8 septembre 08 : Dignitas personae

En cette fête de la Nativité de la Vierge Marie, l’Instruction Dignitas Personae rappelle avec force que la dignité inviolable de chaque être humain s’impose dès le premier instant de sa conception, invitant à contempler en Marie, modèle de vie et de respect sacré, le fondement spirituel et éthique qui guide la réflexion de l’Église sur les défis biomédicaux contemporains.


Le 8 septembre 2008, en la Fête de la Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a publié une instruction sur la dignité de la personne. (Instruction qui fut ordonnée le 20 juin par le pape Benoît XVI).

La date de cette instruction, le 8 septembre, fête de la Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie, donne un éclairage particulier à toute cette instruction. Chaque fois qu'il sera question de conception, d'embryon, de naissance, souvenons-nous de Marie !

Instruction Dignitas Personae sur certaines questions de bioéthique

Introduction

1. La dignité de la personne doit être reconnue à tout être humain depuis sa conception jusqu'à sa mort naturelle. Ce principe fondamental, qui exprime un grand « oui » à la vie humaine, doit être mis au centre de la réflexion éthique sur la recherche biomédicale, qui acquiert de plus en plus, dans le monde d'aujourd'hui, une grande importance. Le Magistère de l'Église est déjà intervenu à maintes reprises pour clarifier et résoudre les problèmes moraux qui y sont sous-jacents. À ce titre, l'Instruction Donum vitae (1) est d'une importance particulière. Vingt ans après sa publication, il est apparu néanmoins opportun de procéder à sa mise à jour. L'enseignement de ce document conserve toute sa valeur tant pour les principes que pour les jugements moraux qui y sont exprimés. Cependant, dans le domaine délicat de la vie humaine et de la famille, les nouvelles technologies biomédicales actuelles suscitent des questions ultérieures, en particulier en ce qui touche la recherche sur les embryons humains, l'utilisation de cellules souches à des fins thérapeutiques ainsi que le domaine de la médecine expérimentale. Toutes ces techniques soulèvent de nouvelles interrogations qui exigent également des réponses adéquates. La rapidité de l'évolution de la science et son amplification par des moyens de communication sociale suscitent des attentes et des préoccupations dans une grande frange de l'opinion publique. Les Assemblées législatives sont souvent sollicitées pour prendre des décisions, en impliquant parfois les consultations populaires, afin de réglementer juridiquement ces problèmes. Ces motivations ont conduit la Congrégation pour la Doctrine de la Foi à élaborer une nouvelle Instruction de caractère doctrinal, pour affronter certaines des problématiques récentes, à la lumière des critères énoncés par l'Instruction Donum vitae. D'autres thèmes déjà traités, mais pour lesquels des clarifications ultérieures s'imposent, ont été aussi réexaminés.

2. L'examen de ces questions a toujours pris en compte leurs aspects scientifiques, grâce au concours d'un grand nombre d'experts et aux analyses de l'Académie Pontificale pour la Vie. Tout cela a été évalué à la lumière des principes de l'anthropologie chrétienne. Les encycliques Veritatis splendor (2) et Evangelium vitae (3) de Jean-Paul II et d'autres interventions du Magistère offrent des directives claires sur la méthode et sur le contenu tout au long de l'examen de ces problèmes. Au sein de l'actuel et multiforme panorama, philosophique et scientifique, on peut relever une grande présence de scientifiques et de philosophes de valeur qui, dans l'esprit du serment d'Hippocrate, voient dans la science médicale un service en faveur de la fragilité humaine, pour le traitement des maladies, le soulagement de la souffrance ainsi que l'extension des soins nécessaires de manière égale à toute l'humanité. Cependant, certains représentants de ces mêmes domaines scientifiques considèrent le développement croissant des technologies biomédicales dans une perspective essentiellement eugénique.

