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Les grands témoins de la foi
France
Nº 654
1621 – 1686

Vocation profonde et grâces précoces chez Nicolas Barré (+1686)

Pédagogue et maître spirituel, le religieux Nicolas Barré (1621 – 1686), marqué par la pauvreté spirituelle et matérielle de ceux qu’il rencontre, choisit d’œuvrer pour l’éducation des nombreux enfants défavorisés du Grand Siècle. Il choisit d’entrer chez les Minimes, les « tout petits », par amour de la simplicité et de la pauvreté. En effet, dès sa prime enfance, la vie de Nicolas est étonnement pleine de renoncements, de pénitences et d’abstinences… Aussi, Dieu le comble-t-il de grâces précoces. Cela lui permet, à dix ans, d’obtenir la guérison inespérée de sa jeune sœur, Louise.


Les raisons d'y croire

  • Lorsqu’un enfant sait ce qu’il veut faire de sa vie, il est très rare qu’en grandissant il s’y tienne, et il est encore plus exceptionnel que son choix se tourne vers un avenir d’austérités et de renoncements. Tel est pourtant le choix que fait à dix ans le jeune Nicolas Barré en promettant d’entrer chez les Frères minimes, l’ordre pénitentiel fondé par saint François de Paule. Seul un appel extraordinaire et mystérieux peut l’expliquer.

  • Pareillement, il fait au même âge, à l’imitation de saint Louis de Gonzague, vœu de virginité perpétuelle. Il existe donc chez lui un désir de perfection hors du commun qui ne peut venir que de Dieu.

  • Un soir, rentrant du collège, il trouve ses parents en larmes : sa jeune sœur, Louise, est très malade ; le médecin la pense mourante. Cependant, Nicolas leur affirme avec assurance que Louise va guérir. On ne le croit pas. Pourtant, c’est vrai : sa sœur se rétablit.

  • Au XVIIe siècle, la mortalité infantile est énorme : trois enfants sur quatre n’atteignent pas l’âge adulte. La médecine du temps est quasi impuissante, les chances de survie de la fillette sont donc faibles, et sa guérison inexplicable est réellement inespérée.

  • Sans jamais dire comment il a sauvé la vie de sa cadette, il ne fait aucun doute que Nicolas Barré a fait un vœu devant Dieu à cette occasion et l’a tenu. Ses parents l’ont su, sa sœur aussi. Louise dira toujours de son frère aîné qu’il était deux fois son père : pour avoir obtenu du Ciel sa guérison et pour l’avoir ensuite enfanté à la vie de la grâce en l’inspirant à entrer en religion chez les Minimesses.


En savoir plus

Nicolas Barré, né à Amiens le 21 octobre 1621, est le fils aîné d’un couple de commerçants aisés. Très jeune, il se sent appelé à entrer chez les Minimes, ordre érémitique fondé par saint François de Paule et voué à une vie de pénitence, notamment à un jeûne quasi perpétuel. Cette vie de silence et de privation l’attire.

Il fait profession dans l’ordre en 1642. Envoyé à Paris, il se révèle un étudiant doué. Très vite, on le considère comme une future lumière de l’ordre. Ordonné prêtre en 1646, il est bientôt nommé prédicateur et confesseur.

Il se découvre un don de discernement et de lecture dans les âmes qui lui permet de convertir des pécheurs endurcis, ce dont ses confrères le jalousent, l’accusant de recourir à la magie pour obtenir ses succès. En fait, la pénitence est la seule magie qu’il utilise, ne mangeant presque rien, dormant peu (et en position assise). Selon le quatrième vœu – qu’il a prononcé en tant que minime –, il pratique un jeûne quasi perpétuel « qui purifie l’entendement, élève les sens, et rend le cœur contrit et humilié » ; mais il ne souhaite cette vie de pénitence que « pour l’amour de celui qui a voulu mourir en croix pour nous ». Le père Barré subit de surcroît pendant vingt-sept ans de grandes souffrances spirituelles, accompagnées d’une nuit de l’âme.

Ses écrits relatent son expérience de Dieu. Jamais Dieu n’est si bien trouvé, écrit-il, qu’on ne doive le chercher davantage : « On le trouve, mais de loin, et on ne fait que l’entrevoir. On approche de lui. On le regarde avec étonnement ; ensuite, on le contemple avec humilité, et enfin avec amour et confiance. On lui parle. On l’écoute. On l’embrasse. On le serre. On tombe amoureusement en lui par une sainte défaillance. On repose sur lui. On se perd en lui. Et enfin, on se transforme en lui » (Œuvres complètes, Cerf, 1994, p. 384).

Tombé gravement malade par excès de privations, il est renvoyé à Amiens en 1657, puis à Rouen en 1659. C’est en prêchant dans les faubourgs de la grande ville normande que, touché par la misère du peuple, il décide d’ouvrir des écoles, celles de Jésus humilié, pour l’éducation des enfants pauvres. En 1662, alors qu’il missionne à Sotteville, il dit à un ami : « Nous ferions semblant d’aimer Jésus si nous n’avions pas compassion des misères du prochain. » Ainsi naissent la communauté des Sœurs Charitables et les écoles chrétiennes et charitables du Saint-Enfant-Jésus. L’Œuvre est violemment attaquée, tant par les laïcs que par les religieux, mais elle prospère. Nicolas Barré meurt le 31 mai 1686. Séparée en deux branches, sa fondation s’étend désormais au monde entier.

Nicolas Barré est déclaré vénérable en 1983. Une guérison survenue en décembre 1989 a été reconnue « miraculeuse » en 1997 et il a été béatifié en 1999 par le pape Jean-Paul II.

Spécialiste de l’histoire de l’Église, postulateur d’une cause de béatification, journaliste pour de nombreux médias catholiques, Anne Bernet est l’auteur de plus d’une quarantaine d’ouvrages, pour la plupart consacrés à la sainteté.


Au delà

Nicolas Barré est vénéré sur les quatre continents. De nombreux établissements scolaireset centres éducatifs portent son nom. Au Japon, par exemple, des prières quotidiennes lui sont adressées dans un lycée catholique (Fukuoka Futaba).


Aller plus loin

Nicolas Barré, Œuvres complètes, Cerf, Paris, 1994.


En complément

  • Positio sur la cause de béatification du serviteur de Dieu, le père Nicolas Barré, Imprimerie Vaticane, Rome, 1970.

  • Dominique Sabourdin-Perrin, Nicolas Barré, un minime du Grand Siècle, Salvator, 2018.

  • L’article très complet de la revue Christus : «  Nicolas Barré, l’heureuse liberté de l’Évangile  ».

  • Le documentaire réalisé par Omar Pesenti, disponible pour les abonnés sur KTO : «  Le saint des Minimes  ».

  • Le service d’archives des sœurs de l’ENJB (Sœurs de l’Enfant Jésus - Nicolas Barré) donne un accès digital à plusieurs documents d’archives liés à la vie de Nicolas Barré.

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