
Rome brûle, l’Évangile perdure (64)
En 64, un incendie ravage Rome, et l’empereur Néron est accusé d’en être responsable. Pour se défendre, il rejette la faute sur les chrétiens, pourtant innocents, et lance contre eux une persécution si brutale qu’elle choque même certains païens. Tacite, historien romain, rapporte ces événements dans ses Annales (Livre XV, paragraphe 44). Cet événement montre que les chrétiens étaient déjà nombreux à Rome à cette époque, ce qui confirme les écrits du Nouveau Testament. Leur persécution injuste, accompagnée de tortures atroces, est aussi un puissant témoignage en faveur de la véracité de l’Évangile.
Les raisons d'y croire
Tacite est un historien romain païen, clairement hostile aux chrétiens. Pourtant, il confirme des éléments clés de la foi chrétienne : l’existence historique du Christ et sa condamnation sous Ponce Pilate.
À peine trente ans après la mort de Jésus, une communauté chrétienne est déjà bien installée à Rome, la capitale de l’Empire romain. Cela confirme la diffusion rapide de l’Évangile, relatée dans le Nouveau Testament (particulièrement les Actes des Apôtres et les épîtres).
Les premiers chrétiens ont accepté des souffrances extrêmes et la mise à mort (crucifixion, bêtes sauvages, brûlures) sans renier leur foi. Cette fidélité jusqu’à la mort atteste qu’ils croyaient fermement et sincèrement en la vérité de ce qu’ils annonçaient, ce qui rend peu probable l’idée d’une invention délibérée ou d’un mensonge collectif.
Les apôtres Pierre et Paul, qui ont participé à diffuser la Bonne Nouvelle de Jésus, ont eux aussi subi le martyre à Rome à cette époque. Leur mort renforce la crédibilité de leur témoignage sur la vie, la mort et la résurrection de Jésus.
Cet événement s’inscrit dansla grande « chaîne des martyrs », qui est continue depuis les débuts de l’Église. Depuis la première génération – les témoins directs de la vie de Jésus –, des chrétiens ont accepté de mourir pour leur foi.
En savoir plus
Dans la nuit du 18 au 19 juillet 64, un feu éclate dans les environs du Circus Maximus. Le brasier se propage rapidement, alimenté par la densité des bâtiments et l’absence de mesures de sécurité efficaces. Cela aboutit à l’un des plus importants incendies de Rome. Celui-ci dure six jours, puis reprend de manière sporadique pendant trois jours. Très vite, l’empereur romain, Néron, est mis en accusation. Certains vont même le soupçonner d’avoir lui-même ordonné l’incendie afin de reconstruire Rome selon ses ambitions esthétiques et politiques.
Pour détourner les soupçons qui s’accumulent contre lui, Néron cherche un bouc émissaire. C’est pour cela qu’il accuse la communauté chrétienne de Rome. Il engage alors contre elle une persécution tellement violente qu’elle choque même certains païens, pourtant hostiles aux chrétiens.
Le témoignage le plus contemporain des événements est celui de Tacite, un sénateur et historien romain du Ier siècle (vers 56 – vers 120 apr. J.-C.). Parmi les œuvres qu’il a rédigées, deux sont particulièrement importantes, les Histoires et les Annales. C’est dans ce second ouvrage (Livre XV, paragraphe 44) que se trouve le récit de l’incendie de Rome et de la persécution des chrétiens : « Pour apaiser ces rumeurs, il offrit d’autres coupables, et fit souffrir les tortures les plus raffinées à une classe d’hommes détestés pour leurs abominations et que le vulgaire appelait chrétiens. Ce nom leur vient de Christ, qui, sous Tibère, fut livré au supplice par le procurateur Ponce Pilate. Réprimée un instant, cette exécrable superstition se débordait de nouveau, non seulement dans la Judée, où elle avait sa source, mais dans Rome même, où tout ce que le monde enferme d’infamies et d’horreurs afflue et trouve des partisans.
On saisit d’abord ceux qui avouaient leur secte ; et, sur leurs révélations, une infinité d’autres, qui furent bien moins convaincus d’incendie que de haine pour le genre humain. On fit de leurs supplices un divertissement : les uns, couverts de peaux de bêtes, périssaient dévorés par des chiens ; d’autres mouraient sur des croix, ou bien ils étaient enduits de matières inflammables, et, quand le jour cessait de luire, on les brûlait en place de flambeaux. Néron prêtait ses jardins pour ce spectacle, et donnait en même temps des jeux au Cirque, où tantôt il se mêlait au peuple en habit de cocher, et tantôt conduisait un char.
Aussi, quoique ces hommes fussent coupables et eussent mérité les dernières rigueurs, les cœurs s’ouvraient à la compassion, en pensant que ce n’était pas au bien public, mais à la cruauté d’un seul, qu’ils étaient immolés. »
Ce texte est très important pour plusieurs raisons. Il émane d’un païen, hostile aux chrétiens : on ne peut donc pas le soupçonner de déformer l’histoire en faveur des chrétiens. Il prouve qu’au milieu des années 60, soit à peine trente ans après la mort de Jésus, les chrétiens étaient déjà suffisamment nombreux à Rome pour être clairement identifiés par les autorités politiques et la population. Cela confirme donc les textes chrétiens, notamment les Actes des Apôtres et les épîtres de Paul, qui témoignent de la diffusion de l’Évangile par les disciples de Jésus tout autour de la Méditerranée.
On voit d’ailleurs que Tacite est relativement bien informé, puisque, dans ce texte très court, il mentionne le Christ et situe correctement sa crucifixion, sous l’empereur Tibère et lorsque Ponce Pilate officiait en Judée.
Le fait qu’il y ait tant de personnes qui aient déjà adhéré à l’Évangile en si peu de temps rend hautement improbable sa falsification. Par ailleurs, toutes ces personnes qui sont décédées dans des souffrances atroces ont bénéficié du témoignage de personnes qui ont elles-mêmes vu et connu Jésus. Elles n’ont pu accepter une mort aussi atroce que parce que les disciples de Jésus avaient eux-mêmes donné l’exemple en préférant mourir plutôt que de renier, par leurs paroles ou par leurs actes, l’Évangile. Rappelons que c’est à ce moment, et dans cette même ville, que se situent les martyres de Pierre et Paul.
David Vincent , doctorant en histoire des religions et anthropologie religieuse à l’École Pratique des Hautes Études.
Au delà
L’incendie de Rome en 64 et la persécution des chrétiens sont des événements importants dans l’histoire du christianisme. Cette épreuve douloureuse pour l’Église romaine est en même temps un magnifique témoignage en faveur de la vérité de l’Évangile et un maillon important de la « chaîne des martyrs ».
Depuis le début de l’Église, et à chaque génération, des chrétiens ont accepté de mourir pour leur foi. Les chrétiens romains ont accepté le martyre, car ils ont vu les disciples de Jésus, et notamment les apôtres Pierre et Paul, confirmer eux-mêmes leur prédication par le don de leur propre vie. Or, si les apôtres avaient menti, jamais ils n’auraient été prêts à un tel sacrifice.
Aller plus loin
Catherine Salles, Le Grand incendie de Rome, 64 apr. J.-C. Tallandier, 2024.
En complément
Anne Bernet, Les Chrétiens dans l’Empire romain. Des persécutions à la conversion, Tallandier, 2022.