
Retour de l’anneau de Jeanne d’Arc en France : une affaire providentielle (2016)
Les parents de Jeanne d’Arc offrirent un anneau à leur fille qu’elle porta toute sa vie, le regardant avant chaque bataille et chaque épreuve . Il fut un élément central de son procès lors duquel il lui fut symboliquement confisqué par les Anglais. Apprenant la mise en vente d’un tel anneau par la maison londonienne TimeLine Auctions le 26 février 2016, le Puy du Fou a mobilisé, en quelques jours seulement, de nombreux donateurs qui ont soutenu son initiative. La fondation Puy du Fou Espérance a réussi à acquérir, dans des circonstances providentielles, cette relique de sainte Jeanne d’Arc qui a aussi une importance historique et symbolique pour la France.
Les raisons d'y croire
Des orfèvres, des experts et des spécialistes ont étudié l’anneau et ont révélé plusieurs éléments qui concordent pour valider l’appartenance de l’objet à Jeanne d’Arc (filiation de l’anneau traçable depuis le procès de Jeanne d’Arc jusqu’aux vendeurs en 2016, matériau, poinçons, chanfreinage, gravures...).
L’anneau a été remporté aux enchères pour un peu moins de 380 000 euros. À cela s’ajoutent différentes taxes ; la somme à payer est finalement 397 026 euros. Or, il s’agit du montant exact, à l’euro près, qui avait été rassemblé grâce aux dons pour préparer l’enchère.
Le gouvernement britannique a demandé le retour de l'anneau sur le sol d’Angleterre, car le conseil national des Arts considère que l'anneau pourrait faire partie des « objets de haute valeur symbolique du patrimoine national britannique » et qu'à ce titre, il ne peut quitter le territoire. Mais la chance sourit à nouveau au Puy du Fou : par un rebondissement inespéré faisant intervenir la Reine d’Angleterre, The Art Council finalement cède. « Tout est rentré dans l’ordre, monsieur. Vous pouvez garder l’anneau. »
Au soir du 4 mars 2016, alors que la relique de sainte Jeanne d’Arc vient de rentrer en France, la vendéenne Sonia Drapeau vit une conversion fulgurante au Puy du Fou, au moment où elle touche l’anneau . Alors athée, elle est bouleversée par l’irruption du surnaturel dans sa vie et débute un cheminement intérieur vers le Christ.
En savoir plus
Un mercredi soir de février 2016, mon père reçoit un appel d’un ami historien et avocat, Jacques Trémolet de Villers : l’anneau de Jeanne d’Arc va être vendu aux enchères à Londres dans deux jours, le vendredi 26 février. Mon père raccroche. J’attrape mon téléphone : « Jacques, expliquez-moi tout ! »
Confisqué par les Anglais au moment de son procès, l’anneau de Jeanne d’Arc s’est transmis de génération en génération, a été vendu deux fois, et finit par faire l’objet d’une vente aux enchères, qui doit débuter autour de 40 000 euros. « A-t-on des preuves qu’il s’agit bien de l’anneau de Jeanne ? — Tout le prouve, mais il faut vérifier les papiers qui l’accompagnent. »
Je passe toute la soirée à appeler quelques personnes fortunées pour récolter des promesses de don. Aucune n’hésite. Toutes, sans exception, tiendront parole. Le jeudi matin, je téléphone à un avocat de bonne réputation à Londres. Il envoie un photographe à la maison de vente aux enchères Timeline Auctions. Je récupère ainsi tous les documents liés à l’anneau, et les transfère à plusieurs historiens. Ils sont confiants sur son authenticité. Depuis le procès de Jeanne dans lequel elle mentionne clairement son anneau volé par les Anglais, on peut en suivre la trace jusqu’à nos jours. C’est donc bien l’anneau de la Pucelle qui est à vendre à Londres le lendemain.
À grand renfort d’appels eux-mêmes relayés, je parviens à lever la somme exacte de 397 026 euros de promesses de don. Je m’engage à ne pas dépasser ce montant, quelle que soit la tournure de l’enchère. Si la Providence le veut, nous gagnerons. Sinon, c’est que l’anneau de la Sainte est appelé à un autre destin.
