
Notre Dame du Pilier vient redonner courage à l’apôtre Jacques à Saragosse (40)
Vers l’an 40, l’apôtre Jacques le Majeur , parti évangéliser la péninsule ibérique, implore Dieu au bord de l’Èbre, près de Saragosse (Espagne). La Vierge Marie lui apparaît : elle l’encourage à poursuivre ses efforts et à mener à bien sa mission d’évangélisation, car Dieu, lui assure-t-elle, maintiendra toujours la foi chrétienne sur le sol espagnol. Les fruits spirituels et humains de la venue de Marie à Saragosse sont clairement visibles depuis vingt siècles. Un pèlerinage est né autour de la dévotion de Marie, vénérée en ce lieu sous le vocable de Notre Dame du Pilier en raison de l’objet sur lequel elle est apparue. Le sanctuaire est aujourd’hui le plus important du nord de l’Espagne. La « Virgen del Pilar » est fêtée le 12 octobre et le 2 janvier à Saragosse.
Les raisons d'y croire
Vers l’an 40 de notre ère, Marie vit à Éphèse (Turquie actuelle). Les annales de la mystique chrétienne montrent qu’une sainte ou un saint (a fortiori la Vierge Marie) peut, avec l’aide de Dieu, être sujet à des bilocations : se trouver réellement en deux endroits simultanément. C’est très vraisemblablement l’explication de la présence de la Mère de Dieu à cette époque à Saragosse.
Malgré la faiblesse quantitative des sources écrites au commencement des faits, il est indéniable que la basilique du Pilier à Saragosse est le plus ancien sanctuaire marial du monde. Nous savons aussi que le pèlerinage de Saragosse prend une grande ampleur dès le tournant du IIe siècle. Enfin, la présence de saint Jacques le Majeur en Espagne, au Ier siècle, est attestée (cf. Breviarium apostolorum, rédigé au VIe siècle).
Il est difficile de nier en bloc les faits de Saragosse : incontestablement, si l’apparition n’avait pas existé, il serait plus que surprenant qu’un pèlerinage de cette dimension ait vu le jour, de surcroît dans une Espagne encore presque totalement païenne.
Notre Dame du Pilier est vénérée sans interruption depuis deux millénaires. Le pèlerinage a survécu aux guerres, à la présence musulmane, aux invasions…
La papauté veilla à confirmer et établir l’authenticité des lieux à plusieurs reprises. Le pape Innocent III († 1216) mandata douze cardinaux pour qu’ils enquêtent sur place et analysent toutes les sources disponibles. Le 7 août 1723, la Congrégation des rites confirma le miracle de Notre Dame du Pilier. Plus récemment, en 1987, le pape Jean-Paul II s’est exprimé en ces termes : « Ce sanctuaire vénérable […] est un symbole grandiose de la présence de Marie depuis le début de la prédication de la Bonne Parole sur la péninsule Ibérique. »
L’intercession de Marie sous le vocable « Notre Dame du Pilier » est visible depuis vingt siècles, et les miracles recensés par les autorités locales depuis les premières générations de chrétiens rendent compte de l’universalité du phénomène. Au XIVe siècle, par exemple, la guérison miraculeuse de la reine de France, Blanche de Navarre († 1398), par l’intercession de Notre Dame du Pilier, eut un retentissement invraisemblable.
En 1640, le miracle dit de Calenda, du nom d’une agglomération voisine de Saragosse, en est un autre exemple. Ce miracle est enregistré sous la forme d’un document judiciaire rédigé devant les autorités compétentes. Miguel Pellicer, amputé d’une jambe et réduit à la mendicité, demande l’aide de Notre Dame du Pilier. Une nuit, sa jambe repousse miraculeusement.
En août 1936, pendant la guerre civile espagnole, des républicains bombardent spécifiquement l’église du sanctuaire, mais, fait mystérieux, les lieux sont préservés. Quatre bombes sont larguées d’un avion. L’une tombe dans l’Èbre, une autre sur la Plaza del Pilar et deux à l’intérieur de l’église, mais aucune d’elles n’explose ni ne cause de dommages sérieux. Deux de ces bombes sont exposées de nos jours sur les piliers de l’église.
De très grandes mystiques ont eu des révélations privées, en particulier sous forme de visions très précises, qui corroborent l’apparition de la Vierge Marie à Saragosse. C’est notamment le cas de Marie d’Agréda († 1665) et de la bienheureuse Anne-Catherine Emmerich († 1824) .
En savoir plus
Vers l’an 40, l’apôtre saint Jacques le Majeur, « fils de Zébédée », vient évangéliser la péninsule ibérique. Là, il fait face à des difficultés de tous ordres et mesure bientôt que les choses ne se passeront pas comme il l’avait d’abord envisagé. Au bout d’un moment, il sent même son courage diminuer.
