
San Nicolas : lorsque Marie visite l’Argentine (1983)
De 1983 à 1990, dans la ville de San Nicolas de los Arroyos (en Argentine, à deux cent quarante kilomètres au nord de Buenos Aires), la Vierge Marie apparaît de nombreuses fois à une laïque, mère de famille, Gladys Herminia Quiroga de la Motta. Sous le vocable de « Notre Dame du Rosaire », elle délivre quelque mille huit cents messages de facture biblique. À partir du 15 novembre 1983, Jésus apparaît à Gladys, lui délivrant certains jours un message prophétique d’une parfaite clarté qui invite à la prière et à la conversion. Un sanctuaire est construit à l’endroit demandé par l’apparition, qui est aujourd’hui l’un des lieux de pèlerinage parmi les plus importants d’Amérique latine.
Les raisons d'y croire
Gladys, femme d’un niveau socioculturel élémentaire, n’aurait pas pu inventer ni les apparitions proprement dites ni les mille huit cent quatre messages recueillis pendant sept ans. Ces messages sont à la fois limpides et profonds ; tous, sans exception, sont exempts de la moindre erreur ou approximation doctrinale. De plus, les passages bibliques auxquels ils font référence sont d’une précision et d’une justesse confondantes.
Les thèmes essentiels des messages renvoient à l’Évangile et à Jésus : amour de la paix et de la prière, pardon, conversion des pécheurs, retour aux sacrements, en particulier à l’Eucharistie et à la confession, invitation à la récitation du rosaire...
La personnalité de Gladys, connue de tous pour sa transparence, son humilité, sa simplicité, son obéissance aux autorités ecclésiastiques, son équilibre psychologique et sa confiance absolue en Dieu, ne laisse subsister aucun doute sur l’origine surnaturelle du phénomène.
L’extraordinaire ressemblance entre la statue de Notre Dame du Rosaire et l’apparition décrite par Gladys ne peut être une invention. En effet, strictement personne (pas même le curé en fonction en 1983) n’a vu ni entendu parler de cette statue, bénie jadis par Léon XIII, puis oubliée depuis 1884 dans une partie de l’église qui n’est pas ouverte au public. La statue est retrouvée de façon inexplicable le 24 novembre 1983 dans un recoin du clocher de l’église. Or, la première apparition a eu lieu deux mois auparavant (le 25 septembre).
Après avoir découvert la statue, Gladys reçoit ce message : « On m’a oubliée[la Vierge fait ici référence à l’effondrement de la dévotion au rosaire, survenue à la fin du XIXe siècle en Argentine]. Je veux être sur les bords du Parana [le fleuve qui jouxte San Nicolas]. »
En novembre 1983, ce n’est plus seulement Gladys qui assiste à l’illumination subite de son chapelet, mais un groupe entier de voisines venues prier avec elle.
De même, le soir du 24 novembre 1983, alors que la nuit vient de tomber, Gladys, accompagnée de plusieurs témoins, voit un trait de lumière fulgurant toucher l’endroit que l’apparition avait désigné comme devant accueillir le futur sanctuaire. Ce phénomène s’est reproduit plusieurs fois, jusqu’à la pose de la première pierre, en 1986.
Plusieurs liens avec d’autres apparitions mariales sont établis. Le 13 mai 1989, jour anniversaire des apparitions de Fatima (Portugal), la Vierge dit à Gladys : « Aujourd’hui, comme alors à Fatima, je suis de nouveau ici pour visiter la terre, même si ces visites sont plus fréquentes et prolongées, car l’humanité vit des moments dramatiques. » La dernière apparition a lieu le 11 février 1990, soit le jour de la fête de Notre Dame de Lourdes.
À plusieurs reprises, la dizaine de personnes présentes sur les lieux durant certaines apparitions ont rapporté unanimement avoir senti très distinctement, et pendant de longues minutes, des fragrances extraordinaires et inconnues.
Les fruits spirituels des événements de San Nicolas sont extrêmement nombreux, vérifiables et durables depuis 1983 : multiplication des groupes de prière, conversions d’athées, vocations sacerdotales et monastiques, pèlerinages suivis par des milliers de personnes chaque 25 du mois... Parmi tous ces phénomènes positifs, la consécration à la Vierge de dizaines de milliers de fidèles reste manifestement l’un des plus incroyables.
Plusieurs guérisons inexplicables ont été recensées dès le commencement des apparitions. En août 1990, dix cas très documentés sont constatés, notamment celui d’Oscar Arnaldo Paolini, atteint d’un cancer du larynx, et celui de Garciela Canet, souffrant d’un très grave traumatisme oculaire.
Après un accompagnement humain de plusieurs années et des enquêtes très rigoureuses, tant au plan doctrinal que moral et médical, l’Église catholique a dûment reconnu comme authentiques les apparitions de la Vierge Marie à San Nicolas, le dimanche 22 mai 2016.
