Je m'abonne
Les apparitions et interventions mariales
Paris
Nº 383
Nuit du 18 au 19 juillet 1830

La nuit extraordinaire de sœur Labouré (1830)

Il est onze heures et demie, le soir du 18 juillet 1830, au noviciat des Filles de la Charité, 140, rue du Bac, à Paris. Entrée dans la maison le 21 avril, à vingt-quatre ans, sœur Catherine Labouré dort, de même que ses compagnes, dans le dortoir commun. Soudain, elle est réveillée par une voix enfantine qui lui dit : « Ma sœur, levez-vous en diligence et venez à la chapelle : la Sainte Vierge vous attend ! » Bien que le règlement interdise le lever en pleine nuit, sauf malaise, Catherine s’habille et suit le mystérieux petit garçon qui se tient à son chevet et dont elle a aussitôt su qu’il était son ange gardien. Sur leur passage, les lampes, éteintes à l’heure du couvre-feu, se rallument, les portes verrouillées au moment du coucher s’ouvrent dès que le guide céleste les effleure. Pourtant, cela ne réveille pas la communauté. Comme l’a dit l’ange : « Ne craignez rien ! Tout le monde dort bien » et, comme il l’a promis, après une brève attente, la Sainte Vierge apparaît. Pendant plus de deux heures, Catherine parle avec la Mère de Dieu.


Les raisons d'y croire

  • Ayant déjà eu des songes prémonitoires, Catherine fait parfaitement la différence entre rêve et réalité. D’ailleurs, elle ne pourra pas se rendormir de la nuit et la cloche du réveil la trouvera assise sur son lit. Tout au long de l’événement, elle conserve un comportement et des réflexions rationnels, s’inquiétant d’être surprise et conservant son sens critique devant les faits extraordinaires dont elle est témoin, attentive au moindre petit détail réaliste.

  • L’apparition de son ange gardien, qui la conduit à la chapelle et la ramène au dortoir sous les traits d’un petit enfant, laisse peu de place à l’hypothèse d’une invention, car une mythomane ou une menteuse se représenterait un ange selon l’image la plus répandue : sous les traits d’un jeune homme. L’ange-enfant n’apparaît que dans les visions de sainte Françoise Romaine, au XIVe siècle, mystique dont Catherine, quasi illettrée, n’a jamais entendu parler.

  • Un autre facteur, inconnu de Catherine mais qui va dans le sens de l’authenticité, est que ce qui lui arrive ressemble beaucoup au récit de la libération de l’apôtre Pierre, enfermé dans la prison de Jérusalem par Hérode, tel que raconté dans les Actes des Apôtres ( Ac 12,1-19 ).

  • Lorsque Notre Dame entre dans la chapelle et s’assoit dans le fauteuil, au pied de l’autel, Catherine hésite à la reconnaître, car elle ne ressemble à aucune représentation de la Sainte Vierge qu’elle connaisse, et cela la déconcerte. Cela aussi rend très improbable la possibilité qu’elle ait imaginé cette rencontre.

  • Pendant plus de deux heures, Catherine aura un contact physique avec Marie, « la touchant » comme une personne réelle, en chair et en os, ainsi qu’elle ne cessera de l’affirmer.

  • Le long enseignement que lui dispense Notre Dame s’accompagne, pour que Catherine soit crue, de prophéties concernant l’avenir de la France. La Vierge donne plusieurs détails qui seront vérifiés au sujet de la révolution de Juillet 1830 et de la Commune de Paris, autant de garanties d’authenticité.

  • Dernier signe du caractère miraculeux de son expérience, Catherine gardera le secret absolu sur les apparitions (n’en parlant qu’au père Aladel), cachant à son entourage pendant quarante-six ans qu’elle est la religieuse, anonyme mais connue dans le monde entier, qui a vu la Sainte Vierge et reçu la célèbre médaille miraculeuse. À la place de cette reconnaissance, elle accepte d’être simplement « la sœur du poulailler ». Ce silence héroïque plaidant mieux que tout en faveur de la réalité des apparitions de 1830.


En savoir plus

Née le 2 mai 1806 à Fain-lès-Moutiers, en Bourgogne, Catherine Labouré, bien qu’appartenant à une riche famille de notables ruraux, reste analphabète jusqu’à l’âge de dix-huit ans, son père ne jugeant pas utile de payer des études à ses filles. Depuis la mort de sa mère, en 1815, elle porte seule le poids de la ferme familiale et l’éducation de ses cadets, dont un handicapé, soutenue par une piété qui irrite son père, opposé à sa vocation religieuse et qui y mettra tous les obstacles possibles. Plusieurs phénomènes extraordinaires l’ayant convaincue, en dépit de ses réticences primitives, qu’elle doit entrer chez les Filles de la Charité, Catherine triomphera de toutes les difficultés de manière providentielle.

Les apparitions de la Sainte Vierge, qu’elle a élue pour mère adoptive après la mort de la sienne, seront loin de convaincre son confesseur, le père Aladel, qui redoute d’avoir affaire à une folle ou une manipulatrice et qui ne les admettra qu’après une longue observation de cette jeune fille, décrite comme sans imagination et nullement exaltée. Cantonnée, en raison de sa faible éducation, de ses origines paysannes et de la très faible dot accordée par sa famille, dans des tâches ingrates et subalternes, sœur Catherine Labouré se montre admirable dans chaque geste de son humble quotidien au sein d’un asile de vieillards et protège farouchement son anonymat, refusant les avantages qu’elle aurait retirés de sa notoriété si elle avait dit être la « sœur de la médaille miraculeuse ».

Si les apparitions cessent en décembre 1830, Catherine continue toute sa vie à recevoir des locutions célestes, à faire des rêves inspirés, et à prophétiser l’avenir, prédisant entre autres, en mai 1871, que l’hospice et la communauté des Filles de la Charité de Reuilly échapperont aux violences de communards, ce qui se révélera exact, alors que ceux-ci se déchaîneront contre les autres maisons religieuses de ce quartier populaire.

Catherine Labouré meurt le 31 décembre 1876. Ce n’est qu’après sa mort que l’on révélera publiquement sa miraculeuse histoire. Elle a été canonisée en 1947.

Spécialiste de l’histoire de l’Église, postulateur d’une cause de béatification, journaliste pour de nombreux médias catholiques, Anne Bernet est l’auteur de plus d’une quarantaine d’ouvrages pour la plupart consacrés à la sainteté.


Au delà

Cette première apparition mariale, le 19 juillet 1830, sera suivie de deux autres, liées à la révélation de la médaille miraculeuse, le 27 novembre 1830, puis début décembre, à une date dont Catherine ne se souviendra pas précisément.


Aller plus loin

Edmond Crapez, La Vénérable Labouré, 1910.


En complément

  • Abbé René Laurentin, Catherine Labouré et la médaille miraculeuse, 1979 et Vie authentique de Catherine Labouré, 1980.

  • Lucien Misermont, Les Grâces extraordinaires de la bienheureuse Catherine Labouré, Lecoffre, 1934.

  • Colette Yver, La Vie secrète de Catherine Labouré, Éditions Spes, 1935.

  • Anne Bernet, La Vie cachée de Catherine Labouré, Perrin,2001.

  • L’article 1 000 raisons de croire : «  Catherine Labouré et la médaille miraculeuse  ».

Sur le même thème, la rédaction vous conseille :
Précédent
Voir tout
Suivant