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Les saints
Portugal
Nº 292
1908-1919

La maturité surnaturelle de Francisco Marto, « consolateur de Dieu » (+1919)

Le 4 avril 1919 s’accomplissait une promesse de Marie faite au petit Francisco Marto : l’emmener bien vite au Ciel. Promesse qui faisait sa joie, puisqu’à des curieux qui lui demandaient s’il voulait devenir militaire, médecin ou prêtre, il répondait : « Je veux n’être rien et mourir pour aller au Ciel. » Comme sa cadette, Jacinta, et sa cousine, Lucia, Francisco a vu six fois la Sainte Vierge au cours de l’année 1917, près du village portugais de Fatima. Et même si, à la différence des deux filles, il n’a jamais entendu un mot de ce qu’elle leur disait, il sait qu’elle a promis de les emmener très vite au Ciel, sa sœur et lui, « à condition qu’il dise beaucoup de chapelets » – condition qu’il remplit scrupuleusement, non pour s’assurer le paradis mais pour consoler son « Dieu trop offensé », dont la tristesse, depuis qu’elle lui a été révélée, lui cause un chagrin continuel.


Les raisons d'y croire

  • Francisco est un enfant comme les autres, joueur, mais, comme Jacinta, sa petite sœur, il est sujet à des sautes d’humeur qui le rendent boudeur et maussade, trait de caractère qui agace sa cousine germaine, Lucia dos Santos, quand elle garde le troupeau familial avec les enfants Marto. Or, après les premières apparitions de l’ange du Portugal, dans le courant du printemps 1916, Francisco se corrige spontanément et en très peu de temps de ce défaut.

  • Avant les premières apparitions, Francisco aime chanter et jouer du fifre ; c’est même sa distraction favorite tandis qu’il garde les bêtes, puisqu’il n’est pas scolarisé. Du jour au lendemain, il y renonce et, si les adultes s’en étonnent, répond gravement : « Je ne puis plus être heureux maintenant que j’ai vu combien Dieu était triste. »

  • Comme beaucoup de jeunes bergers dans les pays catholiques, Lucia, Francisco et Jacinta s’occupent à réciter le chapelet quand ils sont au pré, ce qui est aussi une façon de mesurer le temps (dire un chapelet prend vingt minutes ; un rosaire, une bonne heure).

  • Mais ils ont tendance à opter pour une version abrégée, ne disant que les premiers et derniers mots des prières, ce qui leur laisse du temps pour s’amuser. Ils y renoncent après que l’ange leur a dit : « Que faites-vous ?! Priez, priez beaucoup ! […] Offrez sans cesse au Très-Haut des prières et des sacrifices. » Dès lors, et jusqu’à la fin de leurs courtes vies, les enfants Marto ne se préoccuperont plus jamais de leurs amusements d’autrefois, pour lesquels « ils ne se sentent plus de force ».

  • On ne peut imaginer que les enfants aient inventé ces propos, car ils sont exprimés dans une langue trop recherchée pour eux, avec un vocabulaire que, tous trois analphabètes, ils ne possèdent pas.

  • Lors des apparitions de Notre Dame, Francisco la voit toujours très bien, mais n’entend pas un mot de ce qu’elle dit aux filles, qui doivent lui répéter ce qui le concerne. Francisco semble comprendre qu’il n’est pas digne d’entendre la Sainte Vierge et accepte cela comme une pénitence pour ses péchés enfantins, ne réclamant jamais cette grâce. C’est encore une preuve de maturité spirituelle surprenante pour ce garçon de neuf ans.

  • Le 13 juin, les enfants peuvent brièvement contempler la Sainte Trinité et se voir en elle. Francisco résumera cette expérience ineffable en des termes que ne renieraient pas les grands mystiques, et qui ne peuvent être ceux d’un enfant ignorant et illettré : « Nous étions comme en feu dans cette lumière qui est Dieu et nous ne brûlions pas. Il est si beau, si bon que nous ne pouvons le dire ! Mais quelle peine qu’il soit si triste !!! Ah ! si je pouvais le consoler. »

  • Cette réflexion, cette méditation sur la tristesse de Dieu – par ailleurs impassible devant les péchés des hommes, leur refus de son amour, de sa miséricorde, et leur choix délibéré de se précipiter en enfer malgré le sacrifice de la Croix – est d’une portée théologique et d’une profondeur qui dépassent de très loin les possibilités intellectuelles d’un enfant de son âge.

