La dignité des pauvres, le jeûne (St Grégoire de Nysse)
Saint Grégoire de Nysse nous invite à reconnaître en chaque pauvre la présence même du Christ, appelant à un amour concret et généreux qui élève le cœur vers Dieu. Par cette profonde vérité, il nous rappelle que la véritable ascension spirituelle passe par la charité authentique, fondement de notre fraternité en Dieu.
Le Christ - rappelle Grégoire de Nysse - est présent également dans les pauvres, c’est pourquoi ils ne doivent jamais être offensés : "Ne méprise pas ceux qui gisent étendus, comme si pour cette raison ils ne valaient rien. Considère qui ils sont, et tu découvriras quelle est leur dignité : ils représentent pour nous la Personne du Sauveur. Et il en est ainsi : car le Seigneur, dans sa bonté, leur prêta sa personne elle-même, afin que, à travers celle-ci, s’émeuvent ceux qui sont durs de cœur et ennemis des pauvres"[1].
Grégoire, avons-nous dit, parle de montée : montée vers Dieu dans la prière, à travers la pureté du cœur ; mais montée vers Dieu également à travers l’amour pour le prochain. L’amour est l’échelle qui conduit vers Dieu. Par conséquent, Grégoire de Nysse apostrophe avec vivacité chacun de ses auditeurs : "Sois généreux avec ces frères, victimes du malheur. Donne à l’affamé ce que tu ôtes à ton ventre"[2].
Avec une grande clarté, Grégoire rappelle que nous dépendons tous de Dieu, et c’est pourquoi il s’exclame : "Ne pensez pas que tout vous appartienne ! Il doit également y avoir une part pour les pauvres, les amis de Dieu. En effet, la vérité est que tout vient de Dieu, Père universel, et que nous sommes frères et appartenons à une même race"[3].
Il faut alors que le chrétien s’examine, insiste encore Grégoire : "Mais à quoi te sert-il de jeûner et de faire abstinence de la chair, si ensuite avec ta méchanceté tu ne fais rien d’autre que dévorer ton frère ? Quel gain tires-tu, face à Dieu, du fait de ne pas manger ce qui est à toi, si ensuite, agissant injustement, tu arraches des mains du pauvre ce qui lui appartient ?"[4].
[1] De pauperibus amandis : PG 46, 460bc
[2] ibid. : PG 46, 457c
[3] cf. ibid. : PG 46, 465b
[4] ibid. : PG 46, 456a
Extrait de Benoît XVI, audience du Mercredi 5 septembre 2007