L’adoration de Jésus est-elle le fruit d’influences extérieures ?
La dévotion des premiers chrétiens envers le Christ puise sa source non pas dans les traditions païennes ou juives, mais dans la révélation même de Jésus, affirmant ainsi sa divinité unique et invitant à une adoration authentique. Cette vérité fondamentale éclaire notre compréhension de la foi mariale, où Marie, en tant que Mère du Christ, est honorée dans la lumière de cette adoration véritable.
La dévotion des premiers chrétiens envers le Christ ne peut pas venir du paganisme :
Philon, un juif de la diaspora par ailleurs très cosmopolite, raille la prétention de Caïus Caligula à la divinité :
« Dieu se changerait en homme plus facilement qu’un homme en Dieu »[1].
Les juifs rejettent l’apothéose (l’idée païenne de la divinisation d’un grand homme), ils la considèrent comme ridicule et blasphématoire. Les premiers chrétiens étaient juifs : leur dévotion au Christ ne peut pas venir de cette notion païenne d’apothéose.[2]
La dévotion des premiers chrétiens envers le Christ ne peut pas venir du judaïsme : L’Ancien Testament montre que les juifs ne connaissent pas d’adoration envers d’autres figures que le Dieu unique (il ne suffit pas de rencontrer le verbe « se prosterner » pour penser que les juifs imaginent une adoration d’un personnage autre que Dieu seul, YHWH).
Fletcher-Louis a imaginé des exceptions dans trois textes plus ou moins contemporains de Jésus[3], mais L. W. Hurtado montre que ces textes ne sont pas pertinents :
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1Henoch 48, 5 ou 62,1-9 parle seulement de la reconnaissance du fils de l’homme ou de l’élu par toutes les nations qui avaient opprimé les justes juifs. On trouve l’appropriation chrétienne des mêmes promesses dans l’Apocalypse (3, 9) où les chrétiens de Philadelphie reçoivent la promesse que leurs adversaires religieux viendront se prosterner à leurs pieds, sans que cela ne signifie une adoration.
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La scène, dans la tradition latine de la Vie d’Adam et Ève (12-16) où Dieu ordonne aux anges de se prosterner devant Adam nouvellement créé à l’image de Dieu n’engendre aucune pratique juive.
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La prosternation d’Alexandre devant le grand prêtre est un geste de révérence envers le Dieu des juifs, mais, comme le remarque Flavius Josèphe, cela ne signifie pas que le grand prêtre soit honoré comme divin.
Bref, les juifs ne connaissent pas d’adoration envers d’autres figures que le Dieu unique, et la dévotion des premiers chrétiens envers le Christ ne peut pas venir du judaïsme.[4]
Les chrétiens aiment et adorent Jésus selon ce que Jésus lui-même a révélé.
[1] Philon, Legatio ad Gaium, 118
[2] Cf. Larry W. Hurtado, Le Seigneur Jésus Christ, La dévotion envers Jésus aux premiers temps du christianisme. Cerf, Paris 2009, p. 105
[3] Crispin H. T. Fletcher-Louis, "The worship of Divine Humanity as God’s image and the Worship of Jesus", dans The Jewish roots of Christological Monotheism, pp. 112-128
[4] Cf. Larry W. Hurtado, Ibid., p. 51-56
Synthèse Françoise Breynaert