Vendredi 26 février. Il est midi. L’enchère commence. Je suis en visioconférence avec mon avocat qui, lui, est dans la salle de vente. Les acheteurs viennent du monde entier, présents ou par téléphone comme moi. Très vite, le prix s’envole. Je laisse l’enchère s’essouffler. Les acheteurs abandonnent un à un. L’enchère atteint alors les 300 000 euros quand il ne reste qu’un acheteur. C’est là que je sors du bois. Mon plafond financier n’est pas si loin, mais je peux enchérir. L’adversaire est tenace. Je lui montre ma détermination. La chance me sourit : l’avocat qui me représente est aussi celui du gouvernement français. L’autre acheteur le sait. Il perd confiance, craignant des poches étatiques trop profondes pour lui. Il me laisse la main à 360 000 euros. Le marteau frappe : adjugé, vendu ! Mon avocat coupe la ligne, il doit signer les papiers officiels sur-le-champ, c’est la règle. Pendant vingt minutes, j’attends la confirmation de notre victoire, inquiet du montant des taxes qui vont s’ajouter mécaniquement au prix de vente. L’avocat me rappelle enfin et m’annonce le prix, toutes taxes comprises : 397 026 euros. La somme exacte qu’avec toutes les promesses de dons, des plus généreuses aux plus modestes, j’ai inscrite sous mes yeux comme le plafond à ne pas franchir. A l’euro près, la somme que j’ai levée en 36 heures à peine. Je suis sous le choc, bouleversé. Mon avocat n’en revient pas non plus.
L’anneau est alors placé dans un coffre. Durant le week-end, des articles de presse paraissent en France et en Angleterre sur le mystérieux acheteur de l’anneau de Jeanne d’Arc. Le gouvernement français avoue vite n’avoir pas osé prendre part à l’enchère, et nous ne nous sommes pas encore dévoilés. Le lundi, mon avocat m’appelle. « Le Conseil National des Arts anglais va retenir l’anneau en Angleterre, au motif qu’il est un trésor national. — J’arrive ! »
Le lendemain matin, je saute dans un petit avion privé, avec un ami photographe. Je récupère l’anneau au coffre, prétextant vouloir seulement faire des photos dans la capitale anglaise. Avec deux gardes du corps imposés par l’administration anglaise, je pose dans Londres devant l’objectif du photographe. Trente minutes plus tard, je file vers l’aéroport où l’avion est prévenu. J’ai décroché les gardes du corps. Le pilote sait qu’il faudra décoller sans trop de formalités. Je montre à la douane locale, la même mallette qu’à l’aller. Rien à déclarer. A little joke et l’affaire est dans le sac. À l’instant de décoller, je donne le feu vert à mon équipe en France : la presse est prévenue et m’attendra sur le tarmac français. Après six cents ans passés en Angleterre, l’anneau de Jeanne d’Arc est de retour sur le sol de France. Les médias s’échauffent, c’est le buzz. La France entière apprend la nouvelle et vibre avec nous.
Le mercredi suivant, le Conseil National des Arts anglais m’appelle. « Monsieur, l’anneau ne peut quitter le territoire britannique sans une autorisation que vous n’avez pas. — Envoyez-moi les papiers, je les signerai. — Hors de question. Vous devez rapporter l’anneau et signer les papiers sur notre sol. Il s’agit d’un trésor national anglais. »
J’appelle le ministère de la Culture, le ministère des Affaires étrangères, personne ne veut m’aider. Le gouvernement français ne régularisera pas les papiers de la citoyenne Jeanne d’Arc, il ne la connaît pas. Le vendredi qui suit débarquent dans mon bureau deux officiers de Scotland Yard. Du pur cinéma ! Ils m’interrogent. Je leur réponds d’un ton qui se veut solennel. « Écoutez, l’anneau, je ne l’ai plus. Je l’ai égaré. — C’est très embêtant ça, Monsieur. — Indeed ! »
Ils repartent bredouilles, en m’assurant que l’affaire va se corser si je n’obtempère pas. Je ne sais pas ce que je risque, mais je sens qu’ils ne plaisantent pas. Me voilà seul face à l’État anglais. David contre Goliath. Il me faut une fronde. Je décide de contacter le meilleur avocat du moment, maître Dupont-Moretti. « Votre seul espoir, c’est la Reine », me dit-il.
Je n’ai pas le choix. De ma plus belle plume, j’écris à la reine Élisabeth II et mentionne le vœu de son aïeule, la reine Victoria, qui était favorable à ce que l’anneau rentre en France.