3. L'Église catholique, en proposant des principes et des jugements moraux sur la recherche biomédicale dans le domaine de la vie humaine, s'appuie tant sur la lumière de la raison que sur la foi, en contribuant à élaborer une vision intégrale de l'homme et de sa vocation. Ceci témoigne de sa capacité à accueillir tout ce qui émerge de bon dans les œuvres des hommes et dans les diverses traditions culturelles et religieuses, qui ont souvent un grand respect pour la vie. Le Magistère tient à encourager et à exprimer sa confiance envers ceux qui considèrent la science comme un précieux service pour le bien intégral de la vie et pour la dignité de chaque être humain. C'est avec espoir que l'Église regarde donc la recherche scientifique, et souhaite que de nombreux chrétiens se dédient à la promotion de la biomédecine pour témoigner de leur foi. En outre, elle exprime le vœu que les fruits de cette recherche soient rendus disponibles même dans les zones pauvres et dans celles qui sont touchées par la maladie, afin de répondre aux besoins les plus urgents et les plus dramatiques du point de vue humanitaire. Enfin, elle veut être présente aux côtés de toute personne souffrante dans son corps et dans son âme, pour offrir non seulement un réconfort, mais aussi la lumière et l'espérance, à travers lesquelles la maladie ou l'expérience de la mort retrouvent un sens. Ces situations appartiennent de fait à l'existence de l'homme et marquent son histoire, en l'ouvrant au mystère de la Résurrection. Le regard de l'Église est en réalité plein de confiance car « la vie vaincra : pour nous, cela est une espérance certaine. Oui, la vie vaincra, car la vérité, le bien, la joie, le véritable progrès sont du côté de la vie. Dieu, qui aime la vie et la donne avec générosité, est du côté de la vie » (4).

La présente Instruction s'adresse aux fidèles et à tous ceux qui cherchent la vérité (5). Elle comprend trois parties : la première rappelle certains aspects anthropologiques, théologiques et éthiques de grande importance ; la seconde affronte les nouveaux problèmes liés à la procréation ; la troisième se penche sur les nouvelles propositions thérapeutiques impliquant la manipulation de l'embryon ou du patrimoine génétique de l'homme.

Première partie : aspects anthropologiques, théologiques et éthiques de la vie et de la procréation humaine

4. Au cours des dernières décennies, les sciences médicales ont considérablement élargi leurs connaissances sur la vie humaine dans les premiers stades de son existence. Elles sont parvenues à mieux connaître les structures biologiques et le processus de sa génération. Ces développements, certes positifs, méritent d'être soutenus lorsqu'ils sont utilisés pour surmonter ou guérir des pathologies et lorsqu'ils contribuent à rétablir le fonctionnement normal des processus génératifs. Par contre, ils sont négatifs, et donc ne peuvent être approuvés, quand ils impliquent la suppression d'êtres humains ou lorsqu'ils utilisent des moyens qui nuisent à la dignité de la personne. Il en est de même lorsqu'ils sont mis en œuvre pour des finalités contraires au bien de l'homme. Le corps d'un être humain, dès les premiers stades de son existence, n'est jamais réductible à l'ensemble de ses cellules. Ce corps embryonnaire se développe progressivement selon un « programme » bien défini et avec une finalité propre qui se manifeste à la naissance de chaque enfant. À ce titre, il est important de rappeler le critère fondamental d'éthique formulé par l'Instruction Donum vitae pour juger toutes les questions morales qui concernent les interventions sur l'embryon humain : « Le fruit de la génération humaine dès le premier instant de son existence, c'est-à-dire à partir de la constitution du zygote, exige le respect inconditionnel moralement dû à l'être humain dans sa totalité corporelle et spirituelle. L'être humain doit être respecté et traité comme une personne dès sa conception, et donc dès ce moment, on doit lui reconnaître les droits de la personne, parmi lesquels en premier lieu le droit inviolable de tout être humain innocent à la vie » (6).

5. Cette affirmation, de caractère éthique, est reconnue vraie et conforme à la loi morale naturelle par la raison elle-même ; elle devrait être le fondement de tout système juridique (7). En réalité, elle suppose une vérité de caractère ontologique, en vertu de laquelle ce document avait démontré la continuité du développement de l'être humain, sur la base de solides connaissances scientifiques. Si l'Instruction Donum vitae n'a pas défini l'embryon comme personne, afin de ne pas s'engager expressément dans une affirmation de nature philosophique, elle a cependant relevé qu'il existe un lien intrinsèque entre la dimension ontologique et la valeur spécifique de chaque être humain. Même si la présence d'une âme spirituelle ne peut être détectée par aucune observation de donnée expérimentale, les conclusions scientifiques elles-mêmes au sujet de l'embryon humain « fournissent une indication précieuse pour discerner rationnellement une présence personnelle dès cette première apparition d'une vie humaine : comment un individu humain ne serait-il pas une personne humaine ? » (8). De fait, la réalité de l'être humain, tout au long de son existence, avant et après sa naissance, ne permet d'affirmer ni un changement de nature ni une gradation de la valeur morale, car il possède une pleine qualification anthropologique et éthique. L'embryon humain a donc, dès le commencement, la dignité propre à la personne.