Un jour, au bord de l’Èbre, la Vierge Marie lui apparaît debout sur une colonne de marbre rose de cent soixante-dix centimètres de haut et de vingt-quatre centimètres de diamètre, dans « un grand halo de lumière » : c’est Notre Dame du Pilier. « Il entendit des voix d’anges qui chantaient : "Je vous salue, Marie, pleine de grâce…" Il s’agenouilla tout de suite et il vit la Vierge Mère de Notre Seigneur… »
Elle l’encourage à prendre la parole devant les habitants pour les aider à se convertir et à montrer lui-même l’exemple. Elle lui promet enfin que la foi en son fils Jésus ne disparaîtra jamais en Espagne.
Saint Jacques fait construire quelque temps après une petite chapelle sur le lieu de l’apparition. Elle abrite une image miraculeuse de Marie. Le premier sanctuaire marial est né. Puis l’apôtre reprend le chemin de Jérusalem, où il meurt en 44, décapité par Hérode Agrippa. Il est le premier apôtre à mourir pour sa foi.
Depuis lors, les pèlerins de toute l’Europe, puis du monde entier, se rendent à Saragosse pour vénérer la Mère de Dieu sous le vocable de Notre Dame du Pilier. Des édifices successifs remplacent la chapelle originelle. À partir de 1118, le roi d’Aragon Alphonse Ier fait bâtir un édifice roman duquel il ne subsiste aujourd’hui qu’un seul tympan. En 1434, après qu’un violent incendie a ravagé cette église romane, on prend la décision de reconstruire à sa place un édifice gothico-mudéjar, dont le chantier n’est achevé qu’en 1515. Une statuette de Notre Dame du Pilier, de trente-huit centimètres de hauteur, y est conservée, dans l’une des chapelles qui donnent sur le cloître.
En 1638, le nombre des personnes fréquentant le sanctuaire ne cessant de croître, les autorités ecclésiastiques organisent un concours d’architecture en vue d’ériger une nouvelle église, encore plus belle et plus vaste que la cathédrale Saint-Sauveur de Saragosse, alors le plus grand monument religieux de la région. Le nouveau chantier est ouvert en 1681 sur décision de Jean de Habsbourg, qui confie le projet aux architectes Francisco Herrera Hidestrosa et Felipe Pérez. Ces derniers imaginent un édifice baroque monumental. Il faudra près de soixante-quinze ans pour que soit achevé le seul gros-œuvre. Couronnée de onze coupoles, cette église mesure cent trente mètres de long, pour soixante-sept de large.
Parallèlement, l’architecte Ventura Rodriguez se voit confier le soin de reconstruire la chapelle qui conserve l’image miraculeuse. Celle-ci est achevée seulement en 1765.
En 1771, Goya peint une partie des fresques du bâtiment baroque (Adoration du nom de Dieu), puis la fresque Regina martyrum (« la Reine des martyrs ») sur une des coupoles. Les fresques du plafond sont exécutées de 1775 à 1781 par Francisco Bayeu.
Le XIXe siècle parachève les travaux. En 1872, la couverture est enfin terminée, ainsi que la coupole centrale. Quant aux trois autres tours, elles sont élevées seulement en 1907 et 1961.
Après la reconnaissance officielle de l’apparition mariale de Saragosse en 1723, le pape Innocent XIII fixe la date du 12 octobre comme jour pour célébrer la Vierge du Pilier (c’est un 12 octobre que fut célébrée la première messe après la récupération de Saragosse aux armées musulmanes). En 1730, le pape Clément VII permet aussi que la fête de Notre-Dame du Pilier soit célébrée à travers tout le royaume d’Espagne.
Patrick Sbalchiero, membre de l’Observatoire international des apparitions et des phénomènes mystiques.
Au delà
Le sanctuaire marial de Saragosse est devenu une importante destination de pèlerinage, attirant chaque année des millions de visiteurs des cinq continents.
Aller plus loin
G. Bonano, « Las Apariciones de la Virgen Maria y la Liturgia », dans Las Apariciones Marianas en la vida de la Iglesia. Estudios Marianos, vol. 52, Salamanque, 1987, p. 135-138.
En complément
Ortiz Garcia, « Pilar (Virgen del) », Nuevo Diccionariode Mariologia, Madrid, Éd. Paulines, 1988, col. 1615-1623.
Les articles d’Aleteia : « Notre-Dame du Pilar : l’histoire méconnue de la bilocation de la Vierge » et « Le jour où l’apôtre Jacques, découragé, reçut à Saragosse la visite de la Vierge ».
Dans l’Encyclopédie Mariale, l’article : « Saragosse : El Pilar ».