourg, où elle prononce ses vœux en 1306.
De 1312 à 1325, elle endure de graves maladies qui la transportent plusieurs fois au seuil de la mort. Cet état de fatigue et de souffrance ne l’empêche cependant pas de prier de jour comme de nuit. Alitée sur son lit de souffrance, elle implore le Christ et médite sur la Passion.
En 1311, sa vie mystique franchit un palier. Elle a cette année-là ses premières visions du Christ souffrant et glorieux, de l’Enfant-Jésus et de la Vierge Marie. Sa patience à l’égard de ses maux physiques et intérieurs est exemplaire. Elle adapte peu à peu sa vie à la volonté de Dieu en pratiquant une ascèse rude et une abstinence alimentaire considérable. Marguerite compose aussi des chants liturgiques et des cantates en l’honneur de la Passion et pour plusieurs fêtes liturgiques.
Dans les années 1320, c’est un nouveau tournant. Elle est contrainte de rejoindre le domicile parental car les moniales de son couvent ont été dispersées lors des affrontements entre les troupes du prince Louis IV le Bavarois et leurs adversaires, les soldats du pape Jean XXII, qui a excommunié son adversaire, qui, lui-même, a nommé un anti-pape !
En 1332, un prêtre diocésain, le père Henri de Nördlingen, devient son confesseur. C’est désormais à cet homme averti, érudit et fin connaisseur de la mystique qu’elle confiera ses visions et autres messages célestes. L’ensemble de ces textes formera un ouvrage entier qui prendra le titre de Révélations. Leur correspondance est la première du genre rédigée en allemand. Marguerite devient connue dans les milieux ecclésiastiques, à l’intérieur mais aussi au-delà de son ordre.
Marguerite Ebner est rappelée par Dieu le 20 juin 1351.
Son procès de béatification s’ouvre à Augsbourg en 1686, mais, pour de multiples raisons, il ne sera rouvert qu’en 1910. Entre-temps, le culte populaire de Marguerite Ebner dure plus de six siècles sans discontinuité. L’examen de ses écrits, commencé dès 1686, dure des années et suscite des analyses et des approfondissements passionnants. Le 14 mars 1952, le Saint-Siège annonce que tous les écrits de Marguerite (les Révélations et sa correspondance) sont pleinement conformes à la doctrine catholique. Elle est béatifiée le 24 février 1979 par Jean-Paul II, après que le souverain pontife a confirmé la dévotion populaire de longue date en faveur de Marguerite, ce qui dispensait de la recherche d’un miracle. Son corps repose aujourd’hui dans une chapelle bâtie en 1755 dans l’église du couvent Sainte-Marie de Medingen.
Patrick Sbalchiero, membre de l’Observatoire international des apparitions et des phénomènes mystiques.
Au delà
Les Révélations ont exercé une belle et solide influence sur la spiritualité catholique depuis le XIVe siècle.
Aller plus loin
Leonard P. Hindsley, Margaret Ebner: Major Works, Paulist Press, 1993.
En complément
Philipp Strauch, Margaretha Ebner und Heinrich von Nördlingen : Ein Beitrag zur Geschichte der deutschen Mystik, Mohr, 1882.
L. Zoepf, Die mystikerin Margaretha Ebner, Berlin, 1914.
S. Ringlet, « Marguerite Ebner », Dictionnaire de spiritualité et de mystique, t. 9, Beauchesne, 1976, col. 338-340.
Sylvie Barnay, « Marguerite Ebner († 1351) », dans René Laurentin et Patrick Sbalchiero, Dictionnaire des apparitions de la Vierge Marie, Paris, Fayard, 2007, p. 586.
Audrey Fella, « Marguerite Ebner, bienheureuse, dominicaine », dans Les Femmes mystiques. Histoire et dictionnaire, Paris, Robert Laffont, Bouquins, 2013, p. 625-626.
La courte notice biographique du site Santi e Beati : « Beata Margherita Ebner ».