
Première lecture
En ces jours-là, devant le peuple, Pierre prit la parole : « Hommes d’Israël, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu de nos pères, a glorifié son serviteur Jésus, alors que vous, vous l’aviez livré, vous l’aviez renié en présence de Pilate qui était décidé à le relâcher. Vous avez renié le Saint et le Juste, et vous avez demandé qu’on vous accorde la grâce d’un meurtrier. Vous avez tué le Prince de la vie, lui que Dieu a ressuscité d’entre les morts, nous en sommes témoins. D’ailleurs, frères, je sais bien que vous avez agi dans l’ignorance, vous et vos chefs. Mais Dieu a ainsi accompli ce qu’il avait d’avance annoncé par la bouche de tous les prophètes : que le Christ, son Messie, souffrirait. Convertissez-vous donc et tournez-vous vers Dieu pour que vos péchés soient effacés. »
Psaume
Sur nous, Seigneur, que s’illumine ton visage !
Quand je crie, réponds-moi, Dieu, ma justice ! Toi qui me libères dans la détresse, pitié pour moi, écoute ma prière !
Sachez que le Seigneur a mis à part son fidèle, le Seigneur entend quand je crie vers lui. Beaucoup demandent : « Qui nous fera voir le bonheur ? » Sur nous, Seigneur, que s’illumine ton visage !
Dans la paix moi aussi, je me couche et je dors, car tu me donnes d’habiter, Seigneur, seul, dans la confiance.
Deuxième lecture
Mes petits enfants, je vous écris cela pour que vous évitiez le péché. Mais si l’un de nous vient à pécher, nous avons un défenseur devant le Père : Jésus Christ, le Juste. C’est lui qui, par son sacrifice, obtient le pardon de nos péchés, non seulement des nôtres, mais encore de ceux du monde entier. Voici comment nous savons que nous le connaissons : si nous gardons ses commandements. Celui qui dit : « Je le connais », et qui ne garde pas ses commandements, est un menteur : la vérité n’est pas en lui. Mais en celui qui garde sa parole, l’amour de Dieu atteint vraiment la perfection.
Évangile
Alléluia. Alléluia. Seigneur Jésus, ouvre-nous les Écritures ! Que notre cœur devienne brûlant tandis que tu nous parles. Alléluia.
En ce temps-là, les disciples qui rentraient d’Emmaüs racontaient aux onze Apôtres et à leurs compagnons ce qui s’était passé sur la route, et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain. Comme ils en parlaient encore, lui-même fut présent au milieu d’eux, et leur dit : « La paix soit avec vous ! » Saisis de frayeur et de crainte, ils croyaient voir un esprit. Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous bouleversés ? Et pourquoi ces pensées qui surgissent dans votre cœur ? Voyez mes mains et mes pieds : c’est bien moi ! Touchez-moi, regardez : un esprit n’a pas de chair ni d’os comme vous constatez que j’en ai. » Après cette parole, il leur montra ses mains et ses pieds. Dans leur joie, ils n’osaient pas encore y croire, et restaient saisis d’étonnement. Jésus leur dit : « Avez-vous ici quelque chose à manger ? » Ils lui présentèrent une part de poisson grillé qu’il prit et mangea devant eux. Puis il leur déclara : « Voici les paroles que je vous ai dites quand j’étais encore avec vous : “Il faut que s’accomplisse tout ce qui a été écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes. ” » Alors il ouvrit leur intelligence à la compréhension des Écritures. Il leur dit : « Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait, qu’il ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, et que la conversion serait proclamée en son nom, pour le pardon des péchés, à toutes les nations, en commençant par Jérusalem. À vous d’en être les témoins. »
Méditer avec les carmes
Une fois de plus le Ressuscité prend l’initiative.
La présence de Jésus n’est pas le fruit d’une déduction intellectuelle des Apôtres ni d’une autosuggestion ; elle n’est pas la projection imaginaire de leur désir de le revoir, ni une hallucination collective de la fraternité chrétienne désemparée. Ce ne sont pas les disciples qui s’imaginent ou se persuadent que Jésus est présent pour combler le vide affectif laissé par son absence : c’est Jésus qui manifeste sa présence, librement, volontairement, comme il veut et quand il veut.
Et cela reste vrai quotidiennement de notre expérience spirituelle. Il n’est pas en notre pouvoir de créer à volonté en nous-mêmes un sentiment de la proximité de Jésus ; et jamais une surchauffe du cœur humain dans la prière ne nous donnera des évidences immédiates qui nous dispenseraient de croire et d’espérer. C’est toujours Jésus qui a l’initiative et qui se manifeste comme vivant, en chacun de nous comme au milieu de nous tous ; et même l’Eucharistie n’abolit pas forcément toute impression d’absence, car entre le sacrement visible et la réalité invisible il n’y a pas d’immédiateté totale. Un espace reste ouvert, qui est celui de la foi.
Ce soir-là, il est vrai, Jésus a tout fait pour aider les disciples à le reconnaître :
« Voyez, regardez, mes mains, mes pieds ; constatez cette chair, ces os ». « Touchez-moi ; rendez-vous compte par vous-mêmes ; prenez des preuves tangibles ».
Et même, Jésus exprès reprend contact avec les choses de notre univers : il mange devant tous un morceau de poisson.
Mais tous ces gestes ne font que traduire extérieurement deux mots essentiels que prononce Jésus : « C’est moi ; c’est bien moi ! » Ce qui veut dire : « Moi, le Ressuscité qui vous parle, je suis Jésus de Nazareth. Moi, le Nazaréen, je suis le Seigneur pour aujourd’hui et pour l’avenir ».
Ainsi, en traversant la mort, Jésus est resté le même, bien qu’il vive différemment ; et ce lien entre le passé et le présent est essentiel au message de Pâques. Jésus souligne le lien vital qui existe entre son passé d’humilité et de souffrance et son aujourd’hui de gloire, entre le mystère de son passage pascal et les promesses répétées de Dieu dans l’ancienne alliance. En ouvrant l’esprit des disciples à l’intelligence des Écritures, il leur découvre la cohérence du dessein de Dieu, la divine sagesse de la folie du Père, et par là même il nous révèle le sens de notre propre destin de consacrés : la reconnaissance du ressuscité permet la reconnaissance de nous-mêmes comme serviteurs souffrants promis à la résurrection.
Mais cette lumière nouvelle qui transfigure notre existence personnelle est destinée également à illuminer le destin du monde. Et c’est pourquoi, comme pour Marie de Magdala près du tombeau, comme pour les deux voyageurs d’Emmaüs, cette nouvelle rencontre du Ressuscité débouche pour les Onze sur une mission nouvelle. « C’est vous, dit Jésus, qui êtes témoins de tout cela ».
C’est nous qui sommes témoins... Témoins que les souffrances du Messie ont eu un sens. Témoins que la résurrection de Jésus donne sens à toute l’histoire humaine. Témoins de la conversion nécessaire pour le pardon de Dieu et pour la vie authentique.
Non pas seulement témoins de méthodes psychologiques ou sociales ; non pas seulement témoins de recettes pour une personnalité harmonieuse ou témoins de notre désir d’ouverture au monde ; mais témoins, dans ce monde et pour ce monde, de Jésus, crucifié et ressuscité.