La loi suprême de l’histoire (Coran)
Dans le dialogue entre foi chrétienne et islam, la notion de « signe » dans le Coran révèle une vision où la justice divine s’exprime par le triomphe des justes et la chute des rebelles, remettant en question la mort rédemptrice du Christ sur la croix. Cette perspective invite à une réflexion profonde sur les différences théologiques fondamentales, tout en ouvrant un espace pour mieux comprendre les dynamiques historiques et spirituelles qui façonnent les relations entre ces traditions.
La notion de « signe » dans le Coran :
Dans le coran, la nature est un « signe » qui parle de Dieu, origine de tout ce qui est, de tout ce qui vit.
Mais le « signe » le plus caractéristique est toujours la destruction des peuples rebelles qui refusent d’obéir aux prophètes qui leur sont envoyés (Cf. Coran 26, 67.103.121.).
Cette loi est inconciliable avec l’idée que Jésus soit mort sur la croix : Dieu se devait de le sauver.
La coutume de Dieu, la loi de l’histoire :
Les musulmans enseignent que l’islam apporte le bonheur en ce monde et dans l’autre. L’idée de bonheur ici-bas est liée à celle du triomphe terrestre des prophètes et de leurs communautés. Il existe en effet, d’après le Coran, une "règle de Dieu" selon laquelle les justes triomphent et les mécréants échouent (Coran 48, 22-23, etc.).
Pour la compréhension de l’histoire récente :
De tels versets permettent de comprendre pourquoi la colonisation des pays musulmans a suscité une réaction de fondamentalisme islamique. En effet, ces versets amènent le raisonnement suivant : si la nation est envahie, c’est qu’elle a manqué à la loi musulmane et elle doit y revenir plus sévèrement.
Pour le dialogue inter-religieux :
Par rapport à l’Ancien testament, que l’islam considère théoriquement comme texte sacré, la différence est grande.
Il y a certes un courant "Deutéronomiste" selon lequel le péché amène la défaite et l’exil tandis que la justice amène la bénédiction (Deutéronome 30, 15-20). Et tout homme peut reconnaître la valeur édifiante d’une telle sagesse : il n’est pas grave de se tromper, mais il est très grave de recommencer avec légèreté. Les évaluations régulières améliorent les rapports humains. Au contraire, le violent ne sait pas se souvenir, écouter son propre passé pour ne pas refaire les mêmes erreurs. Si Dieu "punit" les méchants et récompense les bons, il y a là quelque chose de constructif que tout le monde comprend.
Mais l’Ancien testament comporte aussi les prophètes Isaïe, Jérémie, Ezéchiel ou Daniel, et les petits prophètes bibliques qui justement transcendent cette seule logique. (Voir les liens proposés ci-dessous). Or le Coran est muet sur la théologie de tous ces prophètes.
Par rapport au christianisme, la "règle de Dieu" dont parle le Coran (sourate 48, 23) rend irrecevable la foi en Jésus : si Jésus, loin d’être récompensé a été crucifié, c’est qu’il a blasphémé, ou, plutôt, Jésus est un saint prophète mais il n’a jamais été crucifié. D’ailleurs, dans le Coran, le nom de Jésus est changé en Issa.
Bibliographie : Jacques Jomier, o.p. Cahiers Evangile n° 48, Un chrétien lit le coran. Cerf, Paris 1985
Françoise Breynaert