
Mgr Janos Scheffler, le pardon aux bourreaux (+1952)
Le bienheureux roumain Janos Scheffler, né en 1887, a consacré toute sa vie au service de l’Église catholique et des hommes. Il est ordonné prêtre en 1910, puis évêque en 1942. Ses qualités humaines et la vigueur de sa foi font de lui un prélat d’exception et un acteur rare de la charité. En tant que croyant, il s’oppose aux deux régimes totalitaires qui écrasent successivement son pays, le nazisme puis le communisme. Cette dernière idéologie ne supporte pas ses prises de position publiques : il finit par être emprisonné dans des conditions épouvantables, soumis à des tortures incessantes, sans jamais renier sa foi et les convictions qui en découlent. En 1952, il vit son martyre à l’image de celui des premiers chrétiens persécutés. Il est béatifié en 2011.
Les raisons d'y croire
Janos Scheffler est un intellectuel de premier plan, docteur en théologie et fin connaisseur de l’histoire du christianisme, qu’il enseigne durant plusieurs années. Sa foi est donc ancrée dans son intelligence humaine, mais elle dépasse aussi tout ce que l’imagination et l’esprit humains pourraient seuls concevoir. Face aux persécutions, sa foi se révèle être d’une force surnaturelle.
Suivant ce que lui dicte l’Évangile, Janos prend de nombreuses fois la défense des sans-voix, des opprimés, des prisonniers politiques de toutes catégories... Malgré les menaces d’arrestation et de mort qu’il reçoit pendant l’occupation nazie, il met tout en œuvre pour sauver ses compatriotes juifs persécutés par les Allemands. De même, après l’instauration du régime soviétique, il s’insurge contre la déportation des populations d’origine allemande vers la Russie et réclame la libération d’un évêque grec.
Réalisée en un très court laps de temps et dans un contexte de répression incessante, son œuvre spirituelle est cependant immense : essor de la pastorale des vocations, diffusion de livres philosophiques et scientifiques, consolidation des études des séminaristes et création de petits séminaires dans plusieurs villes, accompagnement des Sœurs de la Miséricorde de Szatmar et des franciscaines à Oradea, déclarations en faveur de la dévotion au Sacré Cœur de Jésus et à la vénération du Cœur immaculé de la Vierge Marie, proclamation de l’année de Notre Dame dans son diocèse, etc.
Après son arrestation, en 1950, la violence psychologique et physique avec laquelle on traite le futur bienheureux pendant de longs mois serait rapidement venue à bout de tout homme, même de forte constitution. Mais Janos, bien que sous-alimenté, coupé du monde et de la lumière du jour, malade et battu, tient bon sans qu’il soit possible d’expliquer une telle résistance.
Avec l’aide de Dieu, Janos Scheffler réussit à transformer cette expérience de douleur en occasion d’apostolat, de catéchèse et de prière. Il accepte le martyre et pardonne à ses bourreaux, au-delà de toute explication naturelle, de tous sentiments humains. Il meurt le 6 décembre 1952, en priant pour ses assassins et en leur parlant de la pitié de Dieu.
En savoir plus
Né le 29 octobre 1887 dans le petit village de Kalmand, qui, à cette époque, appartient à l’Empire austro-hongrois, Janos Schiffler envisage dès l’adolescence de devenir prêtre. Convaincu que Dieu l’appelle à le servir, il met toutes ses forces dans le travail scolaire et devient séminariste. Grandement apprécié par ses supérieurs, il est ordonné prêtre en 1910. C’est pour lui l’un des plus beaux jours de son existence.
Après son ordination, il est envoyé à Rome afin de poursuivre et achever ses études de droit canon. En 1915, il obtient le grade de docteur en théologie. Intellectuel consommé, curieux de tout et bourreau de travail, le jeune prêtre se voit confier différents ministères au sein de l’université de son pays natal. Il enseigne le droit canon et l’histoire de l’Église à la faculté de théologie d’Oradea (Crisana, Roumanie). Le 26 mars 1942, il est nommé évêquedu diocèse de Satu Mare (Transylvanie, Roumanie).
Pendant la Deuxième Guerre mondiale, il se bat pour secourir malades et blessés, distribuer vivres et biens aux nécessiteux et protéger les personnes les plus faibles, quelles que soient leurs origines. La guerre est une catastrophe pour sa région ; les années suivantes ne sont guère plus positives ! À partir de septembre 1944, l’occupation soviétique devient une réalité et, le 31 décembre 1947, le roi Michel Ier abdique définitivement. Commence dès lors pour le futur bienheureux une longue période de persécutions dont il ne se remettra jamais. Une politique de « nationalisation » des Églises vise à briser l’union des catholiques roumains avec Rome et à instaurer un clergé « officiel », nommé par le pouvoir en place.
Opposé publiquement à cette politique répressive, Mgr Scheffler est d’abord empêché d’exercer ses fonctions épiscopales. Nous sommes en 1948. Voyant dans un premier temps que cette mesure autoritaire n’entame en rien la volonté du prélat, le gouvernement change de tactique et essaye de le corrompre en lui offrant de devenir « patriarche de Roumanie », mais à la condition qu’il accepte de devenir orthodoxe. Il refuse sur-le-champ.
Le 23 mai 1950, il est arrêté par les hommes armés de la police politique roumaine. On l’interne sans jugement dans le couvent franciscain de Korosbanya. Malgré une surveillance étroite, il parvient à faire passer un message aux catholiques de la région, disant que chaque baptisé doit « rester fidèle jusqu’au martyre ». En 1952, il est incarcéré dans la prison de Jilava, près de Bucarest.
Le bienheureux est torturé physiquement et psychologiquement (humiliations, coups, douches d’eau bouillante...) Il subit toutes sortes de brimades et on l’enferme dans un lieu souterrain, sans lumière, où on l’empêche de prier et de dormir. Pourtant, il se montre ferme dans la foi et affirme à ses bourreaux que Dieu les prendra en pitié.
Le 6 décembre 1952, il rend son âme à Dieu, en priant et en pardonnant à ses tueurs. On l’enterre dans le cimetière de la prison. En 1965, ses restes sont exhumés secrètement par des fidèles catholiques, puis placés dans la crypte de la cathédrale d’Oradea. Déclaré vénérable le 1er juillet 2010, Mgr Steffler est le deuxième évêque roumain de la période communiste à être béatifié comme martyr. La cérémonie a lieu le 1er juillet 2011 à Satu Mare, en présence de huit mille personnes.
Patrick Sbalchiero, membre de l’Observatoire international des apparitions et des phénomènes mystiques.
Au delà
Les historiens ont l’habitude de diviser la vie de Mgr Janos Scheffler en deux parties distinctes : en premier la jeunesse, la prêtrise et le début de l’épiscopat, puis, en second, son martyre proprement dit. En réalité son existence est un modèle d’unité spirituelle et humaine.
Proche de Jésus depuis sa jeunesse, il se met au service de la foi en devenant prêtre et en mettant ses qualités personnelles au service de la vérité de l’Évangile. Puis, c’est en qualité d’évêque, donc d’apôtre, qu’il accepte le martyre. Sa vie est plus que jamais une source d’inspiration pour les croyants du monde entier.
Aller plus loin
Les informations biographiques disponibles sur le site Internet du Dicastère pour la cause des Saints .
En complément
Sur le site Internet anglais Saint for a minute, l’article « Blessed Janos Scheffler ».
Les articles du site Internet Zenit : « Il n’est pas anachronique de parler de martyrs de nos jours » et « Le pape évoque le bienheureux Janos Scheffler, évêque et martyr ».