Fin mars 1977, le volcan du Piton de la Fournaise entre en éruption. Il s’agit d’une éruption mémorable : pour la première fois depuis cent soixante-dix-sept ans, les laves sortent de l’enclos (caldeira entourant le volcan) dans lequel elles sont habituellement contenues et s’écoulent à travers l’île de La Réunion, jusqu’à se précipiter dans l’océan Indien. Les laves brûlent tout sur leur passage… ou presque. Le 13 avril, alors que la coulée traverse et détruit le village Piton Sainte-Rose, l’église est étrangement épargnée : l’édifice religieux est seulement encerclé par la lave, sans être consumé.

• La réalité et la gravité de l’éruption volcanique de 1977 ne peuvent être remises en question. Près de six cents habitants sont évacués en urgence. Les coulées de lave détruisent trente-trois habitations, abîment la banque et la gendarmerie, coupent la route nationale et recouvrent deux cent quatre-vingt-dix hectares de terres cultivées.

• Arrivée au seuil de l’église de Sainte-Rose, consacrée à « l’Enfant Jésus de Prague », la lave se déverse dans la nef sur quatre mètres avant de s’arrêter. Sans raison apparente, la lave ne fait qu’entourer l’édifice sans y pénétrer davantage et ne le brûle pas.

• Les vitraux éclatent du fait de la forte température, ce qui témoigne de la proximité réelle de la roche en fusion.

• Des photographies de l’église ont été prises juste après l’éruption : on y observe les milliers de mètres cubes de lave refroidie amassés autour de l’édifice. On ne comprend pas pourquoi la lave ne s’est pas déversée davantage à l’intérieur du bâtiment.

• Les vestiges de la coulée de 1977 sont encore visibles aujourd’hui autour de l’église. La façon dont le bras de lave contourne l’édifice n’a rien de naturel : le relief ne justifie absolument pas cet itinéraire pour la coulée volcanique.

• Cet événement est considéré comme un vrai miracle par les Réunionnais qui ont vécu l’éruption de 1977. En conséquence, l’église fut renommée « Notre-Dame-des-Laves » et elle devint l’un des plus grands lieux de culte de l’île.

Le 24 mars 1977, après une accalmie de cinq mois, le volcan du Piton de la Fournaise entre à nouveau en éruption. L’activité volcanique se déroule dans un premier temps à l’intérieur de l’Enclos Fouqué, la caldeira entourant volcan (caldeira d’effondrement très ancienne). Mais, le 5 avril, une série de fissures permettent à la lave de s’écouler à l’extérieur de l’Enclos, sur le flanc nord-est du massif. Étant donné l’ampleur et le danger que représente cette éruption, les autorités de l’île procèdent rapidement à l’évacuation des habitants de la zone menacée.

De fait, la lave s’oriente vers le village de Piton Sainte-Rose et l’atteint le 9 avril, brûlant tout sur son passage, dont plusieurs maisons. La lave rejoint l’océan Indien le 10 avril, dimanche de Pâques, après minuit.

Trois jours plus tard, une nouvelle coulée de lave atteint le village et détruit encore davantage de bâtiments. « Le 13 avril à 19 h 15, la lave s’avance sur le parvis de l’église de Piton Sainte-Rose, brûle le portail, puis s’immobilise à l’entrée de la nef. Une dizaine de cases sont englouties, la gendarmerie et l’église sont comme deux îlots au milieu de l’immensité figée de basalte noir. Vers 21 h 30, la lave atteint la mer. Le 15 avril, le volcan se calme, les bulldozers prennent d’assaut la lave à peine durcie, encore chaude, et rouvrent la route » (Au cœur de la Fournaise, Roland Benard et Maurice Krafft).

Michel Ricard