6. Le respect d'une telle dignité est requis pour chaque être humain, car en lui sont inscrites de manière indélébile cette dignité propre et la valeur qui est la sienne. D'autre part, le mariage et la famille constituent le contexte authentique où la vie humaine trouve son origine. En son sein, la vie provient d'un acte qui exprime l'amour réciproque entre l'homme et la femme. Une procréation réellement responsable vis-à-vis de l'enfant qui va naître « doit être le fruit du mariage » (9). Dans tous les temps et dans toutes les cultures, le mariage « est une sage institution du Créateur pour réaliser dans l'humanité son dessein d'amour. Par le moyen de la donation personnelle réciproque, qui leur est propre et exclusive, les époux tendent à la communion de leurs êtres en vue d'un mutuel perfectionnement personnel pour collaborer avec Dieu à la génération et à l'éducation de nouvelles vies » (10). Dans la fécondité de l'amour conjugal, l'homme et la femme « mettent en évidence qu'à l'origine de leur vie conjugale il y a un "oui" authentique qui est prononcé et réellement vécu dans la réciprocité, en restant toujours ouvert à la vie. [...] La loi naturelle, qui est à la base de la reconnaissance de la véritable égalité entre les personnes et les peuples, mérite d'être reconnue comme la source à laquelle doit s'inspirer également la relation entre les époux dans leur responsabilité d'engendrer de nouveaux enfants. La transmission de la vie est inscrite dans la nature et ses lois demeurent comme une norme non écrite à laquelle tous doivent se référer » (11).

7. L'Église est convaincue que ce qui est humain est non seulement accueilli et respecté par la foi, mais il est aussi purifié, élevé et porté à la perfection. Après avoir créé l'homme à son image et à sa ressemblance (cf. Gn 1, 26), Dieu a qualifié de « très bonne » sa création (Gn 1, 31), et l'a ensuite assumée dans son Fils (cf. Jn 1, 14). Par le mystère de l'Incarnation, le Fils de Dieu a confirmé la dignité du corps et de l'âme, constitutifs de l'être humain. Le Christ n'a pas dédaigné le corps ; il en a pleinement révélé le sens et la valeur : « en réalité, le mystère de l'homme ne s'éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe Incarné » (12). En devenant l'un de nous, le Fils atteste que nous pouvons devenir « fils de Dieu » (Jn 1, 12), « participants de la nature divine » (2 P 1, 4). Cette nouvelle dimension n'est pas contradictoire de la dignité de la créature, que par la raison tous les hommes peuvent reconnaître. Elle l'élève plutôt vers un horizon ultérieur de vie qui est propre à Dieu, ce qui permet de réfléchir de manière plus adéquate sur la vie humaine et sur les actes qui l'expriment (13). À la lumière de ces données de la foi, le respect dû à l'être humain et requis par la raison, est encore plus accentué et renforcé. C'est pourquoi il n'y a pas d'opposition entre l'affirmation de la dignité de la vie humaine et son caractère sacré. « Les différentes manières dont Dieu veille sur le monde et sur l'homme dans l'histoire non seulement ne s'excluent pas, mais, au contraire, se renforcent l'une l'autre et s'interpénètrent. Toutes proviennent du dessein éternel de sagesse et d'amour par lequel Dieu prédestine les hommes "à reproduire l'image de son Fils" (Rm 8, 29) (14) ».

8. De ces deux dimensions, humaine et divine, on comprend mieux la raison d'être de la valeur inviolable de l'homme : il a une vocation éternelle et est appelé à communier à l'amour trinitaire du Dieu vivant. Cette valeur s'applique à tous sans distinction. Par le simple fait qu'il existe, chaque être humain doit être pleinement respecté. En ce qui concerne la dignité, l'introduction de critères de discrimination, sur la base du développement biologique, psychologique, culturel ou de l'état de santé, est à exclure. En l'homme, créé à l'image de Dieu, se reflète, à chaque phase de son existence, « le visage de son Fils unique [...] Cet amour infini et presque incompréhensible de Dieu pour l'homme révèle jusqu'à quel point la personne humaine est digne d'être aimée en elle-même, indépendamment de toute autre considération - intelligence, beauté, santé, jeunesse, intégrité et ainsi de suite. En définitive, la vie humaine est toujours un bien, car "elle est dans le monde une manifestation de Dieu, un signe de sa présence, une trace de sa gloire" (cf. Evangelium vitae, n. 34) » (15).

