
Dieu parle par la bouche de la bienheureuse Madeleine de Panattieri (+1503)
Née et morte à Trino (Italie, Piémont), la bienheureuse Madeleine Panattieri grandit dans une famille modeste et sans histoire de la localité. Ce qui la distingue fondamentalement des autres filles de son âge est sa volonté de suivre et de servir le Christ coûte que coûte. Devenue tertiaire dominicaine, elle met à profit le don de prêcher, que Dieu lui a offert, en catéchisant et instruisant nombre de ses contemporains, de toutes conditions. En 1827, en la proclamant bienheureuse, le pape Léon XII confirme le culte que le peuple de Dieu voue à Madeleine Panattieri depuis le XVIe siècle, sans discontinuité.
Les raisons d'y croire
Sans avoir bénéficié de formations particulières, Madeleine Panattieri donne des prédications qui ont un succès fou : elles attirent une quantité impressionnante de fidèles, venus de tous horizons sociaux et professionnels, ce qui est particulièrement atypique à son époque. La petite religieuse se retrouve à prêcher devant des centaines de personnes : hommes comme femmes, prêtres et laïcs, aristocrates et responsables municipaux...
Les thèmes qu’elle aborde sont très variés mais tous, sans exception, sont profondément évangéliques. Jamais aucune erreur ou approximation doctrinale n’a été relevée par les théologiens qui la visitent à Trino.
Les propos qu’elle tient au fil des années dépassent de très loin ses capacités naturelles et son niveau socioculturel. Les témoins de ses prises de parole sont unanimes pour déclarer que Jésus parle, pour ainsi dire, à travers elle. Dans le cas de la bienheureuse Madeleine, il ne s’agit pas d’un « art oratoire », mais bien d’une présence du Christ à ses côtés ; c’est ainsi que s’expliquent la justesse théologique, le poids éthique et le succès particulier de ses prédications.
La bienheureuse évoque régulièrement le thème de l’usure, qui, à son époque, est assez couramment utilisée, en particulier dans le monde des négociants. Elle a le courage incroyable d’affirmer devant des parterres de riches marchands italiens que ce procédé est contraire à la foi chrétienne.
Il est marquant de remarquer que, bien des années avant de recevoir le don de prêcher, Madeleine s’engage de manière providentielle dans un tiers ordre dominicain. Or, l’ordre des Frères prêcheurs est justement destiné à transmettre la parole de Dieu dans les villes et les campagnes, ce qu’elle ignore au moment de prendre sa décision.
Les phénomènes mystiques qui ponctuent la vie de Madeleine sont impressionnants et bien documentés : jeûnes prolongés, don de parole, don de connaissance et prédictions d’une grande précision. Elle a notamment annoncé le jour et l’heure exacts de sa mort, le 13 octobre 1503.
Il lui arrive aussi de prophétiser dans les domaines politiques et militaires : elle décrit les onze guerres d’Italie qui seront menées par les rois de France sur le sol italien entre 1494 et le milieu du XVIe siècle, et prédit que Trino sera épargnée, ce qui sera effectivement le cas. « Malheur ! Je vois le fléau approcher », s’écrie-t-elle au sujet des combats futurs.
Madeleine ne tire jamais orgueil des foules qui viennent l’écouter : l’humble religieuse s’efface systématiquement derrière la personne de Jésus. De même, sa vie mystique, riche, profonde et fructueuse n’est connue que de quelques personnes, tant l’humilité de la bienheureuse surpasse tout.
Si les qualités humaines de Madeleine (bonté, patience, honnêteté) sont pour son entourage un gage de vérité absolue, ses vertus spirituelles demeurent un cadeau de Dieu (esprit de pauvreté, humilité et charité parfaites).
En savoir plus
Madeleine de Panattieri vient au monde en 1443 à Trino (Italie), localité du royaume du Piémont, entre Turin et Milan. Ses origines sociales sont assez modestes, mais sa famille ne manque de rien et la fillette prend très tôt l’habitude d’apporter quelques pièces ou un peu de nourriture aux indigents de sa ville. Ses parents et son entourage observent un fait remarquable : la petite Madeleine prie et aime les cérémonies religieuses dès son âge le plus tendre. Elle passe de longs moments devant des images pieuses et récite ses prières avec joie. Mais, en elle, il n’y a aucun repliement ni timidité. Au contraire, c’est une enfant qui aime la vie, partage les jeux de ses camarades et est ouverte aux nouvelles rencontres. D’une gaieté naturelle à toute épreuve, elle fait le bonheur des siens.
