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Les saints
Italie
Nº 368
1530 – 1616

Saint Bernardin Realino répond à l’appel divin (+1616)

Né le 1er janvier 1530 à Carpi, dans le duché de Modène (péninsule italienne), Bernardin (Bernardino) fut un étudiant brillant mais tumultueux à Bologne. Un coup de poignard donné lors d’une rixe, alors qu’il se défendait, l’obligea à fuir la ville – les autorités civiles, à cette époque, ne badinaient pas avec ce genre de chose. Après avoir exercé par la suite diverses charges publiques, avec une grande honnêteté et de la sollicitude à l’égard de ceux qui recouraient à son office, il devint jésuite. Ordonné prêtre, il fut envoyé à Lecce, dans les Pouilles (dans le talon de la botte), où il fit preuve d’une grande patience et de bonté dans son ministère. Aveugle et paralysé, il mourut le 2 juillet 1616 et la vénération que les habitants de Lecce lui témoignaient déjà s’accrut alors grandement. Le pape Pie XII l’éleva au rang des saints en 1947.


Les raisons d'y croire

  • Bernardin Realino devint religieux en 1564, à l’âge de trente-cinq ans. Étudiant brillant à Bologne, où il suivit d’abord avec succès les cours de médecine, de lettres et de philosophie, il préféra par la suite poursuivre un cursus d’études juridiques. Il en espérait plus d’avancement dans la société, ainsi que plus de revenus. Il était promis à une carrière remarquable et à une vie confortable s’il avait continué sur cette voie. Pourtant, Bernardin passera finalement des années à confesser et à diriger les âmes, tâches humbles et cachées qui sont en contraste flagrant avec sa vie dans le monde.

  • Ses compétences de magistrat lui valurent d’être nommé aux postes les plus élevés (maire, puis surintendant du royaume de Naples). Il écrivit toutefois à son frère en 1562 : « Je ne désire pas les honneurs de ce monde, mais uniquement la gloire de Dieu et le salut de mon âme. »

  • Bien que de noble ascendance, non seulement Bernardino choisit la Compagnie de Jésus, mais, de plus, il sollicita de ses supérieurs le statut de frère coadjuteur – ce qui a priori écartait de lui l’honneur de la prêtrise. Il aurait pu demander à être reçu dans le clergé diocésain : un très honorable office de chanoine du chapitre cathédral lui aurait certainement été accordé après quelques années de probation. Ce choix de vie, comme celui évoqué au point plus haut, n’a pas d’explication sur le plan humain : c’est absurde. La cause n’est donc pas en Bernardino mais en Dieu : tandis que « le chemin brillant de la magistrature s’ouvre sous ses pas, la voix discrète de Dieu lui parle au cœur de façon toujours plus pressante », écrivit Pie XII dans le bref de canonisation.

  • C’est donc parce qu’il répondit à l’appel divin que Bernardino renonça aux gloires du monde. Préparé par la prédication d’un jésuite qui l’émut profondément, cet appel prit ensuite la forme d’une vision de la Vierge Marie dont il fut gratifié : au cours d’une retraite spirituelle de huit jours, la Madone apparut à Bernardino et lui enjoignit d’intégrer la Compagnie de Jésus.

  • C’est à la Madone qu’il réserve ses dernières paroles. Aveugle et paralysé, il meurt âgé de quatre-vingt-six ans en prononçant ces mots à son adresse : « O ma Donna, mia santissima. » (« Ô ma Souveraine, ma très sainte »). On ne joue pas la comédie sur son lit de mort. C’est le moment de vérité. Les derniers instants de Bernardino Realino témoignent clairement que son cœur, c’est-à-dire son amour, était au Ciel.