9. Ces deux dimensions de la vie humaine, naturelle et surnaturelle, permettent aussi de mieux comprendre en quel sens les actes qui permettent à l'être humain de naître et par lesquels l'homme et la femme se donnent mutuellement l'un à l'autre, sont un reflet de l'amour trinitaire. « Dieu, qui est amour et vie, a inscrit dans l'homme et la femme la vocation à une participation spéciale à son mystère de communion personnelle et à son œuvre de Créateur et de Père » (16). Le mariage chrétien « plonge ses racines dans la complémentarité naturelle qui existe entre l'homme et la femme, et se nourrit grâce à la volonté personnelle des époux de partager la totalité de leur projet de vie, ce qu'ils ont et ce qu'ils sont : en cela, une telle communion est le fruit et le signe d'une exigence profondément humaine. Mais dans le Christ-Seigneur, Dieu prend cette exigence, il la confirme, la purifie et l'élève, la menant à sa perfection par le sacrement de mariage : l'Esprit Saint répandu au cours de la célébration sacramentelle remet aux époux chrétiens le don d'une communion nouvelle, communion d'amour, image vivante et réelle de l'unité tout à fait singulière qui fait de l'Église l'indivisible Corps mystique du Christ » (17).

10. En jugeant de la portée éthique des résultats récents des recherches médicales concernant l'homme et ses origines, l'Église n'intervient pas dans le domaine propre de la science médicale en tant que telle, mais elle rappelle à toutes les parties prenantes, la responsabilité éthique et sociale de leurs actes. Elle montre que la valeur éthique de la science biomédicale se mesure par sa référence tant au respect inconditionnel dû à tout être humain, à chaque instant de son existence, qu'à la sauvegarde de la spécificité des actes personnels qui transmettent la vie. L'intervention du Magistère rentre dans sa mission de promouvoir la formation des consciences, en enseignant de manière authentique la vérité qu'est le Christ, et au même moment, en déclarant et en confirmant avec autorité les principes de l'ordre moral découlant de la nature humaine elle-même (18).

Deuxième partie : les nouveaux problèmes concernant la procréation

11. À la lumière des principes mentionnés ci-dessus, il s'avère nécessaire d'examiner maintenant certains problèmes relatifs à la procréation, et qui se sont mieux dessinés au cours des années qui ont suivi la publication de l'Instruction Donum vitae.

Les techniques d'aide à la fertilité

12. En ce qui concerne le traitement de l'infertilité, les nouvelles technologies médicales doivent respecter trois valeurs fondamentales : a) le droit à la vie et à l'intégrité physique de tout être humain depuis la conception jusqu'à la mort naturelle ; b) l'unité du mariage qui implique le respect mutuel du droit des conjoints à devenir père et mère seulement l'un à travers l'autre (19) ; c) les valeurs spécifiquement humaines de la sexualité, qui « exigent que la procréation d'une personne humaine doit être poursuivie comme le fruit de l'acte conjugal spécifique de l'amour des époux » (20). Les techniques qui apparaissent comme une aide à la procréation « ne sont pas à rejeter parce qu'artificielles. Comme telles, elles témoignent des possibilités de l'art médical. Mais elles sont à évaluer moralement par référence à la dignité de la personne humaine, appelée à réaliser sa vocation divine au don de l'amour et au don de la vie » (21). À la lumière de ce critère, sont à exclure toutes les techniques de fécondation hétérologue (22) et celles de fécondation artificielle homologue (23) qui se substituent à l'acte conjugal. En revanche, sont permises les techniques qui sont comme une aide à l'acte conjugal et à sa fécondité. L'Instruction Donum vitae s'exprime en ces termes : « Le médecin est au service des gens et de la procréation humaine : il n'a pas le droit de disposer d'elles ni de décider à leur sujet. L'intervention médicale est respectueuse de la dignité des personnes quand elle vise à aider l'acte conjugal, pour en faciliter l'accomplissement, soit pour lui permettre d'atteindre sa fin une fois qu'il a été accompli normalement » (24). Concernant l'insémination artificielle homologue, elle affirme : « l'insémination artificielle

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