  • Il est plus étonnant encore que cette méditation soit devenue l’unique préoccupation de ce petit garçon et qu’elle ait rempli sa vie pendant les deux années qui lui restaient à vivre. Peu d’adultes seraient capables de cette constance.

  • Il est encore plus remarquable qu’au milieu des pires souffrances de la maladie qui l’emporta, supportées sans la moindre révolte, cette pensée de « consoler Dieu » l’ait soutenu, le poussant non seulement à les offrir mais à les rechercher.

  • Après la vision de l’enfer, Francisco reçoit une vocation de consolateur, comme il le confie à Lucia qui lui demande : « Qu’est-ce que tu aimes le mieux ? Consoler Notre Seigneur ou convertir les pécheurs pour que moins d’âmes tombent en enfer ? — Consoler Notre-Seigneur […]. Je voudrais consoler Notre Seigneur et convertir les pécheurs pour qu’ils ne l’offensent plus. »

  • Plus tard, quand on lui demande à quoi il pense quand il prie, lors de longues heures de contemplation, voire d’extase, il précise : « Je pense à Dieu qui est si triste à cause de tant de péchés. Ah ! si j’étais capable de lui faire plaisir ! » Là encore, l’on ne peut supposer que Francisco soit parvenu sans grâce spéciale du Ciel à une telle hauteur dans la vie spirituelle.

  • Depuis que la Sainte Vierge a annoncé, le 13 juin 1917, qu’elle emmènerait bientôt Jacinta et Francisco au Ciel, l’enfant accepte cette mort prématurée avec joie et s’y prépare, préférant passer ses journées en prière à l’église plutôt que d’aller à l’école, car cela ne lui servira à rien de savoir lire. Il récite au moins trois rosaires par jour, jeûne, se mortifie, porte un cilice, toutes choses dont aucun adulte, excepté quelques saints, n’est capable.


En savoir plus

Né le 11 juin 1908 au hameau d’Aljustrel, près de Fatima, au Portugal, Francisco Marto a été totalement métamorphosé par les apparitions de l’ange du Portugal, en 1916, puis par celles de Notre Dame, en 1917. Il change du tout au tout et révèle une âme mystique et consolatrice comme il s’en rencontre peu dans l’histoire de l’Église.

Tout occupé à consoler son Dieu accablé de tristesse devant l’ingratitude des hommes, l’enfant développe aussi une très forte dévotion à l’Eucharistie, alors qu’il a été jugé trop jeune par son curé pour communier – même si l’ange l’a fait boire au calice du Précieux Sang, comme sa sœur, donnant l’hostie uniquement à Lucie, qui a fait sa première communion très précocement. « Je préfère rester à l’église à consoler Jésus caché » devient son leitmotiv.

Le 23 décembre 1918, Francisco et sa sœur, affaiblis par les privations qu’ils s’imposent, contractent la grippe espagnole. Il sait immédiatement qu’il va mourir, mais refuse qu’on lui retire son cilice et supporte sans broncher toutes ses souffrances « pour consoler Notre Seigneur, pour Jésus, pour Notre Dame, les pécheurs et le pape. »

Début avril 1919, après un trimestre d’agonie, voyant l’état de son fils se dégrader encore, madame Marto appelle le prêtre afin qu’il lui administre les derniers sacrements. À peine Francisco a-t-il reçu la communion que toutes ses souffrances cessent. Il meurt paisiblement à dix heures du matin, le 4 avril.

Spécialiste de l’histoire de l’Église, postulateur d’une cause de béatification, journaliste pour de nombreux médias catholiques, Anne Bernet est l’auteur de plus d’une quarantaine d’ouvrages pour la plupart consacrés à la sainteté.


Aller plus loin

Chanoine Barthas, Il était trois petits enfants, 1940 (réédition Résiac, 1997).


En complément

  • Jean-François de Louvencourt, François et Jacinthe de Fatima, Éditions de l’Emmanuel, 2010.

  • Joao Cesar da Neves, Lucie de Fatima et ses cousins, Médiaspaul, 2016.

  • Le film de Daniel Costelle, Apparitions à Fatima, NS Video, 2000.

  • Le film de Ian et Dominic Higgins, Le 13e jour, SAJE distribution, 2016.

  • Le film de Marco Pontecorvo, Fatima, SAJE distribution, 2020.

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