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© DR MAXPPP, DIRK WAEM.
Guérisons miraculeuses
Boston (États-Unis)
Nº 455
Mai 1987

Une fillette s’empoisonne, Edith Stein la sauve (1987)

Un jour d’avril 1987, quand le Père Emmanuel Charles Mc Carthy, prêtre de l’Église melkite qui autorise l’ordination des hommes mariés, regagne avec son épouse le domicile familial de Boston, dans le Massachussets, il est accueilli par leurs aînés affolés. En l’absence des parents, la petite dernière, Theresia Benedicta, trois ans, est parvenue à ouvrir l’armoire à pharmacie, y a pris deux flacons de Tylenol et en a avalé les cachets comme des bonbons. Très vite, son état devenant inquiétant, les adolescents ont appelé les urgences du General Hospital, l’un des meilleurs établissements du pays. La fillette y est en soins intensifs depuis plusieurs heures lorsque les Mc Carthy arrivent au service de pédiatrie. On ne leur cache pas que la situation est très grave et les chances de survie de Theresia Benedicta quasi nulles. Mais le couple possède une foi à déplacer les montagnes.


Les raisons d'y croire

  • Theresia Benedicta est née le 9 août 1984. La date coïncide avec l’anniversaire de la mort à Auschwitz, en 1942, de la philosophe juive allemande Édith Stein. Convertie au catholicisme, Edith Stein est devenue, quand elle est entrée au carmel, sœur Thérèse Bénédicte de la Croix. Cette coïncidence frappe les parents, d’autant plus qu’Emmanuel Mc Carthy a une admiration et une dévotion particulières pour cette carmélite atypique. Ils choisissent donc de placer leur fille sous sa protection.

  • Très investi, en cette période de Guerre froide, en faveur de la paix dans le monde et l’opposition au nucléaire, le Père Mc Carthy est assez connu grâce aux retraites qu’il prêche à travers tout le pays. Chaque année, à l’approche des commémorations des bombardements d’Hiroshima et Nagasaki, le couple s’impose un jeûne strict de quarante jours afin d’obtenir la paix dans le monde. La piété des Mc Carthy n’est donc pas feinte, tout comme leur attachement à la spiritualité carmélitaine et à la récitation du rosaire.

  • Les Mc Carthy mesurent l’extrême gravité de la situation. Leur enfant a absorbé plus de seize fois la dose mortelle de paracétamol. Les reins commencent à ne plus fonctionner, puis le foie cesse à son tour d’effectuer son travail. Médicalement parlant, le pronostic ne saurait être pire. Le seul espoir de maintenir Theresia Benedicta en vie serait une éventuelle transplantation hépatique mais, outre la difficulté à trouver un donneur pour un si jeune enfant, il faut considérer le pour et le contre d’une opération à très hauts risques à laquelle elle a peu de chances de survivre et, quand bien même elle la supporterait, il faut considérer que l’enfant, avec un seul rein encore fonctionnel à 20 % et un foie transplanté, sera toute sa vie en très mauvaise santé. Des amis médecins conseillent aux Mc Carthy de ne pas prendre ce risque.

  • Devant la quasi-certitude de la mort de leur fille, réalité qu’ils n’avaient pas encore appréhendée, le couple avoue s’être « retrouvé dans des ténèbres effroyables ». Seule leur foi les soutient. La petite est placée en coma artificiel afin de la soulager. On ne leur cache pas qu’elle ne se réveillera pas.

  • Par malchance, le Père Mac Carthy doit prêcher une retraite le lendemain dans le Nord Dakota, très loin de Boston. En pareilles circonstances, tout le monde comprendrait qu’il annule son intervention et c’est d’ailleurs ce qu’il s’apprête à faire lorsque lui vient soudain cette parole du Christ à sainte Thérèse d’Avila : « Occupe-toi de mes affaires, je m’occuperai des tiennes. »

  • Alors, se fiant aux promesses de Jésus à la réformatrice du Carmel, ils se tournent vers des religieuses carmélites et demandent aux chaînes de prières de dire le rosaire en implorant l’intercession de sœur Thérèse Bénédicte de la Croix pour l’enfant qui porte son nom. Le prêtre pose un acte de confiance absolu et décide de partir prêcher la retraite.

  • De retour à Boston, lorsque les parents se précipitent à l’hôpital, le taux de créatinine de l’enfant est revenu à la normale et les reins recommencent à fonctionner. Le foie suit à son tour. En quelques heures, Theresia Benedicta est complètement guérie et ne conserve aucune séquelle de son empoisonnement. Les médecins avouent leur incompréhension.

  • Certains qu’il s’agit du miracle nécessaire à la cause d’Edith Stein, les Mc Carthy transmettent le dossier à Rome ; ils font bien puisque la guérison de leur fille aboutira à la canonisation d’Edith Stein le 11 octobre 1998.


En savoir plus

La figure d’ Edith Stein , passée du judaïsme pratiquant de sa famille à un athéisme assumé, puis convertie par sa découverte du catholicisme et le témoignage exemplaire de quelques amis, bouleverse profondément le Père Emmanuel Charles Mc Carthy, prêtre de l’Église melkite qui ordonne des hommes mariés.

La mort terrible de la jeune femme à Auschwitz, deux ans jour pour jour avant le bombardement de Nagasaki, nourrit l’engagement pacifiste du prêtre. Il voit dans son sacrifice qu’elle voulait accomplir « pour le monde entier » l’image de cet amour universel, de cette fraternité, qu’il recherche.

Proche de la spiritualité du carmel, il est touché que cette femme, l’une des plus grands philosophes et intellectuelles de sa génération, ait renoncé à tout, même à sa famille, pour s’ensevelir dans le silence du cloître et s’y donner à la prière. Elle n’en sortira que pour aller à la mort dans la chambre à gaz, mort dont on ne sait rien, en vertu du principe nazi du Nacht und Nebel, nuit et brouillard, censé vouer les déportés massacrés à un oubli éternel et définitif. Mais, pour Edith et quelques autres, l’amour l’emportera sur la mort, le silence, l’horreur.

Tel est l’exemple que ne cesse de méditer le Père Mc Carthy, au point de donner le nom de religion de la carmélite à sa plus jeune fille. C’est naturellement qu’il l’appelle au secours lorsque l’enfant est victime d’un empoisonnement qui la met aux portes du tombeau.

Spécialiste de l’histoire de l’Église, postulateur d’une cause de béatification, journaliste pour de nombreux médias catholiques, Anne Bernet est l’auteur de plus d’une quarantaine d’ouvrages pour la plupart consacrés à la sainteté.


Au delà


Aller plus loin

  • Joachim Bouflet, Édith Stein, philosophe crucifiée, Presses  de la Renaissance, 1988.

  • Père Didier-Marie Golay, Devant Dieu pour tous, la vie et le message d’Edith Stein, Le Cerf, 2009.

  • Le film de Joshua Sinclair, Une rose à Auschwitz, Saje, 2023.

  • L’article 1000 raison de croire qui rend compte de la conversion d’Edith Stein .  

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