Les semaines passent, pas de réponse. Le Conseil National des Arts me harcèle. Scotland Yard durcit le ton. Jusqu’au jour où je reçois une lettre de Buckingham Palace. La secrétaire particulière de la Reine me répond, en s’excusant du retard avec beaucoup de délicatesse. Elle donne son verdict : « La Reine ne se mêle pas de ce genre d’affaires. Elle a néanmoins fait savoir aux autorités concernées qu’elle trouvait votre requête légitime. » Manière toute anglaise, empreinte d’une élégance diplomatique millénaire, de libérer définitivement l’anneau des griffes de l’administration britannique. Le lendemain, je reçois un appel du Conseil National des Arts qui a mené contre moi, pendant des semaines, une guerre psychologique bien légitime. Il m’annonce avec fairplay que l’affaire est soldée, et les papiers finalement en règle. Un battement de cil royal a suffi.
C’est ainsi que le Puy du Fou est devenu l’humble dépositaire d’un trésor français : l’une des seules reliques (en plus de trois lettres signées de sa main) de la plus grande sainte de notre histoire et de notre chef de guerre le plus étincelant. Depuis, l’anneau de Jeanne voyage partout en France, sous bonne garde. Car si le Puy du Fou en a reçu la charge, il appartient à la nation tout entière. L’anneau est la propriété affective et symbolique du peuple français. Il est désormais le seul objet témoin de la plus extraordinaire chanson de geste de l’histoire des hommes, l’épopée johannique.
Nicolas de Villiers, Président de Puy du Fou France, raconte en détail l’incroyable épopée du retour en France de l’anneau de Jeanne d’Arc qui, après six cents ans passés en Angleterre, a retrouvé sa patrie en 2016.
Au delà
L’État français et la mairie d’Orléans savaient que l’anneau de Jeanne d’Arc allait être vendu aux enchères à Londres. Le spécialiste de la sainte, Olivier Bouzy, avait conseillé de rester prudent et de ne pas intervenir car il y avait un doute concernant l’origine de l’anneau. De fait, l’authenticité d’un objet si vieux n’est pas aisée à prouver de façon certaine. Cependant, dans le cas de l’anneau acheté par le Puy du Fou, différents arguments soutiennent de façon très convaincante la thèse qui fait de cet objet une relique de sainte Jeanne d’Arc.
La filiation : l’anneau reste dans la famille du duc de Bedford (qui parfois change de nom) pendant très longtemps. Au XIXe siècle, l’anneau est vendu à une riche famille, puis dans les années 1920, un industriel anglais l’achète pour sa femme. L’anneau reste dans cette famille jusqu’à la vente aux enchères de 2016.
Le matériau et les poinçons prouvent que l’objet a été créé dans la région de Domrémy (ce sont en effet les parents de Jeanne qui lui avaient offert).
Le chanfreinage de l’anneau témoigne de son authenticité
Les lettres IHS (pour Jésus) et MAR (pour Maria) sont gravées dans l’anneau, ce sont les mêmes que celles qui étaient inscrites sur l’étendard de Jeanne.
L’anneau est argenté avec des traces d’or, ce qui abonde dans le sens de Jeanne qui dira à son procès : « Et s’il est d’or, il n’est pas de fin or. »
Aller plus loin
Sur le blog du Puy du Fou, l’article du 4 mars 2016 « Le Puy du Fou reprend l’anneau de Jeanne d’Arc aux Anglais ».
En complément
L’article du Figaro « Londres réclame le retour de l'anneau de Jeanne d'Arc après son rachat par le Puy du Fou »
Le dossier complet du site Montjoy.net sur le sujet, qui donne la description de la bague de Jeanne d’Arc, des photos de celles achetée en 2016, rend compte des éléments de Timeline Auction, du Puy du fou, des retranscriptions du Procès de Rouen, des propos des historiens Olivier Bouzy, Colette de Beaune et Philippe Contamine.
Divers reportages vidéo sur l’arrivée de l’anneau au Puy du Fou sont disponibles en ligne.
Les articles 1000 raisons de croire « Jeanne d’Arc, la plus belle histoire du monde », « Sainte Marguerite d’Antioche apparaît à Jeanne d’Arc pour la préparer à sa mission ».