En novembre 1984, les stigmates de la Passion apparaissent sur le corps de Gladys. Ceux-ci sont en tous points semblables aux plaies surnaturelles reconnues dans les annales de la mystique chrétienne : ni infection ni suppuration, et des apparitions et disparitions à des dates précises du calendrier liturgique (comme pendant l’Avent et le Carême). Plusieurs médecins examinent la voyante et observent à tour de rôle « le sang sourdre de dessous les poignets, à l’endroit précis du crucifiement ». Ce phénomène mystique avéré évoque aussi immanquablement l’origine surnaturelle des apparitions.
En savoir plus
Gladys Herminia Quiroga de la Motta, née le 1er juillet 1937, citoyenne argentine née dans un milieu modeste, interrompt sa scolarité dès l’âge de onze ans. Sa vie durant, malgré ses carences éducatives, sachant à peine lire et écrire, la jeune femme se débrouillera du mieux qu’elle le pourra, compensant le manque de connaissances par une gentillesse et une fraternité hors du commun. Mariée à un ouvrier métallurgiste, elle met au monde deux filles à San Nicolas de los Arroyos, où le couple possède une petite maison. La famille fréquente régulièrement la paroisse de San Nicolas, et son église dédiée à Notre Dame du Rosaire, édifiée au XVIIIe siècle. Rien ne distingue le couple des autres familles. Gladys est parfaitement équilibrée et elle ignore jusqu’à l’automne 1983 ce qui ressemble, de près ou de loin, aux apparitions mystiques.
Le 24 septembre 1983, Gladys observe subitement un étrange phénomène à son domicile : son chapelet « s’illumine » soudainement ! Le lendemain, tandis qu’elle récite son chapelet, la jeune femme voit la « Vierge » vêtue d’une robe bleue ; elle porte l’Enfant Jésus dans ses bras. Ce jour-là, l’apparition lui tend son propre chapelet mais ne dit mot. Quatre jours plus tard, Gladys voit Marie pour la seconde fois. À nouveau, aucune parole n’est prononcée.
Le 7 octobre suivant, la Vierge Marie lui montre un vaste « sanctuaire » – vision qui fait comprendre à la voyante que Marie veut qu’une telle réalisation soit entreprise à San Nicolas. Le 13 octobre, la Vierge lui parle pour la première fois : « Tu as été fidèle. Ne crains pas, viens me trouver, et avec moi, la main dans la main, tu feras un long chemin. »
Quelques semaines plus tard, Gladys et plusieurs de ses voisines voient le chapelet suspendu au-dessus de son lit s’illuminer subitement. Les personnes présentes décident à partir de cet instant de prier ensemble le chapelet chaque jour.
À partir du 19 octobre, la voyante reçoit des messages de la Vierge citant des passages de la Bible. Chacun des messages fait écho aux lectures liturgiques de l’Église le jour où il est communiqué à la voyante. Au total, jusqu’en 1990, ce sont quelque mille huit cents messages et citations bibliques que Marie donne à Gladys. Les apparitions se succèdent à un rythme très soutenu, parfois une par jour. Gladys explique qu’elle a touché le corps de Marie et senti sa chaleur. Certaines fois, des parfums merveilleux sont ressentis par des dizaines de témoins pendant l’apparition.
Le 15 novembre 1983, la voyante rapporte les mots suivants de la Vierge : « Je suis la Patronne de cette région. Faites valoir mes droits. » Elle répond : « Voulez-vous une chapelle ou un sanctuaire ? — Les écritures le disent, lui répond Marie en citant le livre de l’Exode (25,8) : "Ils me feront un sanctuaire et j’habiterai au milieu d’eux." » Le soir du 24 novembre 1983, Gladys, accompagnée de sa fille et de quelques amis, se rend sur le lieu où la Vierge lui a demandé l’érection du sanctuaire. Il fait nuit. « Un rayon de lumière tombe brusquement sur le lieu désigné par l’apparition. » Ce signe s’est renouvelé plusieurs fois, jusqu’à la pose de la première pierre en 1986.
Trois jours plus tard, Gladys fait la découverte providentielle,dans le clocher de l’église de San Nicolas, d’une statue de Notre Dame du Rosaire, autrefois bénie par le pape Léon XIII, conservée à cet endroit depuis 1884 dans un oubli général, après que la dévotion au rosaire est tombée en désuétude dans cette partie de l’Argentine. La voyante est comme frappée par la foudre : les traits de la statue ressemblent à s’y méprendre à ceux de l’apparition ! Gladys entend alors ces paroles : « On m’a oubliée [..]. Je veux être sur les bords du Parana [le fleuve qui jouxte San Nicolas]. »
Du 15 novembre 1983 au 30 décembre 1989, Gladys voit le Christ à soixante-dix-huit reprises. Certains jours, il lui transmet un message prophétique, tel que :« Si cette génération n’écoute pas ma Mère, elle périra. Demande à tous de l’écouter » ; « Ma Mère doit être accueillie. Ma Mère doit être écoutée dans la totalité de ses messages… J’ai choisi le Cœur de ma Mère pour que ce que je demande soit accompli » ; « Qui refuse ma Mère me refuse », etc.