  • Saint Bernardino Realino a été observé en état de lévitation. Tobia da Ponto, un habitant de Bari venu trouver le Père Bernardino pour des conseils spirituels, en témoigne. La vive lumière qui filtrait sous la porte de la cellule du religieux le supprit ; l'ouvrant doucement, il vit le Père Bernardino dans sa cellule, « agenouillé, la face tournée vers le ciel, les bras en croix, les yeux fermés, et le corps soulevé au-dessus du sol à un mètre de hauteur environ ». En vue de la béatification de Bernardin, il fut demandé au témoin de ne pas exagérer son récit par un excès de dévotion, ni d'en déformer les faits : une telle attitude ne sert pas la cause des saints... Sa réponse fut catégorique : « Ce que je viens de déclarer est la pure vérité, sans fantaisie ni exagération. »


En savoir plus

Depuis le 24 mai 1567, date de son ordination sacerdotale, Bernardino est maître des novices de Naples. Là, outre sa charge auprès des jeunes frères au couvent, il prêche, catéchise et visite les prisonniers condamnés aux galères du port de Naples. Il visite aussi les hôpitaux et les prisons. Il donne des conférences dans les couvents et les monastères. Il accorde une grande importance à la direction spirituelle, par laquelle le prêtre guide vers Dieu les âmes qui le lui demandent, et au sacrement de la pénitence, qui lui est intrinsèquement lié : il passe de longues heures au confessionnal, écoutant avec patience et bonté tous ceux qui s’y présentent, malgré la chaleur moite qu’il y fait l’été et le froid humide qui lui pénètre les membres en hiver. Combien d’hommes et de femmes a-t-il réconfortés ! Pour les volontés faibles et vacillantes il obtient le courage surnaturel, et pour les désespérées l’espérance chrétienne : cette vertu qui nous fait croire, parce que Jésus-Christ l’a promis et qu’il est fidèle en ses promesses, que ce dernier nous donne ici-bas sa grâce pour lui plaire, comme gage et anticipation de la béatitude éternelle en l’autre monde, à laquelle il appelle tous les hommes. La voix du prêtre réveille dans les cœurs endurcis l’appel intérieur dont Dieu presse chaque conscience.

Envoyé à Lecce en 1574 pour y fonder une maison et un collège de sa congrégation, il y passera les années restantes de sa vie terrestre. Ses supérieurs tentent à plusieurs reprises, en raison des nécessités de son ordre, le nommer ailleurs. Un orage survient alors, qui l’empêche de se mettre en route pendant plusieurs jours, ou une forte fièvre qui lui fait garder la chambre : on conclut que la volonté divine est qu’il demeure à Lecce.

Sa vie dans les Pouilles est rythmée par la direction des âmes et le confessionnal, comme en Campanie. Gens simples comme membres du clergé, princes et prélats vont trouver le « saint vieillard » pour échanger avec lui et lui demander conseil. Il y a toujours foule devant son confessionnal. Il crée en 1583 une congrégation pour les prêtres diocésains pour promouvoir leurs propres vertus sacerdotales et améliorer leurs connaissances en théologie morale, afin qu’ils puissent devenir de meilleurs confesseurs.

Quand, en 1616, la ville apprend que le religieux est à l’agonie, des foules se rassemblent devant le collège des jésuites. Le maire et les magistrats viennent trouver par deux fois Bernardino et lui demandent formellement, une fois ce dernier au Ciel, de défendre et de protéger à l’avenir la cité. Incapable de parler longuement, le vieillard hoche la tête en signe d’approbation. Il veille toujours aujourd’hui sur la « très noble, très dévote et très aimable ville de Lecce », comme il se plaisait à l’appeler. Sa dépouille est conservée dans une chasse en verre dans l’église du Gesù, et la clé de la cité repose symboliquement sur un coussin posé sur ses jambes.

Docteur en philosophie, Vincent-Marie Thomas est prêtre.


Aller plus loin

P. Ettore Venturi, Storia della vita del Beato Bernardino Realino, sacerdote professo della Compagnia di Gesù, Rome, A. Befani, 1895, 535 p.


En complément

  • La province de la Compagnie de Jésus d’Europe occidentale consacre à saint Bernardin Realino une notice sur son site.

  • Le site Jesuits.global propose aussi, en anglais, une courte vie du saint .

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