Parvenue à l’adolescence, sa personnalité s’affirme et ses projets de vie se confirment. Elle veut suivre Jésus, éprouver ce qu’il a éprouvé, souffrir ce qu’il a souffert, et transmettre sa parole aux hommes. Encore trop jeune pour frapper à la porte d’un couvent de religieuses contemplatives, elle obtient son admission dans un tiers ordre dominicain. La voici à la place que Jésus veut pour elle, se dit-elle. Elle est heureuse et elle va communiquer son bonheur à tous.
Elle récite chaque jour les offices liturgiques, lit la Bible et se confesse régulièrement. C’est un exemple religieux, selon ses camarades. C’est ainsi qu’elle parvient à unir en elle, avec la grâce de Dieu, contemplation et action. Toute sa vie durant, cet équilibre sera maintenu. Sa spiritualité s’oriente de bonne heure vers les états terrestres de la vie de Jésus. Elle désire partager les joies et les peines du Sauveur et parvenir, en union avec lui, jusqu’au Ciel. Par-dessus tout, elle brûle littéralement de zèle pour le salut des hommes, pour lequel elle veut faire tout ce que Dieu lui dira.
Elle reçoit avant ses vingt ans un don de prédication exceptionnel, qui fait d’elle un témoin incroyable de l’Évangile. Elle fait d’abord le catéchisme aux enfants, ce qu’elle aime par-dessus tout, dans une petite chapelle située à côté de l’église des dominicains de Trino. Vers l’âge de dix-sept ans, elle est autorisée à prêcher aussi auprès des adultes. Ses prises de parole sont destinées à des femmes adultes, membres du tiers ordre dominicain ou laïques, et sont à la fois parfaitement structurées et improvisées, comme si Jésus lui dictait ce qu’elle devait dire.
Peu à peu, sa force de persuasion et la sagesse de ses conseils spirituels attirent à elle de nouvelles personnes. Quelques hommes de la ville, puis de toute la région, se joignent aux femmes. Arrivent ensuite des prêtres, réguliers et séculiers, des moines et des moniales, des laïcs, des maîtres et des maîtresses de novices accompagnés des jeunes novices… C’est là une situation tout à fait exceptionnelle, y compris à l’époque contemporaine ! Toutes et tous sont conquis par son don surnaturel d’attirer les esprits et les cœurs vers Jésus.
Madeleine n’est pas l’un de ces prédicateurs enflammés qui parcourent l’Italie à cette époque, comme Savonarole († 1498). Aucune de ses invitations à se convertir n’a été l’objet d’une réserve de la part du clergé. Au contraire, on vient l’écouter de partout. Chez elle, la réforme de son ordre, à laquelle elle tient tant, passe par celle de l’Église entière : non pas seulement les clercs, mais tous les baptisés, sans exception. C’est grâce à elle que les dominicaines et les dominicains du Piémont ont embrassé la stricte observance, qui avait été restaurée par Raymond de Capoue au XIVe siècle.
Parmi les thèmes qu’elle aborde, deux reviennent de façon récurrente : les mauvaises mœurs et l’usure. Celle-ci est alors pratiquée à grande échelle par les négociants italiens. La période marque l’expansion extraordinaire du commerce européen et l’argent devient un objet de spéculation effréné. Pour Madeleine, il s’agit là d’une contre-valeur, d’un péché grave que les fidèles doivent et peuvent éviter, à condition de mettre ses pas dans ceux de Jésus.
Parmi l’auditoire de Madeleine, notons la présence inattendue du prieur général des Dominicains, venu de Milan. C’est à l’époque un homme d’une grande influence. Comme les plus modestes de ses contemporains, il est venu voir à Trino une humble femme dont les paroles inspirées changent les cœurs.
Madeleine meurt dans sa ville natale de Trino. Elle devient rapidement l’objet d’une dévotion populaire fervente. D’abord inhumée dans l’église du couvent des dominicains de Trino, elle est transférée au siècle suivant dans l’oratoire de Saint-Pierre-Martyr, où elle a été retrouvée en 1964, après les affres de la Seconde Guerre mondiale. En 1970, la dépouille de la bienheureuse est solennellement transférée dans l’église de la ville. L’Église, par la voix du pape Léon XII, l’a proclamée bienheureuse pour l’éternité.
Patrick Sbalchiero, membre de l’Observatoire international des apparitions et des phénomènes mystiques.
Au delà
Malgré sa vie enfouie, faite de modestie et d’abnégation, de dévouement pour les plus pauvres et d’écoute pour tous sans distinction, Madeleine est une actrice majeure de la vie spirituelle italienne du début du XVIe siècle.
Aller plus loin
Sur le site Internet des Dominicains de Lyon, la présentation des saintes du tiers ordre dominicain.
En complément
Les éléments biographiques de la beata Maddalena Panattieri disponibles sur le site Santi Beati (en italien).