Le 16 novembre 1984, elle reçoit les stigmates de la Passion. Malgré les douleurs qui en découlent, Gladys continue de remplir ses devoirs quotidiens avec un équilibre remarquable.
Les apparitions cessent définitivement le 11 février 1990, jour de la fête de Notre Dame de Lourdes. Ce jour-là, Marie donne le message suivant : « Mes chers enfants, je vous propose de suivre mes indications pas à pas : priez, réparez, ayez confiance. Bénis soient ceux qui cherchent dans la prière un refuge pour leurs âmes. Bénis soient ceux qui réparent les offenses graves que reçoit mon Fils. Bénis soient ceux qui ont confiance en l’amour de cette Mère. Tous ceux qui auront confiance en Dieu […] seront sauvés. »
Selon les autorités ecclésiastiques argentines, Gladys est toujours restée humble et effacée. Elle s’est « toujours mise à la disposition de l’Église, partageant les messages avec les autorités et se soumettant à leur volonté ». Son attitude a même été jugée édifiante par les évêques. « La saine réserve, la docilité envers les autorités ecclésiastiques, ainsi qu’une absence évidente de mise en avant et d’orgueil ont été remarquées en la personne que la Sainte Mère a invitée à transcrire ses messages. »
Une commission d’enquête canonique est instituée par l’évêque en avril 1985. Ses conclusions, positives, sont publiées le 25 octobre suivant : dans les faits de San Nicolas, précise l’évêque diocésain, « les messages transmis par la voyante ne contiennent aucune erreur doctrinale ». Ces mille huit cents messages, bientôt rassemblés, reçoivent l’approbation de Mgr Castagna.
Des guérisons ont été enregistrées par un « bureau médical », ressemblant à celui de Lourdes. Les témoignages de personnes affirmant avoir été miraculeusement guéries ont été analysés des mois durant par des équipes de médecins venus de tous les horizons. En août 1990, dix guérisons ont ainsi été reconnues inexplicables.
Dès avant le décret épiscopal de 2016 reconnaissant définitivement les apparitions, les évêques diocésains successifs avaient prouvé leur attachement pour les apparitions de San Nicolas en autorisant dès 1986 une procession mensuelle, à laquelle participa Mgr Castagna en personne et à l’issue de laquelle une messe fut célébrée en extérieur. Les évêques ont aussi permis la construction du sanctuaire, dont l’évêque de San Nicolas a béni la première pierre, et autorisé le 28 décembre 1987 la fondation d’un institut de vie consacré au service des pèlerins (les « Filles de Marie du Rosaire de San Nicolas »). Le 19 mars 1989, la statue de Notre Dame du Rosaire découverte par Gladys est portée en procession jusqu’au nouveau sanctuaire, puis est couronnée en 2009. Plus tard, deux processions annuelles ont été organisées (les 25 mai et 25 septembre). Mgr Castagna, puis ses successeurs, Mgr Mario Luis Maulion et Mgr Hector Sabatino Cardelli, y participèrent fidèlement.
Comme l’a écrit Mgr Cardelli dans son décret de reconnaissance des apparitions, et selon un message que la Vierge avait transmis à la voyante : « Dieu s’est arrêté à San Nicolas, nous apportant le parfum de Marie. » Depuis, le sanctuaire de San Nicolas est l’un des lieux de pèlerinage parmi les plus importants d’Amérique latine. Le 25 septembre 2007, pour le vingt-quatrième anniversaire des apparitions, cinq cent mille fidèles s’y sont rendus. Selon Mgr René Laurentin, il s’agit là de « l’un des cas les plus profonds dans l’histoire des apparitions contemporaines ».
Patrick Sbalchiero, membre de l’Observatoire international des apparitions et des phénomènes mystiques.
Au delà
Les phénomènes extraordinaires qui entourent Gladys (parfums, stigmates, visions de Jésus et de Marie, guérisons, etc.) évoquent immanquablement l’origine surnaturelle de ces manifestations. Toutefois, la foi de Gladys, son humilité à toute épreuve, son abnégation et sa charité constante sont autant de preuves de la présence de Dieu à San Nicolas.
Aller plus loin
René Laurentin et Patrick Sbalchiero, Dictionnaire des « apparitions » de la Vierge, Paris, Fayard, 2007, p. 1305-1307.
En complément
René Laurentin, Un appel de Marie en Argentine : San Nicolas, des apparitions assumées par l’Église, un renouveau qui dépasse les limites de l’Amérique Latine, Paris, F.-X. de Guibert, 1990.
Bruno Cayetano, Historia de las manifestaciones de la Virgen : Maria del Rosario de San Nicolas, Didascalia, 1994.
L’article d’Aleteia : « La Vierge Marie apparaît bien en Argentine depuis plus de trente ans ».
Lorenzo Bertocchi, « Argentina, riconosciute le apparizioni della Vergine », La Nuova Bussola Quotidiana, 27 mai 2016.